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Ce mardi 5 février, tous les dirigeants du G5 Sahel se réunissent à Ouagadougou au Burkina Faso pour y discuter sécurité, terrorisme et financement. Cinq ans après sa création, les défis restent nombreux pour cette organisation aussi fragile qu'indispensable.
Le 16 février 2014 est un jour historique pour le Sahel. Mis à mal par les différents groupes armés qui sévissent dans la région, les présidents de Mauritanie, du Mali, du Tchad, du Niger et du Burkina Faso décident d’unir leur force au sein d'une toute nouvelle coopération régionale, le G5 Sahel. Leur but : lutter contre la menace terroriste, les exactions des groupes armés et le crime organisé. En 2014, l'organisation a été accueillie avec enthousiasme aussi bien de la part des populations que par la scène internationale.
Cinq ans plus tard, lors du Ve Sommet de l'organisation le 5 février 2019, les défis pour le G5 Sahel restent nombreux. Les attaques terroristes persistent et les conflits intercommunautaires s'étendent, comme le rappelle Emmanuel Dupuy, président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe : « Depuis le lancement du G5 Sahel, de nouveaux groupes terroristes se sont implantés. C'est notamment le cas de l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS), fondé dès mai 2015, et du Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), formé en mars 2017. A cela s'ajoute des groupes armées touaregs, peuls ou toubous qui n'hésitent pas à prêter main forte aux djihadistes. »
Face à la progression de la menace terroriste, les dirigeants du G5 Sahel ont décidé en juillet 2017 de renforcer leur coopération, en montant une force militaire conjointe pour lutter contre les groupes armés. Mais sur le terrain, les soldats ont du mal à s’imposer.
« La situation s'est dégradée »
Alors que 14 civils ont péri dans une attaque terroriste, à seulement deux jours du Sommet du G5 Sahel, la crédibilité de l'organisation est mise à mal. D'après Nicolas Normand, ancien ambassadeur au Mali, au Congo et au Sénégal, la situation au Sahel ne s’est pas améliorée depuis sa création. « Au contraire, jamais les cas de violences n'ont été aussi nombreux. Néanmoins, on ne peut pas rejeter la faute sur le G5 Sahel . » Au vu de ses maigres financements, il est difficile pour les cinq pays signataires de remplir correctement leurs missions. Sur les 414 millions d'euros d'aide promis par la communauté internationale, près de 160 millions n'ont pas été versés.
L’absence de ces versements se font durement sentir sur le terrain, puisque les soldats manquent aussi bien d’équipements de protection que de véhicules blindés. Lors de son dernier rapport remis au Conseil de sécurité le 12 novembre 2018, le secrétaire général des Nations unis, Antonio Guterres a dénoncé « de fortes lacunes en matière de formation et de capacités, l’absence de bases opérationnelles sûres et fortifiées et le manques de fonds »
Selon le dernier rapport de l'ONU, on compte depuis 2014 au Burkina Faso près de 285 morts dus aux terroristes. Au Mali, depuis janvier 2018, 200 attaques terroristes ont été recensées, touchant aussi bien des militaires que des civils.
L'Etat doit s'imposer ou les djihadistes le feront
Si les difficultés de G5 Sahel sont nombreuses, l'organisation reste indispensable pour Nicolas Normand, car des opérations militaires, comme la mission française Barkhane, ou des ONG étrangères ne peuvent résoudre les problèmes de fond qui minent les pays. « Il faut que les États gagnent en crédibilité auprès des populations, qu'ils recréent du lien social. Engager des instituteurs, des médecins, des juges, des policiers. Car si ce n'est pas l’État qui remplit ce rôle, ce seront les groupes djihadistes qui le feront. Avec leur propre philosophie ».
Tout cela a bien sûr un coup conséquent. Selon Nicolas Normand, si la communauté internationale délaisse le Sahel et ne fournit pas les financements nécessaires aux acteurs adéquats, la situation dans la région risque de devenir rapidement hors de contrôle. Avec pour pire scénario : la chute des Etats de droit et l’établissement d’un nouvel Etat islamique au Sahel.
Lucie Duboua-lorsch
« J’appelle à ce que vous vous fassiez égorger »,« Tire-toi une balle dans la tête » … Les mots « doux » fleurissent sur Twitter à l’encontre de Nicolas Hénin, ancien otage de l’Etat islamique. Menaces, injures, appels au lynchage : l’ex-journaliste a porté plainte mardi 5 février pour menaces de mort, menaces de commettre un crime et cyberharcèlement.
Il a été victime d’un « raid numérique », autrement dit, d’opérations de harcèlement en ligne menées en masse par des internautes contre une ou plusieurs victimes. Avec la loi de Marlène Schiappa d’août 2018 sur les violences sexuelles et sexistes, ces harceleurs encourent jusqu’à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende.
Face au cyberharcèlement, la législation a connu plusieurs évolutions. Il faut attendre 2014 pour que la mention « service de communication au public en ligne » apparaisse pour la première fois dans la loi. Les téléphones portables, les forums, les jeux en lignes, les messageries instantanées ou encore les réseaux sociaux tombent alors sous le couperet de la loi. Par exemple, insulter de manière répétée via les réseaux sociaux devient un délit, punissable de 30 000 euros d’amende et de deux ans d’emprisonnement.
Qui est responsable ?
Les harceleurs d’abord, mais leur identification peut se heurter à leur anonymat sur la toile. « C’est tout le problème », poursuit Marie Piquette, déléguée à la protection des données à l’université de Strasbourg. « L’anonymat sur le web est aussi censé protéger des personnes qui auraient besoin de rester sous pseudonyme. C’est toujours l’utilisation détournée qui est faite de ces moyens de protection qui pose question », ajoute-elle.
Derrière, chaque personne qui « partage » un post insultant sur les réseaux sociaux se rend responsable devant la loi. Et ce, y compris pour dénoncer l’auteur du harcèlement. Mieux vaut plutôt signaler la publication à la Cnil, le gendarme du web. La plupart des menaces sont hébergées par des plateformes en ligne. Toutes permettent aux utilisateurs de signaler ou demander le retrait de contenus injurieux ou inappropriés, mais rarement plus. « Les sites sont responsables de leur contenu, ils sont censés vérifier celui qui contrevient à leur public, souvent a posteriori de la diffusion et à la suite de signalements. Ils sont responsables du contenu, surtout si ce contenu reste », ajoute Jeoffrey Sabbah, doctorant à l’université de Strasbourg.
Lundi 4 février, le site jeuxvideo.com a enfin rejoint le code de conduite de l’Union européenne contre la haine sur les sites internet. Son forum de discussion « Blabla 18/25 » est surtout connu pour ses campagnes de cyberharcèlement à répétition. En juillet dernier, trois internautes ont été condamnés après avoir proféré des menaces de mort envers Nadia Daam. La journaliste avait critiqué le forum lors d’une chronique sur Europe 1. La plateforme s’engage dorénavant à répondre en moins de 24 heures au signalement de contenus inappropriés.
Peu de plaintes
Mais souvent, ces dispositifs ne suffisent pas, le mal étant déjà fait. L’année dernière, une cinquantaine d’adolescentes de la région de Strasbourg ont été victimes de cyberharcèlement sur Snapchat. Plusieurs comptes ont publié des photos dénudées (volées ou faites avec des montages photos) des jeunes femmes âgées de 13 à 16 ans. Des situations récurrentes dans le milieu scolaire. Selon une récente enquête de l’Unicef, 9,5 % des élèves sondés déclarent avoir été agressés ou harcelés sur les réseaux sociaux. Le chiffre grimpe à 24 % chez les adolescents âgés de 18 ans.
Si des plaintes ont été déposées, elles restent largement minoritaires. En cause, le manque d’information, la complexité administrative, la peur du regard des autres... « A l’image de certaines femmes qui n’osent pas porter plainte en cas de harcèlement sexuel parce qu’elles ont honte », termine Marie Piquette. En 2017, selon les données du ministère de la Justice et du journal 20 minutes, sur 558 000 condamnations, seules 8 concernaient un acte de cyberharcèlement. Un chiffre dérisoire. Pour beaucoup de victimes, face aux ressorts juridiques, porter plainte, c’est presque peine perdue.
Camille Wong
Tous les jours, insultes, injures et menaces déferlent sur les réseaux sociaux. La législation évolue, mais les responsabilités restent floues et les plaintes peu nombreuses.