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Les syndicats du personnel hospitalier ne décolèrent pas, après l’annonce de la ministre de la Santé Agnès Buzyn de créer un métier d’infirmier de pratique avancée aux urgences. Christian Prud'homme, médecin urgentiste, est sceptique quant à la pertinence de cette mesure.

« C'est mon fils qui est mort »

Un homme, pas très grand, rond de visage, tout en noir, une banane autour de la taille, s'avance. « Je voudrais juste m'agenouiller un peu, c'est mon fils qui est mort. » Les ouvriers interrompent alors leur travail. « Cette douleur, je ne la souhaite même pas à celui qui m'a fait ça », explique le père de Maël, après s'être recueilli. Sa femme et ses deux autres enfants ont eu la vie sauve, eux, mais se sont blessés en sautant par la fenêtre de leur premier étage. Il se demande quand il pourra récupérer des affaires. « Il y a peut-être des choses dans ce tas de gravas, j'ai retrouvé une chaussure de mon fils derrière l'immeuble, la semaine dernière. Pour les souvenirs, seulement, tout est détruit, je n'ai plus rien ici. »

A la sortie de l'impasse, très vite, un petit attroupement se fait autour du père en deuil. Les voisins lui prennent les mains, l'embrassent, lui témoignent leur amitié. Parmi eux, un couple fait partie des neufs foyers qui ont complètement perdu leur logement dans l'incendie. « On n'avait déjà pas grand chose, maintenant on n'a plus rien », résume le chef de cette famille recomposée de neuf enfants. Pour se reloger, ils ont préféré faire appel à des amis plutôt qu'accepter les propositions de la mairie. « Ils nous proposent des logements dans la cité des Ecrivains [un quartier populaire à quelques encablures de la rue Principale, ndlr] , mais tout le monde sait que c'est insalubre, et infesté de puces et de punaises de lit », s'emporte-t-il. Et de reprocher à la maire de n'avoir pas rendu visite à tous les sinistrés.

Une marche blanche en souvenir de Maël

Sonia et Claudine, deux poussettes et trois enfants, un peu plus loin, ne sont pas du même avis. Assistantes maternelles au Parc du Château, une de leur collègue a perdu son logement dans le sinistre : « La mairie s'est occupée de tous les papiers pour l'aider à se reloger, c'est allé vite », assurent-elles. Contactée, la mairie n'a pour le moment pas donné suite à nos demandes d'entretien.

Mardi matin, la vie semble malgré tout reprendre un peu son cours normal, rue Principale. « Ça va mieux depuis ce week-end », estiment Sonia et Claudine. Même si la colère n'est jamais très loin : « Et lui, il va avoir quoi celui-là ?» « Celui-là », c'est Tony Mosquera, 22 ans, principal suspect, mis en examen et écroué jeudi pour avoir causé l'incendie, sous emprise de l'alcool. « Comment ça se fait qu'un mec de cet âge soit dans la rue, en semaine, à picoler, alors qu'il n'a pas de boulot ? », s'indigne Raymond Romilly, propriétaire du bierstub La Houblonnière, et habitant du quartier depuis 34 ans.

Beaucoup de voisins assurent qu'ils seront présents à la marche blanche en souvenir de Maël, samedi à dix heures. Le cortège partira de la mairie, puis passera devant l'immeuble pour finir dans la cour de son ancienne école.

Nicolas Massol

Elle est pourtant jolie, la rue Principale, avec ses maisons à colombages, ses commerces et sa microcrèche « Les Papillons ». Le vieux Schilick, dans la banlieue de Strasbourg, est loin d'évoquer le décor d'un drame. Pourtant, il suffit d'avancer un peu dans la petite impasse, dans le prolongement de la rue, pour découvrir la façade noircie. Ses odeurs de suie et de fumée sont toujours présentes une semaine après l'incendie criminel du numéro 43, qui a coûté la vie à un enfant de 11 ans, blessé onze personnes et détruit neuf logements.

Ce mardi 10 septembre, sur les toits de l'immeuble sinistré, les employés de l'entreprise Stell et Bontz déblaient les tuiles endommagées pour permettre la venue des experts des assurances. Des débris calcinés de meubles et d'objets indistincts sont entassés devant, protégés par des grilles de chantier. Sur elles, sont accrochées des photos rieuses de Maël, l'enfant retrouvé mort dans les décombres mardi 3 septembre. Des bouquets de fleurs ont été déposés, en hommage, au pied des grilles.

Les deux nations pourraient bientôt se retrouver en octobre 2020./ Photo CC BY-NC 2.0

Le spectacle ClaudelKahloWoolf était présenté dans le cadres des Bibliothèques idéales./ Photo Compagnie Horizontal - Vertical.

Joué lundi 9 septembre lors du festival des Bibliothèques idéales, le spectacle de danse et de théâtre ClaudelKahloWoolf revient sur la vie et l’art des trois féministes, entre fiction et réalité.

Des murmures s’élèvent des hauts parleurs : « C’est un monstre », « c’est un monstre », « c’est un monstre ». Trois phrases pour trois artistes du début du XXe siècle, mises en scène dans le spectacle de théâtre et de danse ClaudelKahloWoolf, joué à la Cité de la Musique et de la Danse de Strasbourg, ce lundi 9 septembre à 19h.

On y narre une rencontre fictive entre la sculptrice Camille Claudel, la peintre Frida Kahlo et l’autrice Virginia Woolf sur scène, dans ce qui ressemble à un atelier d’artiste. Entre quelques anecdotes biographiques sur l’enfance britannique de Virginia Woolf, les tourments artistiques de la Française Camille Claudel et les lettres d’amour de la Mexicaine Frida Kahlo, ce sont ici des icônes féministes qui sont racontées. Chacune dans leur langue d’origine, le tout surtitré en français.

Face aux figures masculines

Elles sont assises sur des chaises blanches. Toutes les trois, elles portent des robes bleues et blanches trop larges, nouées à la taille. Uniformes, loin de l’image lumineuse et colorée des tenues de Frida Kahlo, des robes victoriennes de Virginia Woolf et des chemises de sculptrice portées par Camille Claudel. Pour les reconnaître, il faut s’attarder sur les coiffures ou la couleur du rouge à lèvres. Elles enfilent plus tard quelques tenues plus identifiables même si quelconques.

Dès les premières scènes, les trois artistes jouent des poings face au public. Toutes chutent sur scène, battues par la folie, la dépression mais surtout l’étouffante présence des hommes dans leur vie. Elles sont vaincues par les figures masculines qui les ont entourées toute leur vie, des pères distants aux compagnons infidèles.

Virginia Woolf s’effondre la première à cause d’un mari effrayé par son désir sexuel sur lequel il n’a aucun contrôle. Frida Kahlo la suit, trompée par son célèbre époux Diego Rivera alors même qu’elle se fait amputer d’une jambe. Camille Claudel tombe la dernière, internée par son frère et délaissée par son amant Auguste Rodin.

De la réalité à la fiction

Les discussions entre les personnages sont parfois lunaires, un peu éloignées des icônes. C’est la part de fiction choisie par la metteuse en scène Monica Mojica. Ainsi, Camille Claudel verse du lait d’un récipient à un autre, action retransmise sur l’écran monté derrière la scène. On fait de la machine à fumer un usage abusif. Des cornes de cerfs sont déplacées d’un endroit à l’autre de la scène, sans qu’on y voit une quelconque signification.

Pendant une heure et demie, les trois femmes jouent, se disputent, écoutent à la radio d’autres parler d’elles. Elles dansent, crient et s’amusent dans un univers pensé pour elles. Elles révèlent une intimité au décor épuré imaginée par Monica Mojica, qui est également l’interprète de la célèbre Mexicaine. Face à elle, Jessica Hinds se glisse dans la peau de la Britannique, Clara Rousselin dans celle de la sculptrice. Les actrices de la compagnie Horizontal - Veritcal, malgré leur alchimie, s’effacent derrière leur personnage, quitte à être happé dans des enjeux qui paraissent trop lourds pour elles.

Dans la scène finale, la fiction l’emporte sur une réalité beaucoup plus dure. C’est un parti pris de Monica Mojica qui veut questionner le mythe autour de la mort d’un artiste. Alors que Camille Claudel meurt après trente ans passé dans un hôpital psychiatrique, que Frida Kahlo pense à se suicider et que Virginia Woolf passe à l’acte, la fin du spectacle libère ses protagonistes. Sur l’écran, de petites araignées multicolores commencent leur parade nuptiale. Le mâle ose une chorégraphie précise, tout en s’approchant doucement de la femelle. Avant ou après la fécondation, cette dernière peut décider de dévorer son partenaire. Un parallèle qui apparaît comme une émancipation de ces icônes solaires, souvent éclipsées par les hommes.

Judith Barbe

ClaudelKahloWoolf, mis en scène par Monica Mojica, avec Monica Mojica, Jessica Hinds et Camille Rousselin, de la Cie Horizontal - Vertical.

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