A l'appel de la CGT, les salariés des librairies Chapitre occupent les boutiques qui ont fermé dans plusieurs villes de France. A Colmar, cela fait huit jours qu'ils sont six à se relayer jour et nuit sur leur lieu de travail. Ils réclament de meilleures indemnités de licenciement.
La librairie Chapitre avait ouvert ses portes il y a 117 ans à Colmar. Il y a huit jours, elle a définitivement baissé le rideau. Et depuis huit jours, six des neuf salariés occupent les locaux, 24h sur 24. Tous les matins, ils offrent le café aux passants et l'après-midi, le thé. Les anciens clients, nostalgiques, viennent discuter avec les libraires et les soutenir. Leur combat d'aujourd'hui concerne les indemnités de licenciement qui, à leurs yeux, sont insuffisantes. Valérie Alletto travaillait depuis 25 ans à la librairie Chapitre et même si elle aime son métier, elle va probablement être obligée de changer de travail « car il y a peu de places de libraires actuellement. Il va donc falloir qu'on se forme et pour ça il faut du temps et de l'argent. »
Dans la matinée, Pierre Schmidt, délégué de l'union locale de la CGT, passe à la boutique pour discuter. Une manière de soutenir le combat des salariés, mais aussi d'expliquer les étapes de la négociation. Car la plupart de ceux qui occupent les locaux ne sont pas des habitués de la lutte sociale, mais des salariés qui s'inquiètent pour leur avenir. La décision de s'installer dans la librairie a été spontanée et unanime. "Un moment fort", se souvient Martine, "on apprend à mieux se connaître".
Les autres libraires solidaires
A quelques pas de là, les treize salariés de la librairie Ruc ont eu plus de chance. Ce midi, Patricia Winter a cuisiné pour les occupants de la rue des Têtes. Profitant de son jour de congé, elle vient partager le repas avec eux. Un soutien très apprécié des salariés de la boutique Chapitre. Appartenant au même groupe, la librairie Ruc a été rachetée par un libraire indépendant. Il était d'ailleurs prêt à reprendre les deux boutiques, mais « l'Etat n'aide à la reprise des librairies indépendantes que pour une seule librairie par ville », précise Valérie Alletto.
Autour du repas, les discussions tournent autour des raisons de la fermeture. "Vous n'étiez pas en déficit ?", demande Pierre Schmidt. "Non, mais on ne rapportait pas assez pour un financeur. Mais ce qu'on ne comprend pas c'est que le groupe, quand il nous a racheté, savait que le secteur de la librairie rapporte peu", s'interroge Valérie Alletto. Depuis plusieurs mois, la rumeur de la fermeture circulait. Les éditeurs avaient alors arrêté de fournir la librairie dès le 15 octobre, par peur de se retrouver avec des factures impayées. Une décision qui n'a pas arrangé le sort de la boutique, selon Valérie Alletto : "N'ayant plus de nouveautés, nos ventes ont chuté". Le seul point positif pour elle, c'est que "quand les grands groupes tombent, les indépendants réapparaissent".
La prochaine réunion du comité d'entreprise du groupe Actissia (qui possédait la filiale des librairies Chapitre) aura lieu le 24 février à Paris, quatre jours avant le comité extraordinaire. La fin des négociations n'est pas connue. En attendant, à Colmar, comme dans d'autres villes de France où des librairies du réseau ont fermé, les salariés continuent d'occuper les lieux et de garder leur stock pour faire entendre leur voix. 434 personnes sont concernées par les licenciements, soit un tiers des salariés du réseau.
Gwladys Porracchia
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