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La Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) française s’attaque au mastodonte américain Google. C’est plus particulièrement sa branche « Analytics », service gratuit d’analyse d’audience pour des sites web, qui est visée. Un service très pratique pour les gestionnaires de ces sites, mais « illégal », juge la Cnil : les données transférées par l’entreprise vers ses serveurs américains ne sont pas suffisamment protégées. « En effet, si Google a adopté des mesures (…) celles-ci ne suffisent pas à exclure la possibilité d’accès des services de renseignements américains à ces données », écrit le régulateur.
Ce mercredi, des gestionnaires de sites web ont reçu une mise en demeure. La Cnil les contraint à abandonner le service, sous peine de sanctions – sans préciser encore lesquelles. Ils ont un mois pour se mettre en règle. La décision de l’autorité française arrive quelques jours seulement après celle de son homologue autrichien, la DSB. Le début d’une vague européenne contre Google ?
#RGPD Saisie par @NOYBeu, la CNIL, en coopération avec ses homologues européens, a analysé les conditions dans lesquelles les #données collectées par Google Analytics sont transférées vers les États-Unis et estime que ces transferts sont illégaux https://t.co/4YWv9snEpY pic.twitter.com/zU9awj4KLF
— CNIL (@CNIL) February 10, 2022
Le règlement général sur la protection des données (RGPD) exige depuis 2018, pour tout transfert de données hors de l’Europe, un niveau de protection au moins équivalent à celui de l’UE. Les États-Unis ne rencontrent pas ces exigences. Les accords successifs (Safe Harbor, Privacy Shield …) ont tous été invalidés par la Cour de justice de l’Union européenne (UE): même là, les données n’étaient pas suffisamment protégées.
L’ONG pour la protection des données personnelles Noyb, basée à Vienne, se félicite de cette décision. Et pour cause : lorsque la Cour de justice de l’UE invalide à l'été 2020 le dernier accord entre l’UE et les États-Unis, l’organisation dépose une centaine de plaintes auprès des régulateurs des pays membres contre Google Analytics et Facebook Connect. Ils sont accusés de ne pas protéger les données personnelles de leurs citoyens. La décision des autorités française et autrichienne sont les conséquences directes de ces requêtes. « Suite aux plaintes de Noyb, la CNIL déclare officiellement que les transferts de données entre l'UE et les États-Unis via Google Analytics sont illégaux et ordonne à un opérateur français de se mettre en conformité », tweete Noyb.
Following complaints by noyb, the CNIL officially states that EU-US data transfers via Google Analytics are illegal and orders a French operator to comply: https://t.co/sWupdqeIgh pic.twitter.com/jdlRkCoBGZ
— noyb (@NOYBeu) February 10, 2022
Plausible Analytics, alternative open source à Google Analytics, se félicite de cette décision : « Google Analytics est-il illégal ? Oui, a dit l'autorité autrichienne de protection des données et aujourd'hui l'autorité française de protection des données est d'accord ! C'est une époque passionnante pour un projet européen d'analyse Web axé sur la protection de la vie privée. »
Is Google Analytics illegal?
Yes, said the Austrian Data Protection Authority and today the French DPA agreed!
Exciting times to be a European, privacy-focused web analytics project
— Plausible Analytics (@PlausibleHQ) February 10, 2022
Dans la foulée de la décision autrichienne, le géant américain s'est défendu de toute responsabilité : « Google Analytics aide les commerçants, les gouvernements, les ONG et de nombreuses autres organisations à comprendre à quel point leurs sites et applications fonctionnent pour leurs visiteurs - mais sans identifier des individus ou en les suivant sur le Web. Ce sont ces organisations, et non Google, qui contrôlent les données collectées avec les outils analytics et la manière dont elles sont utilisées », rapporte Le Monde Informatique.
« Les dominos commencent à tomber », analyse Laura Kayali, journaliste tech pour Politico. Sans nouvel accord, surveiller l’intégralité des transferts de données est une tâche titanesque. Faute de cadre légal pour les transferts transatlantiques, cette sanction ne sera sûrement pas la dernière.
The dominos are starting to fall, as the French privacy regulator rules against use of Google Analytics — a few weeks after the Austria authority reached similar conclusions. #EUdataP https://t.co/dfi8IVm5p9
— Laura Kayali (@LauKaya) February 10, 2022
Emma Bougerol
Édité par Élia Ducoulombier
« Une pause pour se respecter et ne pas être considéré comme une terre de conquête. » Petite surprise, mercredi 9 février, lors de la conférence de presse quotidienne du président Andrés Manuel López Obrador (gauche nationaliste). Celui-ci suggère « une pause » dans les relations diplomatiques avec l'Espagne, taclant par la même occasion plusieurs entreprises espagnoles. « Nous voulons avoir de bonnes relations avec tous les gouvernements du monde, mais nous ne voulons pas être volés, tout comme les Espagnols ne veulent être volés d'aucun pays. »
Au centre des critiques de López Obrador : les politiques énergétiques de ses prédécesseurs. Pour lui, il s’agissait « d'une conspiration d'en haut » et d’une « promiscuité économique et politique au sommet des gouvernements du Mexique et de l'Espagne », le tout pendant « trois sixtennats ». D'où un parallèle entre le pillage du temps de la domination espagnole et celui qu’exercent, selon le président, des entreprises espagnoles du secteur de l’énergie. « Et le Mexique en a fait les frais, ils nous ont pillés. » Il continue en faisant un lien entre deux ex-présidents, Felipe Calderon et Vicente Fox, et deux entreprises espagnoles, respectivement Repsol et Iberdrola.
Reconnaître les horreurs de la colonisation du Mexique
Le président mexicain n’en est pas à sa première charge contre l’Espagne. En effet, l’histoire coloniale entre les deux pays -le Mexique a été une colonie espagnole pendant trois siècles- est un thème de discorde et plus particulièrement depuis l’arrivée d’Andrés Manuel López Obrador (AMLO) au pouvoir en 2018. Dès l’année suivante, il envoyait une carte au Pape François et au roi d’Espagne, Felipe VI, leur demandant de s’excuser pour la conquête du Mexique. L’Espagne avait fermement refusé la demande, tout en rappelant sa volonté « d'intensifier les relations d'amitié et de coopération existantes ».
L’année 2021 a été marquée par des commémorations mémorielles exceptionnelles. Le Mexique a célèbré les 700 ans de la fondation de Tenochtitlan, les 500 ans du début de la conquête du Mexique par Hernan Cortés et les 200 ans de l’indépendance du pays. L’occasion de continuer sa politique mémorielle. Ainsi, AMLO a présenté, en août, « ses excuses aux peuples indigènes » au nom de l’État mexicain. Le 27 septembre, jour de l'indépendance mexicaine, aucun haut-dignitaire espagnol ne s’est déplacé pour l’occasion, signe des crispations entre les deux pays. Quelques jours plus tôt, la maire de Mexico, Claudia Sheinbaum, proche alliée du président, avait annoncé le remplacement d’une statue de Christophe Colomb par celle d’une femme indigène.
Des paroles en l’air ?
Pourtant la politique mémorielle du président ne semble pas très populaire. En juillet 2018, le journal espagnol El País -qui possède aussi une édition mexicaine-, publie un sondage sur la question. 62 % des interrogés considèrent que López Obrador fait un « usage politique » de ce chapitre de l'histoire mexicaine et plus de la moitié d’entre eux (55 %) ne juge pas nécessaire les excuses de l’Espagne.
L’annonce de López Obrador reste tout de même à prendre avec des pincettes. Le gouvernement mexicain n'a publié aucun communiqué officiel et, de son côté, l’Espagne assure n’avoir reçu aucune information. Les critiques envers l'Espagne sont monnaie courante. Mais le président n'avait jamais suggéré « un possible coup d'arrêt des relation entre les deux pays », rappelle le pure-player espagnol El Confidencial. La déclaration surprend d’autant plus la diplomatie espagnole que, le 27 janvier, les deux ministres des affaires étrangères se sont rencontrés au Honduras. Le ministre espagnol avait profité de l'occasion pour valider la nomination du nouvel ambassadeur du Mexique en Espagne, après cinq mois d’attente.
Nils Sabin
Édité par Séverine Floch
Depuis 2019, Andrés Manuel López Obrador multiplie les demandes d'excuses à son ex-colonisateur. Cette fois-ci, les entreprises espagnoles du secteur de l'énergie sont la cible de ses critiques.