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La balle est dans le camp de la Commission.

Selon Ozlem Demirel, l’Union européenne aurait au contraire dû agir depuis longtemps en la matière. Si elle reconnaît que “c’est une décision politique”, elle estime qu’il n’est plus acceptable de “privilégier la situation économique et la compétition entre les entreprises“ à “la situation des personnes”. “Instaurer un salaire minimum dans les pays où il n'y en a pas, c’est long” reconnaît Eric Heyer, “mais peut-être que la crise a accéléré ces procédures. Nous sommes sur la bonne voie”. Il revient désormais à la Commission européenne de décider si elle reprend à son compte les propositions du Parlement pour proposer effectivement aux Etats membres de généraliser et d’harmoniser leurs pratiques en matière de salaire minimum.

Camille Bluteau

Pour lutter contre ce fléau, le rapport proposé par Ozlem Demirel, et adopté par une majorité d’eurodéputés, plaide pour l'instauration d'un salaire minimum dans tous les pays de l'Union européenne, à hauteur de 60% du salaire médian de chaque pays. Actuellement, seuls 21 des 27 Etats membres disposent d'une législation nationale qui établit un salaire minimum. Et le montant de ce dernier connaît des variations très significatives d’un pays à l’autre. A titre indicatif, il est de seulement 332 euros en Bulgarie contre près de 2200 euros au Luxembourg.

Ces écarts entretiennent des inégalités entre Etats et favorisent les pratiques de “dumping social“ qui faussent la concurrence intra-européenne. Le faible coût de la main-d'œuvre dans certains pays peut en effet pousser des entreprises à s'y installer, au dépend des pays où le travail est mieux rémunéré. L'économiste Eric Heyer estime qu’il est souhaitable que “les salaires reflètent vraiment les pouvoir d’achat nationaux“.

Alors que la précarité s'accroit sur fond de crise sanitaire, le Parlement a adopté un rapport sur la réduction des inégalités. Sa proposition phare: la généralisation d’un salaire minimum dans toute l’Union européenne.

“On a besoin d’un salaire minimum pour une vie digne !” a soutenu l’eurodéputée allemande Ozlem Demirel (GUE/NGL, gauche antilibérale) lors d'un débat au Parlement européen sur la réduction des inégalités en Europe, le 8 février 2021. En 2020, l’Union européenne s’était fixée comme objectif de sortir 20 millions d’européens de la pauvreté. Sans succès. Les chiffres récemment publiés par Eurostat sont même glaçants. Alors que la pandémie de la Covid 19 continue à secouer le continent, un européen sur cinq, et même un salarié sur 10, souffriraient aujourd'hui de pauvreté.

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Ursula Von Der Leyen, mercredi 10 février, lors du débat sur la stratégie vaccinale européenne à Bruxelles 

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Mario Draghi, l'ancien président de la Banque centrale européenne, est chargé de former un nouveau gouvernement en Italie.

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La santé mentale des jeunes générations est en berne depuis le début de la pandémie.

Des négociations âpres

La finalisation du plan de relance a été l’objet d’échanges âpres entre les différentes institutions européennes et les divers groupes politiques. « Il n’y a pas une phrase qui n’aura pas fait l’objet d’une négociation ardue » selon la rapporteure espagnole Eider Gardiazabal Rubial (S&D, sociaux-démocrates). La question du mode de remboursement du plan reste à trancher, même si le principe du recours à des « ressources propres », perçues directement à l’échelle européenne a été retenu. Il reviendra aux Etats membres de préciser ultérieurement la nature exacte de ces nouvelles taxes communes. En attendant, les fonds du Plan de relance européen vont bientôt pouvoir irriguer l’économie européenne, dès que les Parlements nationaux auront fini de le ratifier. Six, dont celui de la France, l’ont déjà fait.

Grégoire Cherubini

Le respect des valeurs de l’Union comme condition

Le Parlement européen a également réaffirmé le conditionnement des aides au respect des valeurs de l’Union européenne. Aucun fonds européen ne sera alloué à un Etat qui ne respecte pas les principes fondamentaux de la démocratie. « C’est une avancée majeure pour l’Europe, qui protège ses valeurs » pour la députée française Fabienne Keller (Renew, libéraux) et un signe que « le respect de l’état de droit n’est plus négociable ». Consacrées à l’article 2 du traité sur l’Union européenne, ces valeurs concernent aussi bien les libertés individuelles que le fonctionnement de l’Etat de droit. Cette disposition vise particulièrement des Etats comme la Pologne et la Hongrie, dont les dérives autoritaires sont actuellement sous le coup d’une procédure européenne pour infraction à l’Etat de droit, sans que des sanctions concrètes n’aient été prises jusqu’alors. Aux termes du règlement sur le Plan de relance, la Commission sera habilitée à suspendre des crédits aux Etats en cas de défaillance.

Inquiets de la santé mentale des jeunes européens en cette période de pandémie, les eurodéputés ont adopté une résolution appelant la Commission à placer ce problème au cœur de son action.

« Les jeunes vont devoir essuyer les conséquences négatives de cette crise sanitaire ». Ce sont par ces mots que l’eurodéputée allemande Sabine Verheyen (PPE, centre-droit) a interpellé la commissaire européenne en charge de la jeunesse, Mariya Gabriel, avant le vote par les eurodéputés d'une résolution sur la situation des jeunes européens en ces temps de pandémie. Celle-ci, qui a été adoptée mardi 9 février à une très large majorité (592 pour, 42 contre, 57 abstentions), appelle à ériger le bien-être mental de la jeunesse en un axe prioritaire de l'action publique européenne.

Des jeunes générations de plus en plus anxieuses

Le mal-être actuel des jeunes européens est désormais clairement documenté par de nombreux rapports et expertises. Et le constat est sans appel : la pandémie de Covid-19 a amplifié les difficultés psychiques. « On sait bien que les êtres humains, et les jeunes notamment, détestent le stress chronique. Or là, on fait face à beaucoup d'incertitude, à l’incapacité de se projeter dans l'avenir », explique le psychiatre Jean-Baptiste Alexanian, « pendant cette crise, on a assisté à la fermeture des universités, des bars, des lieux de culture, des lieux sportifs, etc. Tout ceci a contribué au développement de troubles psychiques ».

Ce sont pour ces raisons que les eurodéputés ont porté un projet global pour la jeunesse, en y incluant l’éducation, le sport, ou encore la culture. Ils ont notamment demandé à la Commission et aux Etats membres de mobiliser tous les financements possibles pour assurer la modernisation des systèmes éducatifs et pour accompagner les jeunes dans leur intégration sociale et professionnelle. « Nous réclamons notamment que 10 % du plan de relance soit alloué à l’éducation » a souligné l’eurodéputé roumain Victor Negrescu (S&D, sociaux-démocrates). Les bienfaits du sport sur le bien-être mental ont aussi été mis en avant par les députés. Ils ont, en ce sens, préconisé un renforcement du soutien apporté aux ménages à faibles revenus pour permettre à leurs enfants de participer à des activités sportives et à d’autres activités de loisirs.

Un texte symbolique

Par cette résolution, le Parlement envoie un message fort sur le sujet et veut faire réagir la Commission européenne. Sa représentante, Mariya Gabriel, s’est dite disposée à poursuivre la réflexion avec les eurodéputés sur les difficultés spécifiques de la jeunesse et les moyens de les pallier : « Nous devons continuer, non seulement, à identifier les problèmes et les obstacles, mais nous devons aussi mettre en œuvre des solutions ensemble ».

Dimitri Morgado

Mercredi 3 février, le président italien Sergio Mattarella a chargé Mario Draghi, l'ancien président de la Banque centrale européenne, de former un nouveau gouvernement. Un profil de technicien qui, au Parlement européen, fait consensus au-delà des clivages politiques habituels.

Plan de relance, stratégie vaccinale et… Mario Draghi. Si le nom de l’ancien leader de la Banque centrale européenne (BCE) ne figurait pas à l’ordre du jour de la plénière de février du Parlement européen, nul doute qu’il était en revanche dans tous les esprits. 

Il faut dire qu’à Bruxelles, la nomination de Mario Draghi à la tête du conseil des ministres italien est un soulagement : elle met fin à une période d’incertitude ouverte par la démission du second gouvernement Conte le 26 janvier. Alors que l’Italie fait face à une triple crise économique, sanitaire et politique, c’est vers Mario Draghi, reconnu pour sa gestion de la crise de la zone Euro en 2012, que le président Sergio Mattarella s’est tourné. L’ex-gouverneur de la Banque centrale d’Italie, devenu président de la BCE entre 2011 et 2019, s’est attelé à la formation d’un gouvernement technique, qui bénéfie d’ores et déjà d'un large soutien politique, en Italie comme au Parlement européen. 

La satisfaction était ainsi perceptible chez la plupart des eurodéputés réunis en session plénière. Plusieurs ont salué cette nomination comme une bonne nouvelle pour l'Europe. « Avec Mario Draghi, je suis convaincu que l’Italie deviendra un partenaire aussi influent que la France et l’Allemagne dans l’UE », considère ainsi Sandro Gozi (Renew, libéraux) « C’est un europhile qui connaît bien les rouages de l’Europe, mais qui sait qu’il faut la réformer… Je crois qu’il sera un allié crédible d’Emmanuel Macron pour redéfinition de la souveraineté européenne. » Même son de cloche du côté de Salvatore de Meo, eurodéputé italien du PPE (centre droit): «  Il est le meilleur profil pour assurer la stabilité et éviter l’euroscepticisme : ce sont les ingrédients dont nous avons besoin pour la reprise de l’Europe. »

Draghi, un choix de raison pour l’Italie en crise

Si le soutien des groupes politiques europhiles à Mario Draghi n’a rien d’étonnant, le ralliement de forces politiques perçues comme plus eurosceptiques, comme la Liga et le Mouvement 5 Etoiles (M5S), ont de quoi surprendre. Ils peuvent s’expliquer par le profil de technicien de l’ex-patron de la BCE : « Les gouvernements précédents ont été incapables de gérer le plan de relance », estime ainsi Paolo Borchia, eurodéputé italien de la Liga (ID, extrême-droite). « Au niveau européen, Mario Draghi est une personnalité très respectée… Il peut être une solution à la crise en Italie. » Du côté du M5S, pourtant farouche contempteur des élites, le soutien au nouveau Premier ministre italien est aussi justifié par sa compétence et sa relative neutralité politique : « Face à l’impasse politique déclenchée par Matteo Renzi, le président Mattarella ne pouvait faire un meilleur choix », admet ainsi l’eurodéputée italienne Tiziana Beghin (non-inscrite), qui reste cependant prudente : « Je ne crois pas aux miracles en politique […] Sans les idées du M5S, il n’y aura aucun vrai changement en Italie, et les vieux partis politiques pourraient revenir au pouvoir. » 

Il faut dire qu’à la fin de son mandat en 2013, le gouvernement de techniciens de Mario Monti,  pourtant salué au moment de sa formation, avait laissé un souvenir doux-amer aux Italiens… Qui rappelle qu’au « gouvernement par les experts » ne répond pas forcément le succès. 

Laura AYAD

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