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Raser la mairie
Pour son colistier Gérard Anstett, Christian Ball est le « seul qui propose un vrai projet pour la ville, une panacée pour les commerçants schilikois ». Il fait référence à la mesure phare de son programme, la destruction de l’actuel hôtel de ville au profit d’un espace vert avec un parking souterrain, sans augmentation d’impôt. « Les principaux problèmes à Schilick, ce sont le manque de places de stationnement et de verdure et l’inconformité de la mairie vis-à-vis des personnes handicapées, énumère le candidat. Avec ce projet, on règle tous ces problèmes ! » L’idée, empruntée à l’initiative du maire LR de Colmar Gilbert Meyer, est estimée à 15 millions d’euros. La mairie serait relogée dans les locaux de la Maison du Jeune citoyen.
« C’est impossible et démago de dire que ça ne coûtera rien aux Schilikois, décoche Jean-Marie Kutner. Les chiffres sont farfelus, ça va coûter le double et ce n’est pas finançable. » L’ancien maire l’assure, il a mené sa propre enquête auprès d’anciens collègues de l’Eurométropole pour conclure à l’infaisabilité du projet. Raccroché de la politique, il alimente aussi régulièrement sa page Facebook de posts ironiques nommés « Carnets de Ball » qui attaquent le candidat LR. Les vieilles querelles ne meurent jamais...
Caroline Celle
Mode d'emploi : chaque point représente l'élu dont il porte le nom. Le panneau de contrôle en bas à droite permet d'afficher le conseil municipal sortant par groupe politique, par appartenance à la majorité ou à l'opposition, et de colorer chaque élu selon le candidat à l'élection 2020 qu'il soutient.
336 listes dans 194 communes de plus de 1 000 habitants s’affronteront au premier tour des élections municipales le 15 mars prochain dans le Bas-Rhin. Les profils des têtes de liste ont été passés au crible.
Il semble déjà loin le temps où l'élection municipale à Illkirch se résumait au clivage gauche-droite et à la victoire de Jacques Bigot dès le premier tour. Maire depuis 1995, le socialiste, ancien président de l’Eurométropole de Strasbourg, a démissionné de son poste en 2016 pour occuper celui de sénateur du Bas-Rhin. Loi sur le non-cumul des mandats oblige. Claude Froehly, son premier adjoint, a alors repris le flambeau.
L’héritage du sénateur suscite les convoitises à l’aube de ces nouvelles élections. Pas moins de cinq listes se disputent la mairie, contre deux en 2008 et 2014. Candidat à sa réélection, et pour la première fois tête de liste aux municipales, Froehly ne fait néanmoins plus l’unanimité au sein de la majorité. Deux de ses anciens adjoints ont décidé de prendre leur envol et de mener campagne contre lui.
« Une écologie de façade »
Principal reproche ? La bétonisation de la ville. « Les projets immobiliers fleurissent un peu partout à une vitesse inquiétante. Pourquoi dénaturer la ville pour construire des immeubles ? », s’insurge Pascale Gendrault, auparavant chargée de la culture. Même son de cloche chez Richard Hamm, l’ancien adjoint à l’écologie, qui a aussi choisi de mener sa barque. L’ex-membre des Verts, qu’il a quittés en 2016, veut faire de l’environnement la priorité de son mandat et dénonce une écologie de façade chez ses adversaires. « Ils sentent qu’elle a le vent en poupe », lance Hamm.
Si la majorité s’est morcelée, l’opposition n’est pas en reste. Le principal adversaire de Claude Froehly se nomme Thibaud Philipps. À 29 ans, cet adhérent Les Républicains (LR), se lance pour la deuxième fois dans la course à la mairie, avec trois étiquettes cette fois. En 2014, il avait échoué face à Jacques Bigot, récoltant 40,94% des voix. Mais entre temps le jeune homme a reçu un soutien de poids, celui de La République en marche (LREM), ainsi que du Modem.
Triple étiquette
« Thibaud Philipps a la même vision que nous, le même ADN, la même méthodologie. Pourquoi se diviser ? On veut porter un projet d’ouverture avec les citoyens », explique Lamjed Saidani, directeur du comité LREM d’Illkirch-Graffenstaden, pour qui une candidature en son nom n’a jamais été d’actualité. « Le projet passe avant les ambitions personnelles. Présenter deux listes différentes avec les mêmes idées n’aurait eu aucun sens », poursuit le numéro 3 de la liste, qui assure ne vouloir ni tomber dans le sectarisme politique, ni dans les tambouilles politiciennes d’un éventuel second tour.
L’alliance avec le centre n’a pourtant pas plu à tout le monde au sein de la droite illkirchoise. Alfonsa Alfano, Daniel Haessig et Alain Mazeau, conseillers municipaux de l’opposition, ont préféré rejoindre la liste divers droite portée par Rémy Beaujeux, médecin de 59 ans néophyte en politique.
Reste à savoir si Thibaud Philipps profitera de la dynamique LREM à Illkirch. Le parti d’Emmanuel Macron est arrivé en tête au premier tour lors des dernières élections européennes (28,51%), législatives (38,49%) et présidentielles (25,83%). Pâtira-t-il au contraire de l’impopularité croissante du gouvernement ? « Je pense qu’on aura une belle validation des derniers scores. Certes, le contexte médiatique n’est pas favorable, mais il y a une majorité silencieuse d’Illkirchois qui approuvent ce qu’on fait », commente Lamjed Saidani. Avec cette configuration politique inédite, les probabilités d’assister à un second tour de scrutin n’ont jamais été aussi fortes.
Robin Magnier
Claude Froehly n’a pas donné suite à nos demandes d’interview.
Sélestat et ses 20 000 habitants n’avaient plus connu d’élection aussi disputée depuis 2001. Sur la ligne de départ cette année, quatre listes dont celle du maire sortant de droite, Marcel Bauer qui espère rempiler pour un quatrième mandat consécutif. Face à lui, Denis Digel, candidat dissident et ex-adjoint en charge des forêts, a décidé de présenter sa propre liste. De l’autre côté de l’échiquier politique, Caroline Reys, soutenue par Europe Écologie les Verts, retente sa chance après la campagne de 2014. Jean-Marc Kastel-Koffel mène de son côté une liste citoyenne avec l’appui du Parti socialiste, des Insoumis et des gilets jaunes dont il fait partie.
Quatre listes donc, et des candidats qui ne cachent pas leurs inimitiés. Caroline Reys, chef de file de l’opposition depuis six ans au conseil municipal, indique avoir « hésité à se représenter après ces années éprouvantes dues à l’indifférence, au mépris et au sentiment d’extrême supériorité du maire » à son égard. « Je ne suis pas Sélestadienne de souche, je suis une femme, je pense que tout ça joue beaucoup, dit-elle. En 2014, les attaques étaient très basses, il faisait allusion à ma blondeur, c’était extrêmement mesquin. » Ça vole bas et ça mitraille. Marcel Bauer, pas le moins du monde perturbé, répond simplement qu’il a « du mal à travailler avec des gens qui attaquent, ne sont pas constructifs et nous mettent en porte-à-faux. Peu de personnes peuvent travailler avec elle ».
« Le seul projet de M. Digel est de me déloger »
Le maire emblématique de Sélestat a néanmoins vu sa figure contestée, notamment lors de la dernière année écoulée. Sa décision de briguer un nouveau mandat a suscité des interrogations chez ses collègues maires de l’intercommunalité mais sa position s’est surtout trouvée fragilisée avec la candidature de son ex-adjoint Denis Digel, soutenu par Stéphane Klein, leader d’opposition qui a réuni 28% des suffrages il y a cinq ans. Les deux hommes ont justifié leur union par des « valeurs communes » et la volonté d’une nouvelle gouvernance « plus ouverte ».
La candidature de Denis Digel agace le maire sortant : « Le seul projet de M. Digel est de me déloger. 70% de son programme est ce que nous avons déjà mis en route. Ce qui l’anime ce sont les ambitions personnelles. On lui avait proposé un poste de premier adjoint, dont il n’a pas voulu, pour qu’il puisse se faire connaître et faire ses armes car j’estime que six ans ce n’est pas suffisant pour être maire et qu’il avait encore beaucoup à apprendre. » S'il reproche à son adversaire d'être relativement novice, certains habitants le tacle sur sa longévité à la tête de la commune : « Il a déjà 70 ans, il serait peut-être temps de laisser la place à quelqu’un de plus jeune », confie-t-on au PMU du centre-ville. Lors de sa première réunion publique, le 20 février, le dissident de 48 ans avait d’entrée de jeu reproché à la municipalité en place « l'absence de politique de sécurité à Sélestat ». Contacté, M. Digel n’a pas répondu à nos sollicitations.
L’écologie au centre des débats
Le projet Charlemagne, qui prévoit la construction et la rénovation d’équipements sportifs, est aussi au cœur des débats. Coût de l’opération : 20 millions d’euros. Un montant qui crée des interrogations. « C’est un programme lourd mais on s’est appuyé sur les demandes et constats faits par la Région, le Département, ou les associations sportives du centre-ville », justifie le maire. Denis Digel veut quant à lui amender le projet : « On peut réduire la voilure et, avec les économies réalisées, investir pour un vrai stade municipal avec une piste d’athlétisme digne de ce nom », indiquait-il lors de sa première réunion publique. Une position que ne comprend pas le maire actuel puisque son ancien adjoint « fait partie de l’équipe qui a validé le projet et les différentes étapes ». Incompréhension toujours.
Le thème de l’écologie occupe une place importante dans les programmes des candidats. Opportunisme ou réelle volonté liée à l’urgence climatique ? « J’étais déjà soutenu par Les Verts en 2014. On est donc dans la continuité, justifie Caroline Reys. En revanche, jusqu’à très récemment, l’écologie était accessoire, farfelue, pas digne d’intérêt pour la municipalité en place. L’idée d’un écoquartier sur l’ancienne usine Celluloïd, devenue friche, nous l’avions proposée au conseil municipal en 2016 et aucun élu n’avait rebondi sur cette proposition à l’époque. Maintenant ils parlent d’un écoquartier où seront construits du stationnement voire un hotêl. C’est incohérent. »
Le maire se défend pourtant de tout opportunisme : « C’est dans l’ère du temps effectivement mais on a commencé à travailler ce sujet il y a pas mal d’années. On a déjà couvert le toit de l’école Jean-Monnet avec du photovoltaïque ou fait une chaufferie biomasse… » Jean-Marc Kastel-Koffel assure lui que certains colistiers l’ont rejoint car « Caroline Reys n’allait pas assez loin dans l’écologie ». Mais la candidate différencie facilement son programme de celui de la liste citoyenne : « La leur défend des valeurs et des engagements sur le plan national alors que la nôtre est purement locale. » La mauvaise situation socio-économique du centre-ville et sa résolution seront l’un des grands enjeux du maire élu.
Victor Boutonnat
Dans la quatrième ville du Bas-Rhin, où cinq listes s’affrontent, les élections municipales s’annoncent comme les plus disputées depuis près de vingt ans.
Ball fait cavalier seul
La démission collective provoque des élections anticipées. Certains démissionnaires ont choisi de rejoindre la liste de Christian Ball et de se mettre en compétition avec leur ancienne tête de liste Jean-Marie Kutner, comme Ahmed Fares ou Fabien Bresson. Odile Barreault, elle, décide de ne pas participer à ce qu’elle qualifie de « guerre d’egos » et ne rejoint aucune liste. D’autres sont des fidèles de Christian Ball, comme Françoise Klein ou Pierre Muller.
Largement en tête au premier tour, l’équipe de Christian Ball doit donc laisser la mairie à l’écologiste Danielle Dambach, alliée au PS et au PCF, au second tour. La gauche schilikoise, plus encline à s'unir que la droite, l'emporte.
En juin 2018, peu après les élections anticipées, Ahmed Fares, candidat très populaire dans les bureaux de vote, apprend « par un mail transmis à la mairie, sans plus d’explications » qu’il est exclu de la liste de Ball. Considéré comme « trop clivant » par ce dernier, il a aujourd’hui rejoint la liste de la candidate LREM Hélène Hollederer.
Exclu en même temps que lui, Fabien Bresson a été miraculeusement repêché pour les municipales de 2020. Après une période de désaccord politique, il a retrouvé Christian Ball avec un objectif commun : « Danielle Dambach se laisse avoir par les promoteurs, et il faut gagner la mairie pour arrêter la bétonisation de la ville. »
Le maire sortant, Marcel Bauer, voit sa réélection contestée par l'opposition et son ancien adjoint.
Quinzième réunion publique depuis octobre pour Christian Ball, le candidat Les Républicains aux municipales de Schiltigheim. Fin février, à la Maison des sociétés, il détaille son projet, en concurrence avec cinq autres listes. L’orateur aguerri parle avec les mains, multiplie les traits d’humour et détache ses mots pour appuyer ses idées « qui n’opposent pas les Schilikois mais les rassemblent ». Avec sa promesse de créer un parking souterrain dans le centre-ville et une nouvelle piste cyclable, Christian Ball se fait fort de s’adresser à tous, contestant l’écologie « punitive » de sa rivale, Danielle Dambach.
La candidate des Verts est maire de la ville depuis seulement deux ans. Elle a gagné les élections partielles face à Christian Ball en avril 2018, avec 54, 5 % des voix, en pleine débâcle politique.
Un mariage forcé
Schiltigheim, jusqu’alors dirigée par Jean-Marie Kutner, affilié à l’UDI, a connu la démission d’un tiers de son conseil municipal en janvier 2018. Les 14 élus ont emboîté le pas à Christian Ball, alors premier adjoint de Jean-Marie Kutner. Il reprochait au maire son autocratie : « L’ambiance du conseil était exécrable, Kutner voulait tout gérer seul, soutient-il. Je n’avais même pas le droit d’ouvrir les courriers de la mairie à sa place ! »
La mésentente entre les deux hommes aurait germé dès 2014 au sein de la droite schilikoise. Christian Ball est alors investi par l’UMP, sous l’aile du député de la 3e circonscription du Bas-Rhin, incluant Schiltigheim, André Schneider. Pour la droite, l’enjeu est de taille, il faut récupérer la mairie après vingt-cinq ans de gauche. « L’UMP nous pressait de faire une alliance avec Kutner au second tour et Christian ne voulait pas, se souvient le député honoraire. J’ai dû le menacer de lui retirer l’investiture. Je connaissais le mauvais caractère de Jean-Marie Kutner mais j’ai prévenu Christian : ‟En politique, il faut savoir avaler des couleuvres”. »
Trois ans plus tard, le mariage forcé se solde par un divorce. Le député bas-rhinois André Schneider ne pardonne pas ce qu’il qualifie de « putsch » et de « trahison », après avoir remué ciel et terre pendant « des décennies pour ramener la droite à Schiltigheim ».