Jacques Brunel, nouveau sélectionneur de l'équipe de France de rugby, a parié sa moustache dans un entretien accordé à nos confrères de L'Equipe. Mais seulement si le XV de France réussit l'exploit du Grand Chelem au tournoi des Six Nations qui débute ce week-end. Un pari peu risqué.
« Si on fait le Grand Chelem, je rase ma moustache ! » Jacques Brunel, nouveau sélectionneur de l’équipe de France de rugby, dit viser le plus haut possible dans ce tournoi des Six Nations. La marche semble pourtant bien haute ! Avec des absents, un effectif monté en 15 jours et beaucoup de concurrence en face, le rêve de voir Jacques Brunel raser sa moustache, intacte depuis 1978, s’il réalise l’exploit du Grand Chelem, pourrait tomber à l’eau dès samedi 3 février, face aux Irlandais.
Des grands absents
Qu’ils soient blessés temporairement, pour tout le tournoi, ou suspendus, il faudra faire sans certains cadres pour cette édition 2018. À commencer par l’un des plus importants, en tout cas aux yeux de son sélectionneur : Morgan Parra. Sélectionné en grande pompe le 17 janvier, jour de la divulgation du groupe, le Clermontois grille Maxime Machenaud, son actuel remplaçant, et Antoine Dupont ! Trois jours plus tard, Parra se blesse au genou gauche… Bilan : trois semaines d’absence.
Mathieu Bastareaud lui n’est pas blessé, mais suspendu. Contre Trévise, le centre international toulonnais a insulté de « putain de pédé » son adversaire. À cause de cette injure homophobe, il loupera le match d’ouverture du tournoi des Six Nations face à l’Irlande, l’un des plus importants.
Les Clermontois Wesley Fofana et Camille Lopez vont manquer terriblement au XV de France. L’un pour une hernie discale, l’autre pour une fracture de la malléole, savaient depuis l’année dernière que le tournoi se ferait sans eux. Mais Jacques Brunel n’a pas encore déniché un aussi bon ouvreur que le 10 clermontois. Ni un centre comme Fofana qui arrive à trouver des espaces dans la ligne adverse.
Les paris risqués de Brunel
Pour pallier cette hécatombe, Jacques Brunel aligne face à l’Irlande un XV de France de 26 ans et 16 sélections de moyenne… Le sélectionneur a fait le choix de la jeunesse. Dans le groupe emmené par l’ancien entraineur de Bordeaux-Bègles, six joueurs n’ont jamais porté le maillot tricolore. Dont Matthieu Jalibert, 19 ans, 15 matchs de Top 14 et demi d’ouverture face à l’Irlande. « À partir du moment où Matthieu est là, on pense qu’il est en mesure d’être à ce niveau, explique le sélectionneur dans une interview à Rugbyrama. Il n’y a aucune raison de ne pas le titulariser. Il est capable d’assumer ce rôle. Il est bien rentré dans ce groupe, il a ses repaires. On est sûr qu’il va s’en sortir. »
Une confiance tout aussi ferme pour Kévin Gourdon, aligné troisième ligne centre. Un poste que le joueur de La Rochelle affectionne tout particulièrement… sauf qu’en club et sous l’ère Novès, il est placé sur l’aile. S’il reste au centre pendant tout le tournoi, il aura la lourde tâche de faire oublier Louis Picamoles, qui, malgré ses 68 sélections, n’a pas été choisi par Brunel.
Un mental à reconstruire
Deux semaines, c’est le temps accordé à Jacques Brunel pour faire oublier une année 2017 catastrophique. Après une troisième place miraculeusement gagnée au dernier tournoi, la France a vécu une année cauchemardesque : trois défaites en Afrique du Sud, une autre contre la Nouvelle-Zélande et face les Springboks en novembre, puis un pathétique nul contre le Japon (23-23). De quoi laisser des traces.
Avec un nouveau staff, et un vent de fraicheur amené par les jeunes, une victoire pourrait faire beaucoup de bien à la confiance. Mais force est de constater que depuis Philippe Saint-André (2015), aucun entraineur n’a réussi à trouver un effectif qui dure dans ce XV de France. Et le manque de cohésion se fait sentir.
Du niveau en face
Mais le plus gros problème des Français est peut-être le niveau des équipes à affronter. Le XV de France ne fait même pas figure d’outsider pour ce tournoi. Et pour cause ! L’Écosse reste sur une fin d’année magique : une victoire en Australie, juste après avoir frôlé l’exploit en Nouvelle-Zélande. Encore meilleure, l’Irlande a balayé l’Afrique du Sud (38-3), battu les Fidji (23-20) et l’Argentine (28-19) en novembre. C’est l’unique équipe du tournoi à ne pas souffrir de trop d’absents dans ses rangs. Mais ce n’est rien comparé à l’Angleterre qui n’a perdu qu’un seul match en deux ans (en Irlande lors du précédent tournoi) ! Le XV de la Rose est ultra-favori pour réaliser un triplé inédit dans l’histoire du VI Nations.
Enfin s’il n’y avait que ça, le calendrier ne joue pas en faveur des Français. Gros premier match samedi 3 février face à l’Irlande. Si tout se passe bien à domicile, il faudra aller gagner à Édimbourg la semaine d’après. Puis une rencontre plus abordable (contre l’Italie) avant de recevoir les Anglais début mars. La moustache de Brunel a de quoi voir venir.
Simon CARDONA
Photo : Hirobi (Pixabay)