Un quadragénaire comparaissait ce jeudi 17 septembre au tribunal judiciaire de Strasbourg pour tentative de vol. Une ligne de plus dans un casier judiciaire bien rempli.
Le tribunal de grande instance de Strasbourg. © Claire Birague
"Monsieur, vous avez déjà 31 mentions sur votre casier judiciaire." La liste est si longue depuis la première condamnation de Franck en 1993, que le tribunal n’énumère que les plus récentes : vol avec violence, vol dans un local d’habitation, détention et usage de stupéfiants, encore un vol… La dernière date de 2019. Franck est accusé d’avoir récidivé deux fois le 21 août et le 15 septembre 2020 à Mundolsheim : tentative de vol d’une tirelire dans un bureau de tabac et tentative de vol dans la maison d’une femme âgée de 82 ans.
"Monsieur, monsieur, il était dans ma chambre, aidez-moi"
Ce 15 septembre dans la petite ville au nord de Strasbourg, une vieille dame est étonnée de voir sa porte d’entrée ouverte. Christiane H. dit avoir surpris le quadragénaire dans sa chambre. Peu de temps après, un voisin la trouve alors dans la rue, en état de choc selon le procureur. "Monsieur, monsieur, il était dans ma chambre, aidez-moi", appelle à l’aide Christiane, désignant Franck alors sorti de la maison. Le voisin décide d’intervenir. Le prévenu se serait alors confondu en excuses, pleurant, avant de poursuivre son chemin. Le voisin le suit en appelant les gendarmes.
Y-a-t-il eu vol ? "Je voulais juste demander mon chemin. Je m’étais trompé de bus et je voulais rejoindre la rue principale pour aller à Emmaüs." L’octogénaire assure de son côté : "Je suis tombée nez à nez avec un homme dans ma chambre qui m’a demandé où se trouvait la rue des Lilas".
Une réinsertion obscurcie
Pour le procureur, qui requiert six mois de prison ferme avec maintien en détention, il n’y a pas de doute : "Monsieur était alcoolisé, il ne nie pas mais dit qu’il ne s’en souvient pas. Il a des problèmes d’argent et a été interrompu dans sa tentative de vol". C’est un coup dur pour Franck, qui se prend la tête dans les mains. Un CDD en poche au sein d'une boutique de réparation de vélo, ce récidiviste semblait pourtant sur la voie de la réinsertion. Malgré 800 euros par mois, il affirme "pouvoir s’en sortir". "Il a réussi à avoir un travail et satisfaire son employeur", renchérit son avocate. Et d’ajouter : "Pourquoi ne pas voir le dossier sous un autre prisme ?" Pour elle, les faits sont là : aucun objet déplacé ou dérobé, aucun tiroir ouvert. Elle demande au tribunal de ne pas caractériser les faits comme une tentative de vol et de ne pas les qualifier à partir d’éléments subjectifs. Elle plaide la relaxe.
Dans le box des prévenus, l’homme aux cheveux grisonnants plaqués en arrière se défend comme il peut. "Si j’avais voulu voler quelque chose, je serais parti en courant, là je suis parti en marchant normalement." Le ton suppliant, il assure vouloir donner un autre sens à sa vie depuis la récente mort de son père due à la Covid-19. "Je suis conscient de ce qu’il peut m’arriver si je fais n’importe quoi d’autre." Cela ne suffit pas pour convaincre le juge de son innocence. Il se voit contraint de payer 400 euros de dommages et intérêts pour préjudice morale à la vieille dame et 50 euros au buraliste. Et écope surtout d’une peine de prison de 4 mois ferme avant d’être renvoyé dans sa cellule, tête basse.
Claire Birague