Depuis début septembre, les manifestations dans les rues de Martinique ne se calment pas. Les tensions sont telles que les autorités ont instauré à Fort-de-France un couvre-feu depuis le 18 septembre. Le sujet du malaise : la vie toujours plus chère en Outre-mer.
Des Martiniquais ont manifesté contre le coût élevé de la vie devant un supermarché de la commune du François, le 21 septembre 2024. Photo : Flickr, Juanita
Dans le secteur de l’alimentation, le fossé est immense. En moyenne, le panier de courses alimentaires des Martiniquais est 40 % plus cher que le panier en métropole. Webex a passé à la loupe quatre produits du quotidien dans les Leclerc de Strasbourg Esplanade et du Lamentin.
Le prix des pâtes, du café et du lait est en moyenne 30 % plus élevé en Martinique. Au rayon viande, les coûts explosent. Pour deux steaks hachés, les consommateurs devront débourser 10 euros de plus. Et le différentiel ne se creuse pas seulement dans le secteur de l’alimentation.
Il y a quinze ans, la différence de prix entre la métropole et la Martinique était de 10 % selon l’Insee. Aujourd’hui, il faut compter 15 %.
Trois pistes peuvent éclairer cette augmentation.
Une économie dépendante de l’importation. La Martinique importe 87 % de ses ressources alimentaires. Pour que les produits arrivent sur l’île, il faut compter une quinzaine d’intermédiaires quand la distribution en métropole n’en fait intervenir que 5. À cela s’ajoute le coût du transport, par avion ou par bateau, souvent réfrigéré.
Une concurrence très faible. En Martinique comme dans les autres territoires d’Outre-mer, la distribution est gérée par un nombre restreint d’acteurs. Comme ils sont peu de concurrents, les prix ne baissent pas.
L’octroi de mer, l’impôt qui pèse lourd. Depuis 1670, cette taxe s’applique aux importations en Guadeloupe, Martinique, Guyane, à Mayotte et à La Réunion. Chaque produit a sa propre taxe et elle monte très vite, parfois jusqu’à 50 % du prix. Elle sert en théorie à financer les collectivités locales. Aujourd’hui elles sont, comme l’État, au cœur des critiques des manifestants.
Face à l’augmentation des prix, le niveau de vie des Martiniquais ne suit pas. D’après l’Insee, 27 % de la population martiniquaise vit sous le seuil de pauvreté, contre 14,5 % dans l’Hexagone. Le salaire moyen par an d’un Martiniquais est en moyenne 3 000 euros plus bas que celui d’un métropolitain. Ces inégalités ne font qu’aggraver les conflits entre l’État et les habitants de l’île antillaise.
Louise Pointin
Édité par Lucie Campoy