Réclamé depuis plus de dix ans par les habitants du Port-du-Rhin à Strasbourg, un marché devrait s’installer au printemps sur la place de l’Hippodrome. Un projet pour répondre au manque de commerces et créer du lien alors que le quartier connaît une croissance importante de sa population.
Une petite dizaine de personnes, emmitouflées dans leurs manteaux et bonnets toujours vissés sur la tête, attendent à l’intérieur du centre socioculturel du quartier du Port-du-Rhin à Strasbourg ce mardi midi de février. On se tutoie, on s’embrasse, on s’enquiert de la santé du chien… Dans de joyeux bavardages, ces habitants ont bravé le froid pour venir chercher un couscous qui servira à financer le séjour à Gérardmer de plusieurs enfants du quartier. A l’extérieur, dans ce quartier prioritaire, les passants se comptent sur les doigts de la main. Au milieu des blocs brutalistes de résidences modernes, seules deux supérettes permettent de s’alimenter. Alors pour répondre à la demande faite par le conseil citoyen du quartier, la Ville de Strasbourg lance un projet de "marché hybride" qui devrait prendre forme au printemps. "Ce sera à la fois un marché alimentaire et un lieu d’animations", explique Pierre Ozenne, adjoint à la maire de Strasbourg en charge des marchés.
Un marché d’après-midi
Au cœur du Port-du-Rhin, c’est place de l’Hippodrome que s'installerait une dizaine d’étals, de 15 à 19 heures tous les jeudis. "Ce sont des horaires intéressants parce que certains rentrent du travail", argue Gérard Schann, trésorier du centre socioculturel Au-delà des ponts, qui pointe aussi la proximité avec l’arrêt de tramway "Port du Rhin". "L'horaire est adapté à la sortie des classes", abonde Annie Broglio, présidente du centre, alors que la place donne sur le grillage de l’école primaire du Rhin. A l’occasion d’un point presse ce mardi 4 février, la Ville de Strasbourg appelle près de 1 000 commerçants à candidater d’ici le 17 février pour obtenir une place d’une durée d’un an. Le centre socioculturel a déjà prévu de s’emparer de l’occasion pour “sensibiliser les habitants à une alimentation saine”. Et pourquoi pas prolonger l’ouverture pour les animations avec des foodtrucks jusqu’à 21h, envisage de son côté Pierre Ozenne.
"On n’a même pas de boulangerie"
"On attendait ça depuis longtemps", s’enthousiasme Monia Hammerchmidt, 44 ans, qui habite le quartier depuis sa naissance. "C’est ce que la Ville a trouvé pour créer un marché tout court", estime, ironique, Céline Hentz qui habite le quartier depuis 2021. "On manque de produits frais. Pour vous dire on n’a même pas de boulangerie", déplore la trentenaire. Malgré la présence d’un carrefour city en face de la place de l’Hippodrome, elle se dit contrainte d’aller faire ses courses à Kehl, en Allemagne, le week-end ou de faire des détours en rentrant de son travail la semaine. Des habitudes partagées par l’ensemble des habitants du quartier estime Anne-Véronique Auzet, membre du Conseil citoyen du Port-du-Rhin.
Un quartier en expansion
Cette habitante l’a vu évoluer depuis les années 1960, période à laquelle ses grands-parents avaient acheté dans le secteur. "Avant, il y avait des épiceries, deux ou trois boulangeries…", énumère cette ancienne professeur d’université. Mais le quartier s’est beaucoup développé en une dizaine d’années. Depuis 2017 et la construction d’une station du tram D, qui relie Strasbourg à Kehl, en Allemagne, ce quartier historiquement populaire a vu les projets immobiliers fleurir. "On est passé de 1 500 au début du siècle à 3 000 habitants", estime Gérard Schann.
Ce ne sera pas le seul marché hybride à Strasbourg. Le quartier de Cronenbourg devrait voir émerger le sien le 21 mars et Koenigshoffen en septembre prochain.
Adèle Pétret
Edité par Abel Berthomier