Dans un rapport inédit, la Cour des comptes souligne un coût de l’inaction climatique « nettement plus élevé́ que celui d’une transition écologique ». Face à des politiques publiques climatiques encore trop timides, la juridiction financière donne des chiffres clés pour penser la transition.
Dans son rapport, la Cour des comptes "appelle une action urgente pour limiter les impacts" du changement climatique. ©Pexels
Mieux vaut prévenir que guérir. L’adage s’applique parfaitement aux résultats de l’étude de la Cour des comptes sur le coût de l’inaction climatique. Dans rapport inédit, paru mardi 16 septembre, l’institution appelle à « une action urgente » de la France, au risque de payer la facture de l’immobilisme dans quelques années. Le dérèglement climatique, induit par les activités humaines, a des conséquences sur les populations et aura des effets directs sur l’économie. Baisse des émissions de gaz à effet de serre, coût de l’inaction, montant des investissements…Webex fait le point sur ce rapport en trois chiffres clés.
56% de l’empreinte carbone des Français provient des importations
Dans son rapport, la Cour des comptes souligne la nécessité de diminuer les émissions de gaz à effet de serre (Ges). La France devra en priorité faire des efforts sur les importations, qui représentent 56% de l’empreinte carbone des Français. Ce taux, « bien supérieur à la moyenne des pays de l’Union européenne », selon le rapport, s’explique en partie par la désindustrialisation de l’Hexagone.
Le tableau n’est cependant pas totalement noir. Entre 2019 et 2023, la France a respecté le plafond d’émissions de Ges fixé par la stratégie nationale bas carbone. Cette dynamique a continué en 2024 avec une baisse de 1,8% des émissions brutes de Ges par rapport à l’année 2023.
Sans occulter ces avancées, la Cour des comptes nuance ce que le gouvernement présente comme un « bilan très positif ». Le rapport met en exergue l’écart entre la baisse actuelle des émissions de gaz à effet de serre et les objectifs fixés par la Stratégie nationale bas-carbone. À l’heure actuelle, la France a réduit de 30% ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. Dans 5 ans, pour répondre à la stratégie nationale, il faudrait réduire de 55% ces Ges.
11,4 points : la baisse du PIB en 2050 en cas d’inaction
Si le constat n’est pas une grande surprise, le chiffre permet de mieux visualiser, sur le temps long, les bénéfices liés aux investissements dans la transition climatique. Selon un scénario réalisé par la Banque de France, la non prise en charge de la transition se traduirait par une baisse de 11,4 points du PIB en 2050, contre 7 points dans le cas de la mise en place des politiques de transition.
Ces chiffres s’expliquent par le coût des dommages écologiques. À titre d’exemple, le cyclone Chido qui a dévasté Mayotte en 2024 a entraîné un coût d’environ 700 millions d’euros d’indemnisation par le régime des catastrophes naturelles, selon la caisse centrale de réassurance. De son côté, le réseau France Assureurs estime à 4,7 milliards le coût annuel moyen des sinistres climatiques sur la période 2020 à 2050 contre 2,5 milliards entre 1989 et 2019.
200 milliards d’euros : le montant des investissements pour faire face au changement climatique
De 2022 à 2024, de 100 à 110 milliards d’euros par an ont été investis dans la transition écologique en France. Si les montants semblent très élevés, la Cour des comptes estime que les efforts doivent doubler dès à présent pour financer tous les volets de la transition écologique, à l’instar de la préservation de la biodiversité et des ressources hydriques ou de la lutte contre les pollutions.
Alors que la dette est dans tous les esprits et dicte les choix gouvernementaux, l’objectif fixé par le rapport semble assez éloigné des réalités budgétaires. Mais pour parvenir à y répondre, le rapport insiste sur la nécessaire répartition des efforts. Pour l’instant, selon une étude d’I4CE publiée en 2024, 78% des investissements bas-carbone étaient assurés par les entreprises et les ménages, l’État a seulement pris part à 22% de ces investissements. Le rapport préconise donc d’évaluer correctement les capacités d’investissement des différents acteurs, et particulièrement ceux des ménages les plus modestes afin de mettre en place une « transition juste ».
Anouk Seveno
Edité par Eva Lelièvre