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18/09/25
18:26

« Si je suis dans la rue aujourd'hui, c'est pour obtenir du concret »

La grève nationale s’est reflétée avec intensité au niveau local. Plus de 15 000 personnes se sont mobilisées à Strasbourg selon les organisateurs, 5 000 selon la police. Des premières lueurs au ciel chargé de lacrymogènes : récits d’une journée de ras-le-bol général dans les rues, entre timides rassemblements matinaux et manifestation massive de l’après-midi.

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15 000 à 20 000 personnes ont manifesté à Strasbourg ce mercredi 18 septembre. © Titouan Catel Daronnat

Blindés Centaures, gaz lacrymogènes, peu de blocages dans la matinée : rien ne laissait présager la mobilisation d’ampleur à Strasbourg mercredi 18 septembre, où plus de 15 000 personnes se sont mobilisées, selon les organisateurs, 5 000 selon la police.

Même constat au niveau national : la journée du 18 septembre a davantage rassemblé que celle du 10. Malgré un début de journée en douceur, entre rassemblements épars et préparatifs pour l’après-midi, plusieurs milliers de manifestants ont arpenté les rues du centre-ville pour faire entendre leurs revendications. Retour sur une journée de mobilisation tous azimuts.

A l’aube du 18 septembre, à Strasbourg, les forces de l’ordre surnombrent les manifestants. Partout, en début de matinée, le dispositif déployé - CRS, véhicules blindés de gendarmerie, motards, BAC (brigade anti-criminalité) - dissuade les timides velléités de protestations qui auraient pu naître.

Place d’Haguenau à 6h30, plus de seize camions de police font face à une dizaine de manifestants du mouvement « Indignons-nous ». Aux portes du lycée Kléber, les policiers surveillent l’entrée sans vague des lycéens, déjà ébranlés par le retour de bâton subi le 10 septembre. Même tour de force aux lycées Fustel-de-Coulanges et Marie Curie. Police partout, manifestants nulle part : à l’aurore, les moyens conséquents déployés traquent des protestataires fantômes.

Coup de poignard

En guise d’hors d'œuvre, c’est un autre mouvement qui, dès 9 heures, tente de se faire entendre en marge de la grande coalition syndicale qui doit s’ébrouer dans l’après-midi. Gilets jaunes floqués « pharmaciens menacés, santé en danger », verbe haut mais très poli, le mouvement des pharmaciens et pharmaciennes fait du bruit devant l’entrée de la cité administrative Gaujot. « Pendant le Covid-19, on était sollicités tout le temps, et là, on nous poignarde dans le dos », s’insurge Chantal Windstein, 65 ans, de La Petite-Pierre, au nord de Saverne. 

Lire aussi : “Aucune ne restera indemne” : la colère des pharmaciens du Bas-Rhin

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Les pharmaciens se sont regroupés ce jeudi 18 septembre au matin devant la cité administrative. © Maud Karst

La pilule difficile à avaler est sous forme de décret publié ce mois-ci. Une baisse de la réduction de 40 % à 30 % (puis 20 % en 2027), des remises pour acheter les médicaments génériques auprès des labos pharmaceutiques. Ils l’assurent : dans près de 6 000 officines, notamment en zone rurale, « le seul praticien disponible est bien souvent le pharmacien, à défaut de médecin », déplore Johanny Scheffler, préparatrice de 29 ans.

Les pharmaciens convergent ensuite dans le calme, place Broglie. Une minute de silence rend hommage à la disparition d’une consoeur cette semaine. Les syndicats pharmaciens sont entendus par la préfecture, et attendent désormais des « actions concrètes ».

«  Répression »

« Plus de fric, pour les facs et les lycées. Pas pour les patrons, ni l’armée ». A deux pas, à l’université, certains préparatifs pour la manifestation de cet après-midi se déroulent devant l’institut Le Bel. Sur des banderoles, des lettres sont peintes en rouge, noir, et jaune par quelques dizaines d’universitaires.

Protestations contre les coupes budgétaires et la retraite à 64 ans, appel à davantage de justice fiscale et de moyens pour les services publics : les jeunes aussi soutiennent les revendications. Dieynaba, en L1 de sciences sociales, vient d’arriver à la fac et doit déjà lutter contre des problèmes financiers. « Je vais devoir prendre un job étudiant au lieu de me concentrer sur mes études », regrette l’étudiante.

Lire aussi : Dans la rue ou à la fac, Lucas continue la lutte

Drapeaux rouges de la FSE hissés dans les airs, vers midi, une AG réunit une centaine d’étudiants devant la présidence de l’université. Différentes organisations de lutte, parmi lesquelles Force ouvrière, la Fédération syndicale étudiante (FSE), ou encore l’Association éducation solidarité, sont présentes.

« On manifeste contre l’Uni (syndicat étudiant proche de l’extrême droite, ndlr) et contre la répression visant 5 étudiants, dont 4 de la FSE convoqués en commission de discipline. Tout ça parce qu’ils ont participé à des manifestations contre l’Uni à la suite de propos racistes et sexistes contre eux », indique Myriam au micro, étudiante et militante à la FSE.

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Plusieurs dizaines d’étudiants ont manifesté à l’intérieur du Patio. © Carol Burel

Plusieurs élus sont aussi là pour soutenir la mobilisation des étudiants incriminés. Les étudiants musiciens également se mettent au diapason revendicatif et constituent un rassemblement devant le Conservatoire de musique. Puis, munis de leurs instruments, ils rejoignent l’université pour protester contre les plans d’austérités dans le domaine de la culture. Des lycéens sont aussi de la partie.

Comme Alexis, 16 ans, en première, et engagé dans le collectif de militants Lycéen·nes autonomes de Strasbourg contre l’autorité répressive (Lascar). « Je m’informe beaucoup sur ce qui se passe dans le monde. Quand on est au courant, je trouve ça évident de s’engager ». Sa colère est protéiforme : contre « la politique d’austérité économique » du gouvernement Bayrou, « le génocide en cours à Gaza » ou encore les « mauvaises conditions d’études ». Une révolte qui se coalise avec d’autres slogans, d’autres drapeaux, d’autres cris de colère qui vont converger vers la manifestation, qui peine encore à mobiliser.

« Jeunes et révolutionnaires »

Pancartes à la main, le cortège étudiant parcourt l’université au rythme des slogans criés et répétés avec colère, tentant de rameuter des troupes. Peu après 13h, la place de la République est encore remplie de touristes, vide de manifestants, et surveillée par la police.

Peu à peu, les organisations syndicales s’installent sur place. Sous le soleil, l’activisme est bon enfant, et prend des allures de battle musicale : les enceintes de la CGT diffusent Burnin' and Lootin' de Bob Marley, alors que l’air vibre de punk chez Sud solidaire. « Une intersyndicale comme ça, on n’a jamais vu ça, sauf pour les retraites », s’exclame Elisabeth Willer, déléguée CFTC de la société Biogroup, chasuble bleu sur les épaules et grand sourire sur le visage.

« On est jeunes, déter et révolutionnaires » scandent les étudiants : les visages sont très jeunes dans le cortège. Olivier, étudiant, espère une mobilisation similaire aux Gilets jaunes. « Si je suis dans la rue aujourd'hui, c'est pour obtenir du concret ». 14h30 : c’est le top départ de la manifestation.

En tête, les représentants de l'Intersyndicale sont suivis de près par des vagues d’étudiants. Des camionnettes aux couleurs des syndicats côtoient des poussettes, alors que des militants cadencent la marche, portée par les mégaphones. Des milliers de manifestants sont finalement au rendez-vous.

Retraités, enfants, syndicalistes, universitaires… La foule dense et bigarrée souligne l’étendue du ras-le-bol, crie son désir de lutte contre les inégalités, martèle son opposition à une seule politique articulée autour de l’austérité comme unique horizon.

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Des tensions ont émdaillés la fin du cortège. Les forces de l’ordre ont gazé les manifestants. © Mahault de Fontainieu

Sous l’impulsion de chants et au milieu des pancartes rivalisant d’originalité, les manifestants arrivent place du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, lieu de fin du parcours prévu. Alors que les syndicalistes signent la fin d’une sage mobilisation, d’autres prennent le relais et s’élancent vers la cité administrative.

« Grève, blocage, manif sauvage » : le slogan de ces nouveaux visages marque le début de la manifestation, spontanée, rebelle, énergique. Les gaz lacrymogènes ne tardent pas à pleuvoir, après la première sommation, et envahissent d’un brouillard blanc les rues qui longent l’université. « J’ai cru que j’allais perdre la vue », relate une manifestante, les yeux remplis de larmes.

Elle n’est pas la seule à être éprouvée : certains sont à terre la tête entre les mains, d’autres tentent quelques soins à l’aide de sérum physiologique. S’ensuit un jeu du chat et de la souris dans le quartier de la Krutenau, entre manifestants et forces de l’ordre, ces dernières n’hésitant pas à gazer dans des rues exiguës.

En tout, cinq personnes ont été interpellées. Il est 18h, sous un ciel azur qui n’est plus parsemé de traînées blanches, quelques sirènes résonnent encore dans les rues de la capitale alsacienne.

Eva Lelièvre, avec Esther Dabert, Carol Burel, Maud Karst, William Jean,
Mahault de Fontainieu et Titouan Catel--Daronnat

Edité par Axel Guillou

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