Plus de quinze mille Kurdes ont défilé samedi à Strasbourg pour dénoncer la situation des Kurdes syriens et turcs, et exiger la libération du leader du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Présent dans le cortège, Faik Yagizay, représentant européen du Parti démocrate du peuple (HDP), un parti de gauche pro-kurde, livre son point de vue sur les événements en cours en Turquie et en Syrie.
Affrontements entre soldats turcs et manifestants kurdes près du poste-frontière de Mursitpinar, le 4 octobre 2014 (AFP / Bulent Kilic)
En lien permanent avec Ankara, le représentant du HDP en poste à Strasbourg s'inquiète aussi de la situation des Kurdes en Turquie. "En 2012, Recepp Tayipp Erdogan avait annoncé un paquet démocratique pour accroître le droit des Kurdes. Il prévoyait notamment d'autoriser les cours de kurde dans les établissements scolaires privés, mais ce n'était que du maquillage", poursuit-il.
Le 7 juin 2015, l'AKP, le parti du président conservateur, avait perdu la majorité absolue qu'il détenait depuis treize ans lors de premières élections législatives. A l'époque, le HDP avait créé la surprise en remportant plus de 13% des suffrages. Le président turc avait alors vu ses rêves de sultanat disparaître. Pas décidé à laisser les kurdes lui prendre sa majorité, il avait convoqué de nouvelles élections. En novembre, il a repris les mains du Parlement turc et réaffirmé son projet : modifier la Constitution et passer du régime parlementaire actuel à un régime présidentiel.
Un policier répond à des tirs dans le centre de Diyarbakir, le 11 septembre 2015 (AFP/ ILYAS AKENGIN )
Le 28 juillet 2015, Erdogan a interrompu le processus de paix avec les Kurdes et durcit la répression contre ce peuple. Au sud-est de la Turquie, depuis quelques mois, certaines villes sont en état de guerre. Perquisitions, tranchées et échanges de tirs : les affrontements entre les militaires et les militants du PKK sont quotidiens. A Diyarbakir, capitale des régions kurdes de Turquie, cinquante à soixante-dix mille personnes ont quitté la ville depuis le début des combats. Les civils qui n'ont pas pu fuir se retrouvent au milieu des combats, qui auraient fait près trois cents victimes, selon le maire de la ville. "Erdogan renforce les tensions entre Kurdes et Turcs, et la cohabitation devient presque impossible", conclut Faik Yagizay.
Arte Journal a réalisé un reportage dans la ville de Diyarbakir.
Aurélie Sipos