Ils seront nombreux à rejoindre la mobilisation intersyndicale du jeudi 18 septembre en France. Et chose rare : les établissements privés en feront partie. Derrière, se cachent un appel à une visibilisation de leur travail et à un meilleur dialogue.
Les syndicats ont appelé à une mobilisation générale dans tout l’hexagone ce jeudi 18 septembre.
Photo d’Illustration
« L’école était la priorité nationale… mais où en est-on aujourd’hui ? » s’interroge Véronique Cotrelle, présidente du Syndicat national de l’Enseignement chrétien (Snec-CFTC). L’appel à la mobilisation du 18 septembre s’inscrit, selon elle, dans un climat de « nombreuses difficultés » qui traversent l'Éducation nationale. « Ce n’est pas dans la culture de l’enseignement privé de faire grève, reconnaît-elle. Mais entre les réformes à répétition et la perte de pouvoir d’achat, beaucoup de nos collègues se mobiliseront certainement demain. »
Les revendications des syndicats de l’enseignement privé rejoignent celles des autres secteurs – notamment sur la suppression de deux jours fériés évoquée par l’ancien Premier ministre François Bayrou, depuis balayée par Sébastien Lecornu à son arrivée à Matignon. Toutefois, la question de la prévoyance reste un point de crispation spécifique à leur branche. Concrètement, les quelque 140 000 établissements d’enseignement privé sous contrat avec l’État ont l’obligation de proposer à leurs enseignants ce contrat complétant la Sécurité sociale en assurant un maintien de revenu en cas d’accident, de maladie ou de décès, là où la mutuelle couvre uniquement les soins. « C’est notre dernier acquis par rapport au public », constate Stéphanie Schnell, présidente du Syndicat professionnel de l'enseignement libre catholique (Spelc) dans le Bas-Rhin. Or selon les dires des syndicats, la part de cotisation des établissements, en négociation depuis 2024, serait finalement menacée de disparition « d’ici janvier 2026 ».
« Ce sont des économies faites sur le dos des enseignants »
« Être malade, c’est devenu un luxe », grince Stéphanie Schnell, qui pointe l’inaction de l’État face aux difficultés du secteur. Un constat que partage le Snec-CFTC. « Ce sont des économies faites sur le dos des enseignants », dénonce sa présidente, Véronique Cotrelle. À cela s’ajoute un sentiment croissant d’invisibilisation. « En moyenne, nos collègues effectuent 43 heures de travail par semaine », rappelle-t-elle, soulignant un investissement rarement reconnu à sa juste valeur pour un salaire « 10% moins élevé que dans le public », une fois les cotisations payées. Derrière cette mobilisation qu’ils espèrent « massive », les syndicats cherchent à « renouer avec un dialogue social ».
Le malaise se manifeste aussi à l’intérieur même des établissements. « Ce serait mentir de dire que nous sommes soutenus par nos directions », affirme Benoît Villagordo, représentant de la CGT-Enseignement privé. Dans de nombreux cas, faire grève serait « ouvertement découragé » par leurs directions. « D’une certaine manière, cette situation préfigure ce qui pourrait se passer dans le public », glisse-t-il. Ce climat de tension interne résonne d’autant plus fort dans un contexte marqué par plusieurs affaires d’omerta dans l’enseignement privé. À Bétharram comme à Nantes par exemple, des voix se sont manifestées pour dénoncer des abus sexuels et physiques au sein d’établissements privés, relançant ainsi le débat sur le silence imposé aux personnels.
Zoé Fraslin
Édité par Maud Karst