Swati Mohan © Nasa/Bill Ingalls
Jeudi 18 février, 21h56, heure française. La salle de contrôle de la Jet Propulsion Laboratory, à Pasadena en Californie, explose de joie. "Atterrissage réussi. Perseverance est intact et en sécurité sur Mars", annonce d'un calme froid, scientifique, Swati Mohan, celle qui a commenté en direct les dernières étapes de l'arrivée du rover sur Mars. Curiosity, dernière mission américaine de grande envergure sur la planète rouge, n’avait pas profité d’une telle puissance médiatique. Cette fois, la communication autour de l'événement est au moins aussi réussie que l'exploit scientifique lui-même. Le live de la Nasa, lancé une heure et demie avant l’évènement, laudatif à souhait, vante l’ingénierie américaine et les programmes d’éducation de l’agence spatiale. "Voilà ce que la NASA fait. Voilà ce qu’on fait dans notre pays", lâche l'opérateur vidéo quand la première image apparaît sur les moniteurs de la salle de contrôle.
© NASA/JPL-Caltech
En France aussi on se gargarise, Emmanuel Macron n’a pas tardé à s’enorgueillir de la présence d’équipement français à bord et à louer la coopération franco-américaine. De cela, l’image des États-Unis à l’international en avait bien besoin. C’est un coup de brosse à reluire presque gratuit et forcément bien venu pour Joe Biden, le nouveau locataire de la Maison blanche. Presque, il faut insister : le projet Mars 2020 aura coûté 2,75 milliards de dollars à la Nasa.
Un nom si bien choisi
Si en dehors de la salle de contrôle les jeux politiques suivent leurs cours, à l’intérieur les émotions sont sincères. Persévérance : mettre en œuvre sa volonté, user de patience pour poursuivre une action malgré les difficultés, pour rester ferme dans une résolution, une opinion, une attitude. Un mot à la hauteur de l’héroïne du soir : Swati Mohan qui porte fièrement le bindi, ce traditionnel point rouge sur le front. Elle a émigré d’Inde quand elle avait un an. Sur les réseaux sociaux on admire la persévérance de cette femme émigrée devenue la voix d’un des projets scientifiques les plus chers de l’histoire.
Un nom qui sied aussi parfaitement au projet : le jour du lancement du rover dans l’espace, le 30 juillet dernier, le laboratoire qui prépare la mise à feu est touché par un séisme de magnitude 4,5. Six mois plus tard, c'est dans ce même laboratoire qu’on se congratule mais sans s’embrasser, sans se serrer dans les bras. Car, si persévérance résonne si justement aujourd’hui, c’est qu’il semble être la promesse qu’après l’effort vient le réconfort. L’espace d’une soirée, de sept minutes de descente martienne, la crise sanitaire a semblé pouvoir prendre fin.
Guillaume Carlin