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Depuis le 11 mai, le cyclisme fait partie des sports autorisés à la reprise par le gouvernement. Mais la mise en place de consignes sanitaires strictes rend sa pratique compliquée et oblige les coureurs à s’adapter.

Drôle d’ambiance lors du retour en forêt pour les vététistes bas-rhinois. En plus de gérer leur souffle, leurs vitesses et leur trajectoire, les vététistes doivent aussi garder dix mètres de distance entre eux. Dépassements interdits, sauf dans de rares zones très dégagées. De quoi provoquer des frustrations. “Si je fais du sport, c'est pour retrouver les potes et se raconter nos histoires”, rappelle Seb. “Si on doit garder dix mètres de distance, ça devient vite compliqué.” Après l’annonce du Premier ministre, Édouard Philippe, le 28 avril devant l’Assemblée nationale, la Fédération française de cyclisme a édité une notice pour préciser les contours de la reprise.

Au Champ du Feu (20 km à l'ouest d'Obernai), des vététistes tentent de garder leurs distances, dimanche 24 mai.  © Ludovic Lechner

Dix mètres de distance et le plaisir s’en va

Avec ces consignes, toute sortie collective vire désormais au casse-tête. Président de l’Xtreme bike club de Strasbourg, Ludovic Lechner a lui aussi réalisé une notice de six pages à destination de ses membres. Les sorties sont réduites à quatre personnes, avec un talkie-walkie pour l’ouvreur et celui qui ferme le groupe. “Un des enjeux quand nous roulons ensemble, c’est de rester un minimum groupés pour guider certaines personnes”, expose-t-il.

Un dispositif encore plus compliqué à mettre en place pour ceux qui roulent entre amis, sans cadre. “Je pensais garder la distance préconisée mais après ma première sortie en groupe, je me rends compte que c’est déjà difficile de maintenir cinq mètres d'écart”, poursuit Sylvain, vététiste confirmé. 

Sur la route, pas facile non plus d’oublier les vieux réflexes. Le cyclisme étant un sport qui repose sur l’aspiration, rouler en peloton semble un comportement tout naturel, presque instinctif. “Depuis le déconfinement, nous avons croisé beaucoup de groupes de cyclistes, raconte Quentin Bothet, gendarme adjoint volontaire à Seltz. Ils étaient en file indienne, avec un mètre de distance, soit plus qu’à l’accoutumée, mais n’avaient pas dix mètres entre eux. D’ailleurs, quand ils nous voyaient, ceux en tête disaient aux autres de respecter les distances.” Les forces de l’ordre ont commencé par de la pédagogie. 

Pour ne pas céder à la tentation, la plupart des cyclotouristes ont suspendu, jusqu’à nouvel ordre, leurs virées. “Nous ne voyons pas quel plaisir nous pourrions retrouver”, avance Denis Vierling, président du comité départemental. À Haguenau, l’école de cyclisme (6-12 ans) a également baissé le rideau temporairement.

Le président de l’Union cycliste Jacky Ruez s’explique : “Rouler à dix mètres l’un de l’autre, c’est une hérésie. Dix gamins qui roulent l’un derrière l’autre en respectant ces consignes, ça fait presque 100 mètres. Comment rassurer les parents dans ces conditions ?” Chaque dépassement de voiture deviendrait encore plus dangereux qu’à l’accoutumée. 

L’entraînement individuel en attendant les compétitions

Malgré tout, le cyclisme fait partie des sports les moins mal lotis. Si les terrains urbains de basket et les skateparks ont rouvert, footballeurs, handballeurs et autres gymnastes doivent ronger leur frein. “Nous sommes des chanceux car notre pratique ne dépend pas d’équipements sportifs à proprement dit. Elle est compatible avec l’état de la crise sanitaire”, concède Ludovic Lechner. 

La majorité des cyclistes pratique la petite reine en solo et se félicite surtout de pouvoir pédaler à nouveau sur les routes bas-rhinoises. “En temps normal, nos coureurs roulent rarement ensemble puisqu’ils sont disséminés sur tout le département”, admet Jacky Ruez. 

Les compétitions professionnelles françaises reprennent le 1er août, le Tour de France aura lieu en septembre, mais l’avenir des courses d’amateurs demeure flou. Leur organisation prend plusieurs semaines, parfois des mois, et l’évolution de la situation sanitaire ne permet pas de se projeter. “Il faut des routes, avoir l’autorisation préfectorale, trouver des bénévoles et des motards… On ne peut pas décider de ça huit jours avant”, observe Daniel Krieger, de l’Unité VC Schwenheim. 

Julien Nehr, membre du club de N2 (deuxième division amatrice française), préfère prendre la situation avec philosophie : “S’il y a une saison blanche, je serai encore plus motivé l’année prochaine. En attendant, je roulerai pour le plaisir, avec des sorties plus longues.” Pour ce puncheur, qui a mal vécu ses deux mois de home trainer, se mettre en danseuse sur les routes escarpées n’aura jamais paru aussi agréable.

Arthur Massot
Thibault Nadal

Le BMX bosse pour sa reprise

Les pratiquants de BMX ont aussi retrouvé les pistes à la mi-mai, comme celle en terre de Mothern, où le gendarme Quentin Bothet n’a "vu personne durant le confinement". Une reprise qui nécessite des consignes sanitaires spécifiques. Chaque pratiquant doit apporter son propre matériel, le nettoyer avant et après l’activité et se doucher désormais chez lui. Le département compte aussi trois espaces de vélo freestyle et 27 skateparks.

 

 

 

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