Le module est validé, il peut être inséré dans un article pour être consulté par les internautes.
"J’étais une enfant très solitaire, qui écrivait beaucoup." Devant une salle comble réunie à l’occasion du festival littéraire strasbourgeois Bibliothèques Idéales, Judith Godrèche, 52 ans, se confie sur son enfance. L’actrice et réalisatrice française aborde notamment sa relation, qu’elle décrit pudiquement comme "abusive", avec le réalisateur Benoît Jacquot lorsqu’elle avait 14 ans. Elle revient aussi sur le tournage du film La Fille de 15 ans de Jacques Doillon, qu’elle accuse aujourd’hui de viol après un long chemin pour libérer sa parole.
Celle qui est devenue une figure du mouvement #MeToo écrivait déjà en 1989 un roman mettant en scène une jeune femme sortant d’une rupture avec un compagnon beaucoup plus âgé. Judith Godrèche assure ne pas avoir eu l’ambition de transmettre un message à travers son écriture. Son roman Point de côté, elle préfère le résumer ainsi : "C’est une histoire d’amitié entre une femme de 21 ans et une petite fille."
"On ne peut pas forcer la parole"
Judith Godrèche poursuit ensuite sa carrière au cinéma et passe près d’une décennie à Los Angeles. "Je suis partie vivre aux États-Unis, mais la France m’a rattrapée. Une amie m’a envoyé Le Consentement de Vanessa Springora en me disant qu’il fallait absolument que je le lise", révèle-t-elle. L’actrice commence sa lecture, mais doit aussitôt s’arrêter. "Trop de similarités avec ce que j’avais vécu", souffle-t-elle. On lui propose d’écrire à son tour un livre, ce qu’elle refuse : "On ne peut pas forcer la parole. Il y a quelque chose de viscéral, tellement de constructions psychiques qui l’empêchent…"
En 2023, elle réalise une mini-série Arte, Icon of French Cinema, inspirée de sa vie d’actrice. Elle y joue son propre rôle aux côtés de sa fille Tess Barthélémy. Ce n’est qu’après la promotion de la série qu’elle décide de porter plainte, en février 2024, contre Benoit Jacquot et Jacques Doillon. Une décision difficile pour Judith Godrèche, qui décrit un sentiment de solitude au moment de témoigner contre des monstres du cinéma. "Les personnes qui m’ont violée n’étaient pas des personnes rejetées ou qui se cachaient, explique-t-elle. On accuse quelqu’un qui a un groupe d’amis, quelqu’un qui peut être drôle, généreux…"
"Après les Césars, j’ai reçu beaucoup de témoignages"
Elle souffre alors des discours qui remettent en cause son vécu. "Ça met en colère qu’on parte du principe qu’une fille de 14 ans ment. Une enfant n’a rien à gagner à raconter ce qu’elle a vécu avec un adulte, insiste-t-elle. Si on commence par remettre la parole de ces enfants en question, on est mal barré. Dire aux victimes qui ont le courage de parler que ce sont des menteuses, c’est d’une violence inouïe", ajoute-t-elle.
En conférence à Strasbourg, l'actrice est revenue sur son parcours marqué par les violences sexuelles et sa prise de parole devant le milieu du cinéma français.
Si le projet froisse encore quelques réfractaires, Alain Jund, le vice-président de l’Eurométropole, tient à prendre de la hauteur. “En 2013, la transformation de la rue de la Brigade Alsace-Lorraine (trottoirs de cinq mètres de large, piste cyclable de 3,50 mètres et voitures en sens unique, ndlr), avait suscité beaucoup de débats. Après, on se rend compte que tout le monde est gagnant”, conclut l’élu.
Objectif 20 % de déplacements à vélo
Les habitants de l’Eurométropole sont invités, depuis 2022, à donner leur avis sur le “ring” par le biais de déambulations, d’un forum qui a réuni une centaine de participants, d’ateliers, de permanences et de réunions publiques. Des modifications ont été apportées au contournement, par exemple, sur les ponts couverts. Patrimoine protégé, les pavés ne peuvent pas être remplacés pour améliorer la circulation des cyclistes. Un tracé complémentaire sera donc proposé via le pont des Frères Matthis.
La conseillère municipale Sophie Dupressoir voit aboutir un projet qu’elle a porté pendant quatre ans : “Ce ring symbolise le partage de l’espace public, avec plus de place pour les modes de déplacements actifs, dit-elle à Webex. Il faut planter les graines d’une ville du 21e siècle soumise à des défis climatiques.”Avec ce “ring” et le plan vélo 2021-2026, l’Eurométropole entend répondre à un objectif de 20 % de déplacements à vélo d’ici à 2030.
Un projet qui fait débat entre les cyclistes
C’est justement cet argument du dérèglement climatique qui pousse Dimitri à critiquer le projet : “Je trouve ça pas assez ambitieux dans une ville où la mobilité douce est censée être pour demain. Avec les piétons, on est encore la cinquième roue du carrosse.” Ce père de famille déplore la présence des voitures et des bus qui pourront toujours circuler dans la rue Sengenwald. Les quatre mètres de large de la piste cyclable à double sens ne seraient également pas assez importants, malgré l’élargissement prévu des trottoirs.
Une position radicale que Luca Radic, étudiant en géographie et membre de l’association Strasbourg À Vélo, relativise. “Je réfléchis aussi aux autres acteurs. Au niveau psychologique, il ne peut pas y avoir de changement trop important, explique-t-il. Avoir des vélos cargos partout comme à Amsterdam me semble assez utopique. Mais d’ici à 20 ans, il y aura beaucoup plus de cyclistes et on aura peut-être quatre mètres de piste par sens de circulation”. Très enthousiaste par rapport au “ring”, il attend que les premiers travaux débutent fin automne.
Reste encore un élèment à trancher : le nom définitif du projet. La connotation péjorative du mot “ring” a été mise en avant lors des consultations publiques. Sur des post-its, les participants ont pu proposer hier des idées de noms. Ring dring, la grande roue, la ceinture, V’Ellipse, la boucle verte… qui sera l’heureux élu ?
Lucie Campoy
Édité par Fanny Lardillier
Invité de France 2 le 22 septembre, Michel Barnier a annoncé vouloir faire de la santé mentale une grande cause nationale. Les chiffres sont alarmants : 21 % des 18-24 ans souffrent de dépression, selon une enquête de Santé publique France.
Lancé en 2022, "Mon soutien psy" entend rendre accessible les consultations de professionnels de la santé mentale, avec 12 séances gratuites par an. "J'ai une quinzaine d'appels par jour", témoigne Alice Tisserand, psychologue. Elle a rejoint le dispositif il y a trois semaines. Depuis, les demandes de rendez-vous s'accumulent, et sa liste d'attente s'allonge. Pour cause, "Mon soutien psy" est décrié par une partie des professionnels, qui n'ont pas souhaité y être répertoriés. "Le nombre de séances que l'on nous impose est très limitant et les tarifications des séances qu'on nous impose est peu valorisant", explique la psychologue. La séance, gratuite pour la patientèle, est rémunérée à hauteur de 50 euros. Soit 10 à 20 euros de moins que les tarifs habituels.
"C'est une santé qui est aussi importante que toutes les autres santés", soutient Alice Tisserand, indignée que les soins psychologiques ne soient pas remboursés. Elle espère une évolution de ce système de prise en charge vers un remboursement des consultations sans conditions. Explications en vidéo.
Depuis le 1er septembre, l'Eurométropole de Strasbourg expérimente un congé de santé gynécologique. Ce dernier permet aux agentes souffrant de douleurs menstruelles, d'endométriose ou de symptômes liés à la ménopause de bénéficier de 13 jours d'absence exceptionnelle par an. Il est proposé aux 3 500 agentes employées par la collectivité. Le dispositif est novateur, car il prend en compte pour l’une des premières fois la ménopause dans les possibles raisons d’exiger un congé. “Le but est de briser ce tabou, explique Christelle Wieder, adjointe à la maire de Strasbourg Europe Écologie les Verts (EELV) en charge des droits des femmes et de l’égalité de genre. On souhaite que le monde de la santé et les femmes elles-mêmes puissent en avoir une meilleure connaissance.”
Les congés, d’une durée de trois jours maximum, prennent la forme d’autorisations spéciales d'absences. L’agente peut donc s'absenter de son poste sans utiliser ses droits à congés annuels, ni perdre en salaire. Il lui faudra fournir un certificat médical, valable deux ans, qui peut être délivré par un gynécologique ou une sage-femme.
La ville de Strasbourg a choisi de coupler ce dispositif à l’instauration de formations destinées notamment aux chefs d’équipe. Celles-ci doivent débuter en novembre, et seront centrées sur la santé gynécologique des femmes et de son impact au travail. “La formation dure deux heures, et est à destination de nos 900 manageuses et managers”, explique Christelle Wieder à Webex. Elles ne sont pas obligatoires, mais l'Eurométropole mise sur la présence de la “quasi-totalité” des managers.
Un an d’expérimentation, puis le bilan
Après un mois d’expérimentation, il est encore trop tôt pour donner des chiffres exacts. Mais des conclusions peuvent être tirées. “Dans les cas étrangers que nous avons pris en exemple, le dispositif a été utilisé par beaucoup moins de femmes que les statistiques de projection le font entendre”, analyse l’adjointe. Un premier bilan sera fait au bout d’un an, en septembre 2025. Il évaluera le nombre de femmes bénéficiaires, le niveau de diffusion de l’information concernant le dispositif, ainsi que l’impact des formations. Quant à savoir s’il sera renouvelé, la ville ne le sait pas encore, et se penchera sur la question au moment du bilan.
Si plusieurs collectivités sont intéressées par des expérimentations similaires, une généralisation en France devrait prendre plus de temps. En février, le Sénat avait rejeté une proposition socialiste visant à mettre en place un congé maladie dédié aux cas de dysménorrhée (douleurs menstruelles). Les personnes souffrantes auraient obtenu un arrêt de deux jours maximum par mois. Les raisons de ce refus sont diverses. Le ministre de la Santé de l’époque, Frédéric Valletoux, évoquait le “risque de discrimination à l’embauche” que pourrait provoquer cette avancée.
Une idée partagée par le Medef, qui craint que l’idée que les femmes ne puissent pas occuper les mêmes postes que les hommes soit renforcée. La sénatrice Béatrice Gosselin avait, elle, mis en garde contre le coût pour la Sécurité sociale, ainsi que les possibles atteintes à “l’intimité de la personne”. Des positions difficiles à entendre pour Christelle Wieder, adjointe à la maire de Strasbourg : “Une femme sera au contraire attirée par une entreprise ou une collectivité qui met cela en place, et qui affiche des valeurs d’égalité et de féminisme”.
Une diffusion encore trop restreinte
Les syndicats ont salué la mise en place de ce dispositif. S’il permet de mettre le sujet dans le débat public, certains regrettent la lenteur de sa diffusion. “Il faudrait que ce soit un sujet du dialogue social ; que dans chaque instance et entreprise, il y ait des discussions internes pour en définir les modalités”, souligne Jean-Luc Rué, membre CFDT du Comité Régional d'Orientation des Conditions de Travail du Grand Est (CROCT).
En mars 2023, la CGT disait vouloir aller encore plus loin, et revendique “un droit reconnu à hauteur de 20 jours par an sans justificatif médical, sans jour de carence, ni délai pour toutes les femmes et personnes menstruées qui en ont besoin”.
Paul Ripert
Edité par Fanny Lardillier
La mesure se veut pionnière pour une collectivité en France, et initiatrice d’un changement de mentalité, afin de briser le tabou des règles douloureuses et de la ménopause.