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"La Ville nous dit qu’elle va essayer de réfléchir à conserver la mixité sociale dans notre école. On est forcément un peu inquiet, mais on attend de voir le résultat", confie Emmanuel Schmitt.

Arthur Guillamo
Kenza Lalouni

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Francis Fischer épaule son fils Florent dans leur agence immobilière, rue du Général-Offenstein. © Louisa Chausse-Dumont

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De jour, Mehdi Belabassi a l'habitude de servir des travailleurs. De nuit, ce sont plutôt des gens de passage. © Abel Berthomier

Le statut prioritaire présente cependant des avantages aux yeux de certains parents : depuis 2019, les classes de grande section, de CP et de CE1 sont dédoublées. "À l’école privée, ils sont 30 dans les classes, nous, on est au maximum à 16", note Stéphanie Maurer, directrice par intérim de l’école élémentaire de la Meinau. Ces effectifs réduits en inciteraient certains à maintenir leurs enfants à l’école de la Meinau, en raison de meilleures conditions d’apprentissage.

 

L’horizon du collège pousse des familles à partir dans le privé dès le CM1 ou le CM2. L’établissement de secteur Lezay-Marnésia étant victime d’une mauvaise réputation, des parents souhaitent y échapper coûte que coûte. Même si "c’est cher", Olivia, qui habite rue de la Canardière, compte mettre ses quatre enfants à l’école privée. C’est aussi le cas de Khalide, domicilié sur l’avenue de Colmar, qui souhaite y inscrire son fils "peut-être une année avant" la fin de l’école élémentaire, afin de lui assurer une place à l’entrée en sixième.

Jusqu’au début des années 2010, l’école de la Meinau était une école d’application. Autrement dit, ses enseignants étaient des maîtres formateurs. Même si aujourd’hui elle a perdu cette fonction, elle conserve un certain prestige aux yeux des parents.

Hamed Ouanoufi, le repère

"Toutes les écoles devraient être comme la nôtre", affirme Emmanuel Schmitt, directeur de l’école maternelle de la Meinau. Posté à l’entrée pour accueillir les enfants, il voit dans l’établissement un lieu de rencontre entre différents milieux sociaux. "C’est à l’image de notre société, c’est juste normal. Pour moi, c’est important que mon fils aille à l’école du quartier", estime Aude, maman de Colin, qui vit dans le quartier des Villas. 

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Émilie Huard, animatrice, ratisse le jardin de la maison qu'elle partage avec ses trois colocataires scénographes, avenue Christian-Pfister. © Louisa Chausse-Dumont

Voitures volées, trafic de drogue et rixes : il aurait pu "mal tourner". Sans aucune stabilité financière et familiale, il avoue avoir vendu de la drogue. "Au hasard de la vie, soit tu rencontres des pépites, soit des pépins", poursuit l’éducateur. Lui a eu la chance de rencontrer Delfim Antonio, un entraîneur de boxe qui l’a amené vers une carrière de haut niveau. Pendant une quinzaine d’années, il a combattu en coupe de France et en championnat international, notamment en Allemagne et en Italie.

"C’est ce qui m’a sauvé", confie Hamed Ouanoufi. Sa volonté est de reproduire ce schéma vertueux auprès des jeunes. "Si ça a eu cet effet sur moi, je me dis que ce sera le cas pour eux aussi. Les valeurs du sport sont structurantes pour les adolescents, c’est important de les diffuser, surtout pour ceux qui manquent de cadre", explique le boxeur. L’élu du quartier, Abdelkarim Ramdane, loue l’investissement de l’éducateur : "Si on n’avait que des acteurs aussi investis que lui, ce serait génial. Hamed arrive à attirer des jeunes que personne n’arrive à attirer." Difficile de trouver des personnes avec un avis négatif. Pour beaucoup, comme Azad, 20 ans, qui assiste au cours de boxe du Cercle Fitness du jeudi soir, "c’est une figure du quartier. Je pense que du bien de lui, c’est un très bon coach !" Une autre boxeuse complète : "C’est une personne avec des valeurs, des principes et un savoir-vivre."

Le travail d’Hamed Ouanoufi ne s’arrête pas au ring. "Tu ne peux pas rentrer chez toi le soir et déconnecter aussi facilement", confie-t-il. Il lui arrive d’appeler centres sociaux et associations d’aide à l’enfance pour "faire avancer les choses" pour les jeunes en difficulté. Il assure "toujours répondre présent". Comme cette fois où quelques adolescents du quartier l’ont appelé la nuit, alors qu’ils étaient bloqués en Allemagne. Hamed Ouanoufi est allé les chercher en voiture sans hésitation. En 2015, son investissement était moins anecdotique. La Meinau a connu un épisode important de radicalisation : de nombreux jeunes sont partis faire le jihad en Syrie. L’éducateur a tenté de raisonner ceux qu’il avait vus grandir, en vain. À leur retour, il a assisté aux procès, tentant de comprendre cet endoctrinement. Aujourd’hui, il regrette cette image qui continue de coller à la peau du quartier.

Marie Starecki et Lison Zimmer

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