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C’est le moment du recueillement. Tête baissée, yeux fermés, les fidèles prennent part à la prière. Seule source d’agitation : le pasteur Jérôme Kantelberg, qui sillonne les rangs avec un compteur manuel. "Aujourd’hui, avec les enfants, on est 640" confiera-t-il à la fin du culte. "Il n’y avait aucune salle qui pouvait nous accueillir sur Strasbourg, raconte Matthieu Thomann, pasteur principal à l’Epis. Et puis, un jour, on est tombés sur cette ancienne imprimerie, on est devenus propriétaires."
Ces commerces vacants abritaient une boucherie, fermée en 2020, et un cabinet d'infirmiers libéraux. Ils sont la propriété d’Alsace Habitat. Freddy Zimmermann, directeur de l’attractivité et du développement durable chez le bailleur social, parle de "vacance stratégique".
Une redynamisation qui peine à démarrer
Quand les gérants sont partis, l’organisme n’a pas voulu accueillir au plus vite de nouveaux occupants afin de se donner le temps de mûrir d’autres projets. Pour choisir d’éventuels repreneurs, Alsace Habitat nourrit de multiples possibilités. Le bailleur pense à installer une conciergerie solidaire. Il discute également avec l’Association pour le droit à l'initiative économique (Adie) de l’ouverture d’une boutique éphémère de six mois. D’après Charlotte Hoarau, responsable projet à l’Adie, elle serait spécialisée dans la vente de bijoux, de vêtements et de bougies vendus par des artisans locaux.
André, un trentenaire qui vient une ou deux fois par semaine, craint tout de même "une perte d’identité du club". "[Je ne n’ai pas envie que] le club mère soit Chelsea et que nous, on devienne juste un centre de formation." Cet été, le RCSA a dépensé 55,5 millions d’euros pour cinq nouvelles recrues qui ont entre 20 et 21 ans. Il rajoute, l’air agacé : "Avec les sous qu’ils ont reçus, ils auraient pu prendre des joueurs moins jeunes, avec plus d’expérience. Ça nous aurait permis de jouer plus haut. Mais c'est un pari pour l’avenir. Ça peut être payant."
"Ça fait du bien à ceux qui restent"
Sur l’année 2020, 186 enterrements ont eu lieu au cimetière public musulman, soit deux fois plus qu’en 2019. Certaines familles ont dû le faire à contrecœur. Covid oblige, le rapatriement des corps est devenu impossible. "On a été bloqué et même humilié !", s’énerve Khadija en repensant à son père inhumé en France contre sa volonté. Comme beaucoup de musulmans, il avait cotisé à une assurance pour que son corps soit rapatrié en Algérie. Mais trois ans après, Khadija le reconnaît : "Ça fait du bien à ceux qui restent de pouvoir aller le voir ici." Depuis la réouverture des frontières fin 2021, les musulmans peuvent à nouveau choisir leur lieu de funérailles. "Et toi, tu te feras enterrer près de papa ?", lance-t-elle à sa mère. Élusive, cette dernière rétorque : "La terre, c’est le Dieu qui choisit !"
Pourtant, les supporters nostalgiques se rappellent du train bleu, nom historique du train qui emmenait, de Saint-Louis à Strasbourg, les fans du RCSA à la fin des années 1970, quand le club a été champion de France. Un vrai succès populaire : 600 à 700 personnes par navette avec des personnes debout dès Colmar mais le dispositif a été supprimé. Il est réapparu à deux reprises : en juillet 2011 lors d’un match contre Mulhouse et en mai 2022 contre Clermont-Ferrand.
Destruction, modernisation et changement de clientèle : l’offre commerciale de la Canardière se recompose en faisant des gagnants et des perdants. Derrière le Plan de renouvellement urbain (PRU), bailleurs et pouvoirs publics tirent les ficelles.
Place de l’Île-de-France, aux alentours de midi, le Fournil de la Meinau ne désemplit pas. "Qui veut encore un sandwich poulet curry ?", lance la vendeuse à la file d’attente d’une dizaine de personnes. Parmi elles, certaines ont acheté un logement dans le quartier ces dernières années. Des nouveaux habitants qui sont "majoritairement jeunes et consomment différemment, plus de baguettes que de pâtisseries", constate Diana Leblond, gérante depuis 2016 de ce commerce emblématique. "C'est un quartier qui commence à revivre. Il y a deux lunetiers, alors qu’avant, il n’y en avait pas. Sinon, on a toujours les mêmes commerces. Ils ont juste changé de place", affirme-t-elle. Pourtant, dans la même rue, deux échoppes gardent les rideaux baissés.