La présidente de la Commission a délivré un discours volontariste sur le thème de la crise de l'énergie à l'occasion du discours de l'Union. Parmi les enjeux centraux qui attendent l'Europe, la réinvention de son marché commun et le plafonnement des profits.
Ursula von der Leyen a choisi une tenue symbolique pour afficher le soutien de l'Europe à l'Ukraine. European Union 2022 / Source : EP
Vêtue d'une tenue aux couleurs du drapeau ukrainien, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen s'est présentée, mercredi 14 septembre, devant les eurodéputés au côté d'Olena Zelenska, l'épouse du président ukrainien Volodymyr Zelensky, pour adresser un message d'unité aux Européens, de solidarité aux Ukrainiens, et de fermeté à la Russie.
« C'est la première fois qu'un discours de l'Union est prononcé alors que la guerre fait rage sur le sol européen », a-t-elle souligné avec solennité. La présidente de la Commission a ensuite rappelé la sidération qui s'était emparée de l'Europe le 24 février dernier, au lancement de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. La surprise, poursuit-elle, n'a pas duré : « Nous ne nous sommes pas dérobés et nous n'avons pas hésité. L'Europe s'est montrée à la hauteur de la situation », notamment en soutenant l'Ukraine, en mettant sur pied des trains de sanctions successifs visant Moscou, et en se détachant progressivement de la Russie pour son approvisionnement en gaz.
En filigrane, Ursula von der Leyen construit le récit d'une Union européenne qui se renforce face à l'adversité. Lors de la crise économique de 2008, les Européens avaient mis des mois à mettre au point une stratégie commune ; lors de la crise sanitaire, des semaines ; quand l'invasion de l'Ukraine a débuté, « notre réponse fut unanime, déterminée et immédiate ».
L'énergie, nouvelle pomme de discorde européenne
Mais cette unité de façade peut-elle résister à la crise de l'énergie qui menace l'Europe ? Les mesures annoncées par la présidente de la Commission ne manqueront pas de susciter de vifs débats chez les Vingt-Sept. Ainsi le plafonnement des « super-profits » – ceux-là même dont Bruno Le Maire, le ministre français de l'Economie, ne voulait pas entendre parler – dégagés par les entreprises productrices d'énergie devrait, selon les calculs de la Commission, rapporter 140 milliards d'euros, à condition que ce principe soit adopté. Si la Grèce, la Roumanie, l'Espagne, l'Italie et même la très libérale Allemagne s'y sont déclarées favorables, la France, notamment, traîne des pieds.
Autre mesure choc annoncée par Ursula von der Leyen, une réforme « en profondeur » du fonctionnement du marché européen de l'énergie. Exit la règle de « l'ordre du mérite », qui indexe le coût du megawattheure à celui de la source d'énergie la plus chère du mix énergétique européen, c'est-à-dire le gaz, dont le prix s'est envolé en un an, entrainant dans son sillage celui de l'électricité.
Là encore, le consensus n'est pas assuré : si la France, notamment, est favorable à cette réforme, du fait de l'importance du nucléaire dans son mix énergétique, les pays scandinaves, qui « profitent » de la conjoncture actuelle pour vendre leurs énergies renouvelables (solaire, éolien, hydroélectrique) à prix d'or, ne veulent pas en entendre parler. La réinvention du marché européen de l'énergie promet des débats électriques.
Matei Danes
Édité par Charlotte Thïede