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De petits entrepreneurs prennent le risque d'investir au Danube et au Heyritz. Un pari économique sur l'avenir dans deux zones qui manquent de dynamisme aujourd'hui, mais pourrait bien en gagner demain.

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Avec ses 60 mètres de long, Antoine Chevalier possède la plus grande péniche habitable du bassin Dusuzeau © Mado Oblin

Historiquement dévolue à des activités industrielles, la zone portuaire se retrouve au coeur du projet de réaménagement de Strasbourg et devrait accueillir 4500 logements d’ici quinze ans. Pour que la capitale alsacienne devienne la cité connectée à l’eau telle que rêvée par la ville, le travail sur le port va donc devoir changer.

« Ça fait une dizaine d’années qu’on voit arriver les changements et maintenant, ils sont à notre porte. » Christophe Burger va quitter au printemps 2018 le môle de la Citadelle sur lequel il travaille depuis 28 ans en tant qu’éclusier. L’activité des Voies navigables de France (VNF), son employeur, sera relocalisée dans le quartier de la Meinau, « au milieu d’une zone industrielle loin de l’eau ». Le quai où il opérait jusqu’alors, fera partie intégrante du nouveau projet de ville-port voulu par l’agglomération strasbourgeoise.

Avec ce concept, la municipalité veut faire cohabiter des acteurs économiques et des citoyens autour des canaux. Occupée depuis un siècle par des activités industrielles, la zone qui s’étend du Rhin au môle de la Citadelle était en perte de vitesse. Le nouveau projet va redéfinir le territoire au cours des quinze prochaines années. Au programme : 4500 logements, des hôtels et des bureaux.

« L’eau doit être utilisable pour le travail, pour le loisir et pour le logement », détaille Charlotte Vaxelaire, urbaniste en charge de ce réaménagement. « L’idée, c’est qu’on puisse habiter dans le port sans pour autant impacter son fonctionnement. »

Chaque année, c’est environ 18 millions de tonnes de marchandises qui sont acheminées en camion vers le Port. Un flux ininterrompu entrainant son lot de nuisance, du bruit à la pollution. Autant d’éléments à priori incompatibles avec un avenir résidentiel promis au deuxième port fluvial de France. Pour que les entreprises historiques cohabitent avec ces nouveaux venus, elles doivent évoluer.

C’est le cas par exemple des cafés Sati, présents depuis 1965 le long du pont Vauban. « Au début des discussions en 2009, les cafés Sati étaient seuls sur cet espace et aucune contrainte particulière ne pesait sur leur fonctionnement. Avec les constructions le long de la route du Rhin, la pression est devenue plus forte », explique Stéphanie Treger, membre du Groupement des usagers du port (GUP). Longtemps isolée, l’entreprise sera bientôt cernée par des habitations. Elle devra revoir l’acheminement de ses matières premières et l’expédition de ses produits transformés.

Pour limiter ces nuisances, le GUP propose de mettre en place sur le port « un projet d'économie circulaire ». Depuis 2013, une vingtaine d’entreprises a déjà entamé des démarches dans ce sens : elles achètent des produits en commun, recyclent ensemble, échangent des matières premières… « Ce qu’une entreprise va considérer comme un rebut de sa production va être vu par une autre comme une matière première dont elle pourra tirer bénéfice et qu’elle pourra exploiter » espère Stéphanie Treger. Résultat attendu : les trajets routiers diminuent, les coûts aussi.

 En devenant plus attractif, le quartier devrait également devenir plus propice à l’activité touristique, qui va se regrouper sur le môle de la Citadelle. Batorama, qui fait voyager 800 000 touristes par an à bord de ses bateaux-mouche, a d’ores et déjà ses locaux sur place. Il devrait y être rejoint par CroisiEurope, un poids-lourd de la croisière fluviale, installé depuis 2002 à un kilomètre en amont du bassin. Le tour-opérateur cherche ainsi à se recentrer et à améliorer l’expérience de ses voyageurs qui pourront plus facilement accéder aux nouveaux hôtels qui viendront garnir les berges. Quant au sud du môle, il accueillera un port de plaisance flambant neuf, que pourront découvrir les 150 000 croisiéristes qui débarquent chaque année à Strasbourg. 

Corentin Parbaud

Nicolas Grellier

Transporter des marchandises à vélo

Deux français ont mis au point une remorque à vélo électrique autopropulsée, elle permet de transporter jusqu’à 250kg de marchandises. Plus propres que les camions et plus discrète, la K-Ryole apparaît comme une solution pour les livraisons dans les centres-villes. Sa commercialisation est prévue pour mi-2018 à Paris, Lille, Lyon et Rouen.

Face à cette situation, les adolescents qui n’ont pas pu être inscrits au centre social s'occupent tant bien que mal. Le city stade au bord du Rhin dans la cité du Loucheur est leur point de rencontre durant leur temps libre. « Il n’y a rien à faire ici. Quand on ne vient pas là, on traîne dans la “cour“ », raconte l'un d'eux. Cet espace de la cité entouré par les barres d’immeubles, où les jeunes sont témoins du trafic de drogue, inquiète les parents. « Je n’aime pas les laisser seuls dehors. Ils ne sortent jamais sans moi, témoigne une mère de famille. Ils peuvent vite être influencés par de mauvaises personnes. » La 2x2 voies, frontière avec la partie rénovée du Port-du-Rhin, est par ailleurs un passage dangereux pour des enfants qui traversent seuls.

« Je préfère le regarder et profiter du soleil », dit-elle. Autodidacte lui aussi, il a appris à pêcher sur Internet à l'aide de tutoriels. Domicilié à la Montagne-Verte, You doit prendre son véhicule pour pêcher. Il fait figure d'exception, les autres pêcheurs venant à vélo ou à pied.

Le « no kill » : la bonne conscience des pêcheurs

Les pêcheurs plébiscitent la recherche du calme face à l'agitation urbaine. « Vers la cathédrale c'est trop la ville, ça m'ennuie, je préfère être tranquille », poursuit You, posté à côté du pont Citadelle où passe le tramway qui va à Kehl. Un constat partagé par Benjamin : « La pêche, c'est un plaisir mais c'est aussi la solitude. Il n'y a personne qui vient te faire chier, tu n'es pas obligé de parler. Tu as les pieds dans la flotte dans le calme. »

… et précaire !

Antoine Chevalier est propriétaire de son navire, mais son emplacement est temporaire et révocable à tout moment. En 2013, il a signé une Convention d’occupation temporaire (COT) avec le Port autonome de Strasbourg valable 10 ans. Cette convention conduit à une situation précaire. Le Port, gestionnaire des berges peut, avec préavis et sous certaines conditions valables (travaux, réhabilitations, etc…), demander à tout moment à l’ancien marin de partir. Avec les nombreux projets immobiliers (Eco quartier Danube, Port du Rhin) situés aux alentours de la péniche et la réduction du nombre d’emplacements des bateaux habitations, Antoine Chevalier sait que l’avenir de son habitat s’écrit en pointillé.

Camille Toulmé et Thomas Vinclair

Benjamin Balbinot, 29 ans, béret sur la tête et piercings au visage, montre l'Ill du doigt : « Je suis parti de l'avenue de Colmar et je remonte la rivière jusqu'à la voie ferrée. » Soulevant sa canne au-dessus de sa tête, il fait claquer le fil dans l'air comme un lasso avant d'envoyer sa mouche sur l'eau. Le jeune menuisier intérimaire pêche à la cuillère. Une technique que lui a transmise son grand-père sur les bords de la Loire. De passage à Strasbourg pour trois mois, le nouveau-venu est à l'affût de brochets suffisamment grands pour être consommés – à partir de 55cm.

Gabriel, 15 ans et capuche sur la tête, le guette aussi, le brochet, sous la passerelle Braque, à côté de la médiathèque Malraux. « L'eau est plus claire là, on les voit mieux ici qu'à Port-du-Rhin», souligne-t-il. L'adolescent, qui pêche depuis quatre mois avec ses copains, a déjà le jargon de l'initié. Ce jour-là, il repart bredouille mais rappelle fièrement son palmarès : « J'ai déjà pêché une brème. »

Un loisir pas uniquement masculin

Installés plusieurs heures, cannes plantées dans le gazon, d'autres trempeurs de fil pêchent à l'ancienne. Une activité de détente pas forcément masculine. Carole, manager dans la grande distribution, aime pêcher au coup avec son mari, Dominique, demandeur d'emploi. « Un jour, elle a tenu la canne, ça lui a plu et elle a pris un permis », s'amuse-t-il. Casquette de sport vissée sur la tête, Dominique est intarissable sur sa passion : « Je monte mes propres mouches pour pêcher dans les Vosges », explique-t-il en scrutant son flotteur à la surface de l'eau.

A quelques mètres de là, You, deux ans de pêche au bout de la canne, est également accompagné de sa femme.

 

Un habitat qui coûte cher…

Néanmoins, habiter dans un endroit comme celui-là induit des coûts particuliers. « Une personne qui ne sait rien faire de ses dix doigts ne se lance pas dans ce projet », affirme le retraité. Antoine Chevalier estime qu’il faut s’y connaître en bricolage et en mécanique pour pouvoir intervenir soi-même et économiser de l’argent. « C’est un travail de tous les jours et il ne faut jamais laisser repousser le colmatage d’une fuite ou la réparation d’un problème mécanique au lendemain, souligne-t-il. Le bateau peut très vite finir comme une épave. » L’embarcation doit répondre à des normes de flottaison et de navigabilité précises. Tous les cinq ans, Antoine Chevalier est obligé de procéder à un contrôle technique coûteux, avec mise à sec et carénage afin de limiter la corrosion. Le prix d’une telle opération se compte en milliers d’euros.

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L'association des Compostiers du Landsberg ouvrira son jardin partagé Lands'herb au Printemps prochain rue du Ballon. Le week-end, Maxime Pomiès, membre de l'association, s'occupe du compost. © Louise Claereboudt

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