Originaires du Neuhof, Malika Souci, Karima Merah, Adem Baspinar et Saban Kiper se sont présentés sur les listes des deux dernières élections municipales. Malgré le sentiment d'être le « candidat idéal » pour certains, un « faire-valoir » pour d'autres, l'expérience s'est révélée positive. Retour sur leur apprentissage de la vie politique.
« J’ai été un atout, une carte dans ses mains », concède Malika Souci, presque fataliste. Seizième sur la liste de Roland Ries, aux élections municipales de 2008, la Neuhofoise a parfois l’impression de « n’avoir été qu’un faire-valoir » dans la campagne du candidat PS, actuel maire de Strasbourg. Pourtant, si la sexagénaire est clairvoyante, elle n’est pas amère. « Malgré tout, je le remercie. Ce fut une expérience positive en termes de réseau, d’apprentissage de la démocratie et des mécanismes du pouvoir, justifie-t-elle, si c’était à refaire, je le referais. »
A son image, Karima Merah, Adem Baspinar et Saban Kiper avaient tous le profil du « candidat idéal ». Neuhofois d’origine algérienne ou turque, ils ont tous les quatre été approchés par des partis politiques en recherche permanente de diversité. « Sur une liste de candidats, il faut prendre en compte différents paramètres pour ne pas qu’elle soit trop homogène. La ville n’appartient pas à un certain type de population. Le fait que je vienne du Neuhof a joué, c’est certain », admet Adem Baspinar, 40 ans, sur la liste EELV aux municipales 2008 et 2014. « Même le FN est venu me voir », s’esclaffe Karima Merah, 44 ans, psychopraticienne. Une sollicitation qu’elle rejettera d’un revers de la main pour finalement se présenter sur la liste EELV elle aussi en 2008 et 2014.
Le bon profil
A les entendre, leur engagement politique relève, pour la plupart, d’une rencontre et leur présence sur les listes électorales d’un « accident ». « J’ai rencontré Alain Jund à l’Astu [association de médiation entre les institutions et la communauté turque, Ndlr.], on a partagé une analyse commune. Au départ, être candidat, ça ne m’intéressait pas, confie Adem Baspinar, c’était plus pour donner un coup de main. » Coïncidence? Rien n’est moins sûr. Engagés professionnellement ou politiquement, tous avaient pour atouts une connaissance des réalités et besoins du terrain, un réseau bien fourni et un rôle moteur dans le quartier. « Quand j’ai rencontré Roland Ries, je lui ai dit que j’étais prête à mettre à son service le petit impact que j’avais dans le quartier, raconte Malika Souci. Un jour, il m’appelle et me dit que je suis 16e sur la liste. Moi je ne voulais pas, je n’avais pas le temps. Je ne pensais pas avoir la chance d’être élue. » Elue, elle le sera pourtant au sein de la majorité PS, tout comme Saban Kiper.
A 35 ans, le chargé de mission à la Ditib (association turque qui porte le projet de la création d’un campus en sciences religieuses musulmanes) fait figure d’exception parmi les anciens candidats du Neuhof. « J’étais un candidat idéal, mais pas un faire-valoir. J’avais déjà un engagement politique », insiste-il. Encarté au PS depuis 1996, il a demandé personnellement à figurer sur la liste de Roland Ries en 2008. Il n’est toutefois pas dupe sur la raison de sa présence au conseil municipal. « Je sais que j’ai été choisi plus pour mon profil que pour mes idées », avoue-t-il. Des idées mortes-nées pour la plupart des candidats.
S'adapter à la réalité
Après l’excitation de l’engagement, les Neuhofois se sont rapidement confrontés à la réalité politique. « On savait déjà que la seule priorité dans le Neuhof, c’était la rénovation urbaine, pas les associations », constate Saban Kiper. Lenteur et complexité des démarches administratives, enjeux contradictoires, ont freiné, voire fait avorter, leurs projets. « Au sein de la majorité, on avait les pieds et les poings liés », confie Malika Souci. Elle décide alors de la quitter à mi-mandat. Une façon pour elle de n’avoir plus de comptes à rendre mais aussi de se libérer du carcan administratif. « Après, tout est devenu plus simple », constate-t-elle. Aujourd’hui, elle n’est plus élue. Elle n’a pas souhaité se représenter aux dernières municipales, fatiguée par cette première expérience. Comme elle, les autres candidats n’occupent plus de mandat politique, actuellement. Saban Kiper a été destitué en 2013, à la suite de propos tenus sur les manifestations à Gezi, en Turquie. Son avenir au sein du PS semble compromis. Il est sous le coup d’une procédure disciplinaire depuis plus d’un an. « J’ai l’impression d’avoir été lâché par le parti », juge-t-il.
Néanmoins, en politique ou sous d’autres formes, les quatre Neuhofois n’abandonnent pas pour autant leur engagement. À l’échelle du quartier comme Malika Souci. Elle raconte : « On pense tous à 2017, on fera quelque chose… » Mais quoi ? Difficile pour le moment d’en savoir plus. Sous d’autres formes et au-delà du Neuhof pour Saban Kiper. « Je continuerai avec ou sans le PS, pas forcément en tant qu’élu », explique-t-il. Pour lui, c’est la création du campus de théologie musulmane, à Hautepierre, qui prime.
Chacun à leur manière, ils incitent les jeunes à s’engager. Pour Karima Merah, un conseil : « Apprendre à se protéger et avoir les dents bien pointues pour faire grincer le plancher sans trop attirer l’attention. » Malika Souci est du même avis, pour elle « il faut garder une part de rêve », même si, à son image, « il faut savoir les adapter à la réalité ».
Maud Lescoffit
Julien Pruvost
À 17 ans, Arnaud* a déjà connu la prison. Il a volé un scooter pour le revendre et se faire de l'argent. Au pied de son immeuble, Junior, 22 ans, joue à lancer des pièces de monnaie au plus près du mur pour tuer le temps. Il ne trouve pas de travail et vit au jour le jour. Dans la cité, il y a aussi Mike, 26 ans, et Mourad, 22 ans, qui parlent de révolte et de guerre.
Les élections, ils n'y croient pas, ou plus. Pour eux, la vie publique se résume à leur quartier, dans lequel ils se sentent enfermés et oubliés. Tous sont dans leur « bulle », qu'ils disent prête à éclater.
*certains prénoms ont été modifiés
« Ils demandent à être écoutés, la lune aussi... » « Ils veulent avoir un chez-soi. » « Ce qu'ils veulent, c'est vivre, avoir un job. » Pascale Jurdant-Pfeiffer, conseillère générale du canton, est conseillère municipale et a été adjointe du quartier sous la mandature de Fabienne Keller. Annick Neff est adjointe de quartier du Neuhof pour un second mandat. Patrick Roger est un chef d'entreprise installé au Neuhof et conseiller municipal depuis 2014. Nous les avons interrogés sur leur perception des jeunes du Neuhof et de leurs attentes.
De la matière grise dans la balance
A l'initiative de Notre Europe et de la Fondation pour l’innovation politique - deux cercles de réflexion parisiens parmi les plus actifs - 12 think tanks européens ont décidé de faire front commun pour contribuer à la préparation des présidences française, tchèque et suédoise. Histoire de prouver que la bataille des idées européennes ne se mène pas seulement à Bruxelles.
Les deux organisateurs français ont invité des think tanks de 8 pays (Belgique, Grande Bretagne, Pologne, Danemark, Grèce, République Tchèque, Suède, Allemagne) à réfléchir avec elles sur des thèmatiques d’actualité et à faire des propositions.
Au numéro 41 du boulevard des Capucines, siège de Notre Europe, Gaëtane Ricard Nihoul copilote le projet: «il s’agit de faire vivre l’Europe en France, sur des sujets très concrets, et de montrer qu'elle n’est pas une boîte noire face à laquelle on ne peut dire que oui ou non.»
Les participants ont jusqu’à mi-janvier pour proposer une contribution sur deux des sept thématiques proposées: démocratie européenne, développement durable, croissance et emploi, immigration, recherche et éducation, influence de l’Europe dans le monde, défense. Elles sont par ailleurs invitées à présenter une courte synthèse sur les priorités de l’UE à long terme.
Ces contributions, recueillies dans un rapport, seront largement diffusées auprès des politiques européens. «L'idée est de favoriser la diversité », commente Gaëtane Ricard Nihoul, qui reconnait que c’est aussi une opportunité de «mieux faire connaître les positions françaises à nos partenaires européens».
Le rapport sera disponible en mai 2008 sur les sites Internet des deux cercles parisiens. Sans oublier , bien sûr, un événement de lancement à Paris, encore à définir, car «plus on est visible plus on a d'influence».
Le projet ne s'arrête pas là. Cette expérience servira de base de discussion au mois d’octobre, sous présidence française, lors du Forum des think tanks européens organisé par l’Institut Aspen. L’ambition des organisateurs est de passer le relais au Tchèques début 2009 et aux Suédois, juillet 2009.
Mihaela Carbunaru, à Paris
Dès juillet 2007, la plateforme d’information européenne a choisi Internet pour recueillir les attentes de la société civile vis-à-vis de la présidence française. Les résultats de cette enquête ont été présentés le 4 décembre, à l’occasion du lancement d’Euractiv France.
Ils étaient 400 au palais de l’Europe de Paris, ce 4 décembre, venus débattre avec Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d’état chargé des Affaires européennes, à l'invitation d'Euractiv France. La filiale nationale de la plateforme d'information sur l'Europe, y rendait public le résultat de son expérience: donner corps à la société civile organisée en recourant aux ressources du web.
Objet de ce test, une question : les priorités annoncées pour la présidence française de l’Union sont-elles en phase avec celles de la société civile ?
Si la lutte contre le changement climatique, avec 22 déclarations d’intérêt sur 70 réponses, s'est avérée une priorité commune, c’est la relance de la croissance et de l’emploi, avec 33 propositions, qui figure en tête des préoccupations des organisations qui ont répondu à l'enquête. Un thème que la future présidence française n’a pas choisi d’afficher.
Les relations entre l’UE et le reste du monde, y compris défense et immigration, en haut de liste pour la présidence française, n’ont eu droit qu'a 3 contributions. Des résultats qui semblent montrer que pour la société civile organisée les sujets d'intérêt national, comme le pouvoir d’achat, priment sur les intérêts communs européens.
L’enquête était ouverte aux partenaires sociaux, ONG, think tanks, collectivités territoriales. Parmi dix thèmes mis en avant dans le projet de la présidence française, il leur était demandé de formuler deux attentes, sous forme de textes courts. 46 organismes, du Medef à WWF y ont répondu et formulé 70 propositions. Mis à part le dossier énergétique, toutes les contributions témoignent d'une volonté de se protéger, de ne pas perdre l’avantage.
Si le retour de la France en Europe s’affirme, celui de l’Europe en France se fait à petits pas.
Ratiba Hamzaoui, à Paris
Une école européenne pour Strasbourg
L’école européenne ouvrira ses portes en septembre 2008. Le système est inédit en France. Sous contrôle pédagogique de Bruxelles, 450 élèves pourront y suivre un programme strictement européen et gratuit dans trois langues : français, anglais et allemand. Les enfants issus d’un autre pays de l’Union y disposeront également d'un enseignement de leur langue maternelle. Le cursus ira de la maternelle au baccalauréat européen, un diplôme reconnu par les 27 membres de l’Union.
Ouverte à tous, cette école accueillera en priorité les enfants de fonctionnaires européens, Conseil de l'Europe en tête. Jusqu’à ce jour, ils étaient accueillis à Karslruhe, où se trouve l’école européenne allemande.
Les inscriptions ouvriront dès janvier.
Ratiba Hamzaoui