En avril prochain la France devra présenter son Programme national de réforme, base des futures recommandations que lui adressera le Conseil européen en juin. Au sein de ce programme : une section relative à l’emploi.
Le plan national pour l'emploi que la France adressera mi-avril à la Commission s'inscrit dans la continuité de l'exercice du semestre européen lancé en 2011, et des recommandations particulières qui lui ont été adressées en juin 2012. Parmi ces cinq recommandations trois concernaient les politiques de l'emploi. La Commission, dans son rapport conjoint pour l'emploi, en a vérifié l'application en novembre dernier. La France joue-t-elle le jeu du semestre européen sur ce terrain ?
Pour lutter contre le chômage, qui atteint les 3,2 millions en France, la première recommandation de juin dernier préconisait une nouvelle donne fiscale qui allégerait le coût du travail. En octobre dernier, le projet de "crédit d'impot pour la compétitivité" annonçait une baisse progressive des charges pesant sur les sociétés.
La Commission a jugé en novembre que cet allègement allait dans la bonne direction et permettait une réelle incitation à l'embauchel.
En avril 2012, le principal défi identifié résidait dans le chômage des jeunes et des seniors. Le nombre de jeunes sans emploi, sans stage ou sans formation chez les 15-24 ans atteignait en France les 12 %. en 2011. Le pays affichait également le plus bas taux d’emploi des seniors (41,4% en 2011).
Les contrats d’alternance et le renforcement des contrats d’apprentissage s'attaquent bien au segment jeune. Le nombre de jeunes en alternance devrait d'ici 2015 passer de 600 000 à 800 000. Les aides financières accordées au PME de moins de 250 salariés pour permettre le recrutement de jeunes en alternance vont également dans ce sens.
En revanche, la Commission a mis le doigt en novembre sur un fort déficit en matière d'investissement dans l'éducation et la formation en raison de coupes budgétaires. Elle a également pointé le manque d’adéquation entre le type de formation proposée et les besoins du marché.
Pour les seniors, la politique française met l’accent sur la souplesse à promouvoir dans conditions d'emploi des 55-64 ans lors des accords de branches professionnelles. Les contrats de professionnalisation visent également à accompagner ces catégories d'âge.
Néanmoins la Commission se montre plus sévère. Elle regrette la possibilité rendue à certains salariés “de partir à la retraite à 60 ans ainsi que le peu de mesures prises favorisant l'allongement de la vie active”, soulignant que cela reste un des principaux obstacles à l’emploi des seniors.
La recommandation d'introduire plus de flexibilité dans son marché du travail, et de réduire les coûts de licenciement pour les entreprises visait particulièrement la France. La segmentation du marché du travail entre emplois sécurisés et précaires, qui se s'y traduit par la réduction de la possibilité de passer d’un CDD à un CDI à une peau de chagrin est certes une caractéristique générale de la période. Cependant, le taux de transition d’un emploi temporaire à un emploi permanent y est un des plus faibles d’Europe, ne dépassant pas les 10%.
Les contrats lancés en 2011, qui organisent un parcours de retour à l’emploi via la reconversion ou de création d’entreprise constituent une première réponse partielle. La mise en place de contrats de sécurisation professionnelle (CSP) est regardéz comme un premier pas vers l'acceptation par la France de la notion de "flexisécurité". Insuffisant néanmoins, juge la Commission: ces mesures de réforme devront se poursuivre en 2013.
Camille Guttin
Le rapport Lope Fontagné sur l'emploi et les aspects sociaux dans le cadre de l'Examen annuel de croissance, adopté ce jeudi 7 février par le Parlement européen, adresse à la Commission et au Conseil 8 recommandations sur les meilleurs moyens lutte contre le chômage.
On ne lui demande pas son avis. Il le donne, et dans les formes. Le rapport d'initiative de la commission Emploi et affaires sociales (EMPL) adopté ce jeudi par le Parlement a toutes les allures d'un avis formel sur les lignes directrices à adresser aux Etats membres dans le cadre du semestre européen.
Dans ce texte, les députés enfilent la blouse de médecin de l'emploi et dressent un diagnostic accablant sur l'emploi dans l'Union : 25 millions de chômeurs, soit 10,5 % de la population en âge de travailler. « Les perspectives pour 2013 sont pessimistes », avance la rapporteure Veronica Lope Fontagné (PPE). La situation des jeunes actifs est en premier lieu préoccupante, avec un taux de chômage de 22,8 % en moyenne, plus de 50 % en Grèce et en Espagne.
A partir de ce constat, le Parlement propose son traitement. Prudence d'abord: dans un contexte de ralentissement économique, « l'assainissement budgétaire peut avoir des conséquences négatives à court terme sur la croissance et l'emploi. » Mais aussi ambition: les plans nationaux de réforme que présenteront les Etats dans le cadre du semestre européen devraient mettre l'accent sur « des mesures d'ensemble pour la création d'emplois et les emplois verts », « une fiscalité du travail qui encourage l'emploi » mais aussi prévoir «d' investir dans l'éducation et la formation. »
Le rapport demande aux dirigeants nationaux de veiller au dosage entre coupes budgétaires et investissements orienté vers l'emploi et la croissance. Les mesures prioritaires devront faciliter la création d'entreprise, l'accès des PME au financement, et parier sur le gisements d'emploi promis par les technologies de l'information et de la communication, la santé et l'écologie. Le rapport Lope Fontagné appelle ainsi l'Europe à miser sur le développement durable, à travers ses trois piliers : économique, social et environnemental.
Les députés jouent la montre politique
En adoptant ce texte, le Parlement européen exprime sa volonté d'être intégré davantage dans le semestre européen et demande à y « être associé comme il se doit.» Veronica Lope Fontagné a exprimé le mardi 5 février devant l'hémicycle son souhait « que le Conseil européen de printemps prenne en compte ses considérations. »
Ce qui n'empêche pas le sens de l'opportunité. Lors de leur vote, les eurodéputés ont écarté le premier paragraphe du rapport demandant au président du Conseil Herman van Rompuy de « défendre » la position du Parlement lors du sommet, les 14 et 15 mars 2013. Ils ont aussi rejeté l'amendement de Marije Cornelissen (Verts/ALE) invitant « la Commission et le Conseil à conclure un accord institutionnel à avec le Parlement afin de conférer à ce dernier un rôle à part entière dans l'élaboration et l'approbation de l'examen annuel de croissance. ». Entre les tensions parmi les Etats à propos du cadre financier pluriannuel 2014-2020 et les risques de fragmentation du front parlementaire à l'approche des élections européennes de 2014, le moment n'est peut-être pas encore propice pour négocier la forme juridique d'une véritable participation.
Loïc Bécart
Le vote de résolutions sur les droits de l'homme clôture chaque session plénière au Parlement européen. Les députés ont aujourd'hui adopté trois résolutions à propos du Laos, du Pakistan et du Zimbabwe.
Laos
Le 15 décembre 2012, Sombath Somphone est embarqué dans une fourgonnette sur un faubourg de Vientiane, la capitale du Laos. Depuis, on ignore où se trouve cet activiste des droits de l'homme et qui est à l'origine de l'enlèvement. Selon plusieurs députés, la police et les forces de sécurité auraient leur responsabilité dans cette affaire.
Préoccupé par la lenteur et le manque de transparence de l'enquête ouverte par le gouvernement laotien, le Parlement européen rappelle aujourd'hui à travers la résolution votée les obligations du gouvernement en matière de droits de l'homme et de justice et demande le retour immédiat de Sombath Somphone dans sa famille.
Pakistan
Six auxiliaires de santé et un médecin ont été abattus au Nord-Est de la capitale pakistanaise le 1er janvier 2013. En décembre, six femmes participant à une campagne d’éradication de la poliomyélite à Karachi et Peshawar ont également été assassinées. A l’unanimité des 46 députés présents, les parlementaires ont adopté une résolution pour condamner ces meurtres.
Lors des débats, les députés ont rappelé que le Pakistan est l’un des trois derniers pays où la polio existe toujours de façon endémique, tout comme l’Afghanistan et le Nigeria. Depuis l'exécution de Ben Laden, les suspicions d'espionnage pèsent sur les travailleurs humanitaires et entravent leur action. La résolution encourage le gouvernement pakistanais à informer les populations sur les campagnes de vaccination contre la poliomyélite.
Zimbabwe
A l’approche des élections présidentielles en mars, la répression s’intensifie au Zimbabwe, dirigé par Robert Mugabe depuis 33 ans. Okay Michasa, directeur de l’association des droits de l’Homme, a été arrêté le 14 janvier dernier, et accusé de fraudes électorales et de «publications mensongères». Le chef de la coalition «Crise au Zimbabwe» se voit reprocher d’avoir contrefait des copies de certificats d'inscription d'électeurs. Leo Chamahwinya, Dorcas Shereni et Faith Mamutske, militants au sein de ZimRights, sont également détenus par les autorités. Ces arrestations interviennent quelques semaines après que l’association ait dénoncé la montée de la répression policière au Zimbabwe.
Le Parlement européen a condamné ces arrestations d'opposants, alors qu’un référendum constitutionnel est censé se tenir en 2013.
Lucie Debiolles, Hélène Goutany, Margaux Velikonia