Le président brésilien vient de prendre un décret pour limiter la modération des réseaux sociaux. Très actif depuis ses débuts sur les réseaux et friand de fausses informations, Jair Bolsonaro est accusé par ses détracteurs d'encourager la désinformation, moins d'un an avant les élections.
Le chef d'Etat brésilien aux sept millions de followers sur Twitter et aux quinze millions d'abonnés sur Facebook, Jair Bolsonaro, veut s'attaquer à « la censure » des réseaux sociaux. Face à « la suppression arbitraire et injustifiée de comptes, profils et contenus par les fournisseurs », l'exécutif brésilien aimerait assouplir les règles de modération de ces plateformes. Le décret pris le 6 septembre ne précise pas comment le gouvernement entend contraindre ces géants du numérique.
Du haut de ses 66 ans, Jair Bolsonaro, est loin d'être un millénial mais il est un habitué des réseaux sociaux. Lors de sa campagne en 2018, l'ancien militaire et député a réussi à rassembler des millions d'électeurs par ce biais. Fausses informations, déclarations démagogiques ou insultantes se mélangent aux annonces officielles. Une utilisation des réseaux semblable à celle de Donald Trump. Et tout comme l'ancien président américain, Jair Bolsonaro s'est aussi frotté aux modérations de ces plateformes. En mars 2020, en pleine pandémie, qu'il qualifie de « grippette », il partage des photos et vidéos de lui dans un bain de foule grouillant en train de serrer des mains et d'embrasser ses partisans. Twitter supprime deux de ses tweets, contraires aux consignes de santé publique mises en place. Sur Youtube, c'est une quinzaine de vidéos qui seront supprimées, dont une dans laquelle il compare le Covid-19 au sida.
Qu'il l'utilise pour minimiser la pandémie ou évincer ses détracteurs, les fausses informations représentent un véritable outil politique de « Bolsomito ». Il en vient même a bloqué 176 comptes de journalistes et membres du Parlement en août. Dernièrement, c'est le système électoral par voie électronique qu'il remet en cause sur son compte Twitter. Un moyen de légitimer un potentiel futur échec aux élections présidentielles d'octobre 2022.
Dans ce nouveau décret, le gouvernement entend mettre en place la notion de « juste motif » pour justifier la suppression de contenus ou la suspension de comptes d'utilisateurs. « Son objectif [celui du chef de l’Etat] n’est pas de protéger la liberté d’expression, ce qu’il veut, c’est empêcher que la désinformation et le discours de haine que ses partisans et lui disséminent continuent à être retirés des plates-formes », a réagi Alessandro Molon, député d’opposition et rapporteur du texte encadrant la pratique d’Internet au Brésil.
À l'approche de l'échéance présidentielle, Jair Bolsonaro voit sa cote de popularité dégringoler depuis plusieurs mois. En cause, une gestion calamiteuse de la crise sanitaire avec près de 600 000 morts au Brésil et une crise économique inévitable. Grâce à cette disposition, le président sortant espère user, en toute liberté, de ses outils favoris pour reconquérir les Brésiliens : la démagogie et les fake news.
Iris Bronner