Le gouvernement souhaite accélérer la conversion des Auxiliaires de vie scolaire (AVS) en Accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH). © Arthur Krijgsman / Pexels
La scolarité des enfants autistes se heurte au manque d'organisation et de moyens de l'Éducation nationale, comme l'explique, à Cuej.info, Christine Meignien, présidente de la fédération française sésame-autisme.
Lundi 14 septembre, à Reims, Neslihan Beaufort a passé plus de 16 heures sur une grue de 55 mètres de haut pour dénoncer les conditions de scolarisation de son fils autiste Rémy, 8 ans. Malgré la mise en place par les gouvernements de plusieurs plans d'action visant à favoriser l'école inclusive et la scolarisation des enfants autistes, de nombreux parents sont encore démunis aujourd'hui. Manque de moyens, de personnels mais mise en place de dispositifs ambitieux… La présidente de la fédération française Sésame-Autisme, Christine Meignien, détaille où en est aujourd'hui le processus de scolarisation des enfants autistes.
La mise en place d'action spectaculaire par des parents d'enfants autistes, à l'image de celle de Neslihan Beaufort, est-elle un phénomène récurrent ?
Christine Meignien : Les formes que peuvent prendre le combat de certains parents pour alerter sur leur situation peuvent être assez spectaculaires. Souvent les familles ne savent plus comment se faire entendre. Certaines familles courbent le dos, reprennent leurs enfants à la maison et ne vont rien dire, mais d'autres craquent face à l'injustice. Les parents veulent que leurs enfants puissent avoir une vie normale et le fait que l'accès à l'école leur soit interdit est terrible. En tant qu'association, quand on a les familles au téléphone, on est à ce jour incapable de dire à quel moment la situation va se débloquer : tout le système est saturé.
Quel est selon vous le principal obstacle à la scolarisation des enfants autistes ?
Le gouvernement a suivi les demandes des associations de faire une société plus inclusive mais sans se donner les moyens. Accueillir plus d'enfants dans une école déjà saturée demande d'avoir plus de classes, plus de place, donc beaucoup d'efforts. Des accompagnants aux élèves en situation de handicap (AESH) ont été embauchés mais on leur demande de s'occuper de quatre élèves dans quatre écoles différentes, donc de couper leurs horaires en quatre. Forcément, cela ne correspond pas au temps où l'enfant a besoin d'accompagnement. L'Éducation nationale a commencé à s'impliquer, mais c'est évident que cela ne peut pas se faire du jour au lendemain.
La stratégie nationale pour l'autisme est-elle suffisamment ambitieuse ?
Le plan trois pour l'autisme (2013-2017) avait vraiment pris des initiatives au niveau de la scolarité en créant des Unités d'enseignements maternelle (UEMA). Cette nouvelle stratégie (2018-2022) a voulu poursuivre dans la continuité, avec la création d'Unités d'enseignements en élémentaire (UEEA). Il y avait un besoin d'impulsion politique ferme. Or, quand il n'y a pas d'AESH attribué, on dit à l'enfant autiste de ne pas aller à l'école. Est-ce vraiment utile pour eux d'aller à l'école que quelques heures par semaine pour dire ensuite qu'elle est inclusive ?
La secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, s'est félicitée fin août de la hausse du nombre d'enfants handicapés accueillis dans les écoles. Etes-vous d'accord avec cette affirmation ?
Il y a forcément un effet de hausse, heureusement. Mais les chiffres sont là : énormément d'enfants n'ont pas fait leur rentrée scolaire. En février 2020, le président de la République a promis qu'aucun enfant ne se retrouverait sans solution scolaire pour cette rentrée. On sait combien le challenge est énorme pour notre société. Il faut mettre les moyens et être réaliste : il reste encore beaucoup de chemin à parcourir.
Propos recueillis par Cyrielle Thevenin