La loi d'amnistie pour les manifestants poursuivis est entrée en vigueur lundi, au lendemain de l'évacuation de la mairie de Kiev, lieu symbolique de la contestation ukrainienne. Un signe d’apaisement dans la crise qui secoue le pays depuis la volte-face pro-russe du président Viktor Ianoukovitch fin novembre, au détriment d'un rapprochement avec l'Union européenne.
Les opposants au président Viktor Ianoukovitch avaient envahi la mairie de Kiev le 1er décembre. (Ivan Bandura/Fickr)
Les autorités avaient présenté l'évacuation de la mairie de Kiev et d'autres bâtiments publics en province comme un préalable à l'application de la loi. Celle-ci "prévoit l'abandon des poursuites contre les personnes ayant commis des délits entre le 27 décembre et le 2 février". 234 manifestants arrêtés, puis libérés vendredi, encouraient toujours de lourdes peines pouvant aller jusqu'à quinze ans de prison.
"QG de la révolution"
"Je suis satisfait : malgré une décision difficile, nous avons réussi à faire fi des émotions et faire en sorte que cette loi entre en vigueur", s'est félicité Rouslan Andriïko, du parti nationaliste Svoboda, qui était chargé de gérer la mairie pour les opposants. Dans la matinée, les militants qui occupaient les lieux confiaient avoir "le coeur lourd" à l'idée de partir, mais qu'ils le faisaient par solidarité pour leurs "camarades emprisonnés".
La mairie de Kiev, prise d'assaut le 1er décembre et devenue depuis le "QG de la révolution", était un lieu hautement symbolique de la contestation, tout comme le Maïdan voisine, la place centrale de Kiev occupée. Une cantine et un hôpital de fortune y avaient été installés, et la mairie hébergeait jusqu'à sept cents manifestants qui y dormaient et s'y réchauffaient.
La mairie de Kiev, occupée durant trois mois, était devenue le QG de la contestation. (AFP/Youtube)
Des négociations au point mort
Les manifestants maintiennent en revanche leur camp barricadé sur le Maïdan et occupent toujours de plusieurs bâtiments, notamment la Maison des syndicats, dont les autorités n'ont pas exigé l'évacuation.
Le camp retranché des manifestants est maintenu sur la place principale de Kiev. (RuptlyTV/Youtube)
Les dizaines de milliers de personnes réunies sur le Maïdan, pour la onzième fois depuis le début du mouvement, ont quant à elles mal vécu l'annonce de l'évacuation de la mairie, estimant que l'opposition n'avait "rien" obtenu.
Les négociations avec le pouvoir restent en effet au point mort. Aucun accord n'a été trouvé sur la réforme constitutionnelle réduisant les pouvoirs présidentiels au profit du gouvernement et du Parlement ou encore sur la nomination d'un nouveau Premier ministre. L'opposition a d'ailleurs appelé à manifester mardi matin devant le Parlement, à l'occasion de la reprise de ses travaux, dans le cadre d'une "offensive pacifique".
Rejet du pouvoir
"Le seul sujet de négociation possible avec Ianoukovitch est son départ et les garanties de protection de sa famille", a lancé samedi l'opposante et ex-Premier ministre emprisonnée Ioulia Timochenko. Elle a part ailleurs estimé que l'Ukraine du président Ianoukovitch avait perdu son indépendance face au président russe Vladimir Poutine.
Le mouvement de contestation en Ukraine s'est transformé au fil des semaines en un rejet pur et simple du régime du président Ianoukovitch, et ni la démission du gouvernement, ni les négociations n'ont réglé le conflit, marqué par des affrontements qui ont fait jusqu'à présent quatre morts et plus de cinq cents blessés.
Renaud Toussaint (avec AFP)