Dirk Coetzee, figure de l'apartheid en Afrique du Sud, est décédé mercredi soir. Connu pour ses exactions envers les militants anti-apartheid, il faisait partie de la police secrète chargée d'accomplir les basses tâches du gouvernement ségrégationniste.
Il semait la terreur en Afrique du Sud. Dirk Coetzee, ancien colonel de police, n'est plus. Atteint d'un cancer, c'est une insuffisance rénale qui a eu raison de lui dans la nuit de mercredi à jeudi. Né en 1945 à Phokwane, dans le nord-ouest du pays, il commence à travailler dans un bureau de poste. A 25 ans, après neuf mois de formation, il entre dans les forces de police sud-africaines.
En 1980, il devient le premier commandant de l'unité C10, chargée de la « contre-insurrection ». Elle prend le nom de Vlakplaas, d'après la ferme qui lui sert de base technique, située à une vingtaine de kilomètres à l'ouest de Pretoria. Tortures et assassinats d'opposants au Parti national alors au pouvoir, et de militants anti-apartheid sont au menu de cet escadron de la mort.
En 1981, Coetzee assassine Griffith Mxenge, avocat membre du Congrès national africain (ANC). Le corps de cet activiste est retrouvé dans un « township » au sud de Durban. Il a succombé à plus de 40 coups de couteau.
Le « traître blanc »
Il est transféré aux services des narcotiques la même année, avant de quitter la police en 1986. Trois ans plus tard, un ex-collègue risquant la peine de mort pour un meurtre non-politique livre des informations clés à la justice sur le fonctionnement de la Vlakplaas. Sentant le vent tourner, Dirk Coetzee se confie au journaliste Jacques Pauw.
Dans un entretien, il décrit en détail comment lui et ses hommes faisaient la fête pendant qu'ils torturaient des personnes suspectées de participer à des activités anti-apartheid. Coetzee raconte par exemple que des policiers préparaient un barbecue alors même qu'ils brûlaient le corps d'une victime à quelques mètres de là. « Au début, ça sentait comme un barbecue normal, mais vers la fin, tout ce que vous sentiez, c'étaient les os en train de brûler », explique-t-il dans l'interview. La Vlakplaas tuaient également des officiers qui hésitaient à commettre des atrocités. Les corps étaient brûlés, enterrés dans des terrains vagues, ou jetés dans des rivières.
Il retourne complètement sa veste et quitte le pays en 1990 pour rejoindre les rangs de l'ANC. En 1994, Nelson Mandela arrive au pouvoir. Coetzee, de retour au pays depuis un an, travaille alors pour les services de renseignement du premier président noir d'Afrique du Sud. Mais en 1997, il est reconnu coupable de l'assassinat de Griffith Mxenge. Pour ses révélations de 1989, celui qui se fait appeler « le grand traître de la race blanche » est amnistié par la Commission Vérité et Réconciliation, créée pour recenser les violations des droits de l'homme entre 1960 et 1994 et faciliter une réconciliation nationale.
Dirk Coetzee, qui ne se séparait jamais de son arme, même pour aller aux toilettes, travaillait depuis comme consultant en sécurité pour l'entreprise EduSolutions, et avait fait une sortie médiatique remarquée sur la corruption entre son employeur et les pouvoirs publics.
Maxime Meyer (avec AFP)