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17/09/20
15:57

Le règlement de Dublin mis à l'asile

Ursula von der Leyen a tenu mercredi 16 septembre son premier discours sur l’état de l’Union à Bruxelles. La présidente de la Commission européenne a appelé de ses voeux l’abolition du règlement de Dublin. Ce texte méconnu du grand public recoupe les principales règles encadrant la politique d’asile européenne.

Ursula von der Leyen a sonné le glas du règlement de Dublin lors de son premier discours sur l'état de l'Union. © John Thys / AFP

Qu’est-ce que le règlement de Dublin ? 

Le règlement de Dublin, ou Dublin III, est un règlement signé en 2013 par les pays de l’Union européenne. Il est appliqué par tous les Etats de l’Union européenne, mais aussi la Suisse, le Liechtenstein, l’Islande et la Norvège, pays associés. Un principe simple est sous-jacent au règlement : un réfugié effectue sa demande d’asile dans le pays européen dans lequel il arrive. Si, par exemple, un migrant arrive en France après avoir débarqué dans un premier temps en Italie, Rome doit s’occuper de l’accueil et de la demande d’asile de la personne. 

Celle-ci est alors dite "dublinée" et fait l’objet d’une procédure aboutissant à son potentiel renvoi dans le premier pays d’arrivée sur le sol de l’Union européenne. Le fichier Eurodac fait alors office de mine d’informations, enregistre les empreintes digitales du réfugié et permet de déterminer si ce dernier a posé une première demande dans un autre pays européen. "Mais le règlement n’interdit pas d’en déposer une dans un autre Etat", souligne à Cuej-Info Gérard Sadik, spécialiste des questions liées au droit d’asile à la Cimade, une organisation de soutien aux migrants.

Pourquoi ça n’a pas marché ?

2015, des centaines de milliers de personnes fuient le conflit syrien et prennent des risques énormes pour rejoindre les côtes européennes. Les dirigeants européens parlent rapidement de "crise migratoire sans précédent". Leurs propos donnent un écho aux contradictions et exaspérations éprouvées vis-à-vis du règlement de Dublin. À l’origine des rancoeurs de certains gouvernements nationaux de l’Union, la règle imposant une demande d’asile dans le premier Etat d’arrivée du réfugié. Une règle jugée injuste et rapidement dénoncée par la Grèce, l’Italie ou Malte.

Situés en première ligne sur les routes migratoires maritimes, les trois pays ont dû gérer des dizaines de milliers de réfugiés par an au plus fort des arrivées. Plus de 800 000 réfugiés ont par exemple débarqué sur les côtes grecques en 2015. L’égoïsme des autres Etats est alors pointé du doigt, en particulier celui du "groupe de Visegrad", composé de la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie. Seule entente entre les pays européens, la signature d’un accord avec la Turquie en 2016 avec l’objectif de bloquer les arrivées de migrants sur le continent contre le versement de plusieurs milliards d’euros.

Deuxième problème, un manque d’harmonisation des règles européennes relatives à l’asile. "La logique veut qu’un dubliné soit transféré rapidement dans le pays d’entrée pour que sa demande d’asile puisse être traitée le plus vite possible", explique Gérard Sadik. Sauf qu’en pratique, chaque Etat reste autonome dans son choix ou non d’accorder l’asile et les délais peuvent être plus ou moins longs avant un potentiel transfert. "En moyenne, entre 20 et 30% seulement des transferts sont effectués", déplore Gérard Sadik.

Quelles solutions possibles ?

Ce manque de solidarité européen a régulièrement freiné toute tentative de réformes des mécanismes de Dublin à partir de 2016. Plusieurs solutions ont pu être proposées pour répondre aux pressions importantes exercées sur Athènes et Rome notamment. L’idée de "quotas" - ou "système de redistribution", corrige Gérard Sadik - a longtemps fait son chemin pour suppléer le système du premier pays d’accueil. Mais elle s’est heurtée à la fin de non-recevoir des gouvernements de pays d’Europe de l’Est, peu enclins à accueillir sur leur sol des demandeurs d’asile. 160 000 demandeurs d’asile devaient ainsi être relocalisés dans les pays européens. Seules une minorité l’ont été effectivement. En France, 4 000 réfugiés sur 30 000 ont pu rejoindre l’Hexagone.

La suspension de l’accord du règlement par Berlin en 2015 avait poussé à une logique d’une meilleure répartition des migrants et révélé la caducité de laisser certains pays gérer les flux de réfugiés. Cette suspension s’était traduite par l’accueil de près d’un million de demandeurs d’asile par l’Allemagne alors qu’elle n’était pas le pays d’arrivée. Aujourd’hui encore, la répartition de réfugiés se fait au cas par cas, à l’instar de la décision allemande de prendre en charge 1 500 personnes du camp de Moria, sur l’île grecque de Lesbos.

Qu’en dit la Commission ?

Lors de son discours sur l’état de l’Union devant le Parlement européen à Bruxelles, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a assuré que le règlement de Dublin serait remplacé par "un nouveau système européen de gouvernance de la migration". La cheffe de l’exécutif européen promet également "un nouveau mécanisme fort de solidarité" et des "structures communes pour l’asile et le retour". Des propos flous qui cachent les difficultés à venir. "Abolir, c’est remplacer par autre chose", note Gérard Sadik.

Deux scénarios se dessinent pour l’avenir selon lui : "Soit le règlement de Dublin est aboli et pour les États la règle du chacun pour soi prédomine, ce qui est peu probable, soit on change tous les critères d’entrée sur le territoire". Fini donc la règle déléguant les responsabilités au premier État d’arrivée ? La Commission doit présenter sa proposition de réforme de la politique migratoire européenne le 23 septembre, très attendue et maintes fois repoussée. Dans tous les cas, rien ne se fera sans un accord des Etats membres, dont l’aval est essentiel pour donner vie à un nouveau règlement. Les discussions risquent d’être longues et sinueuses. Bien trop longues au vu de la situation dans le camp de Moria, sur l’île grecque de Lesbos.

Clément Aubry

 

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