L'année 2011 a été particulièrement difficile pour les économies occidentales. Mais le déficit record de la France révèle d'abord un handicap économique national.
Les échanges commerciaux de la France ont atteint en 2011 un déficit record, a annoncé ce mardi matin le secrétaire d'Etat au commerce extérieur, Pierre Lellouche.
Crise et hausse du coût de l'énergie ont affecté toutes les économies occidentales en 2011. Pourtant, toutes n'affichent pas des déficits aussi alarmants. Malgré une facture énergétique massive, l'Allemagne devrait même annoncer mercredi « un excédent commercial d'environ 160 milliards d'euros » en 2011, a souligné ce mardi Pierre Lellouche. Le résultat français masque « une tendance structurelle de dégradation du commerce extérieur français depuis dix ans », s'inquiète Philippe Martin, de l'Institut d'études politiques de Paris. En cause, « un problème de compétitivité" de l'économie nationale.
Le déficit extérieur cache l'aggravation du déficit industriel
La hausse du coût des importations d'énergie n'explique pas le nouveau record du déficit français. En 2008, la facture énergétique de la France était à peine plus élevée que celle de 2011. Pourtant le déficit extérieur s'est creusé en trois ans de près de 10 milliards d'euros. "C’est la dégradation du déficit industriel qui explique la quasi-intégralité du creusement du déficit commercial français depuis 2008", analyse Alberto Balboni du cabinet Xerfi.
L'innovation française à la traîne
"Il y a un problème clair d'innovation qui ne se résoudra pas du jour au lendemain", estime Philippe Martin. A prix égaux, les produits français ne sont pas compétitifs à l'exportation, dénonce l'expert de l'IEP de Paris. Qualité des produits, adaptation à la demande locale, innovation, la France marque le pas. Elle ne consacre que 2,2% de son PIB à la recherche, tandis que son voisin allemand y investit 2,8%. De plus les efforts français en matière de recherche servent surtout le secteur public.
Or pour endiguer ses déficits, la France devra baisser ses prix à l'exportation, prévoit Philippe Martin. Un tel ajustement par les prix pourrait avoir l'effet d'un cercle vicieux et défavoriser l'innovation. Les marges des exportateurs français sont en effet déjà très inférieures à celles de leurs collègues d'outre-Rhin. Les baisser encore plomberait leurs efforts d'investissement en recherche et développement.
Un tissue d'entreprises pas assez diversifié
Les exportations françaises ne sont tirées que par quelques secteurs : l'agro-alimentaire, le luxe et l'aéronautique et surtout par un petit nombre de très grosses sociétés telles que le groupe EADS. Derrière, le pays souffre d'un manque criant d'entreprises moyennes. La France compte aujourd'hui 117 000 entreprises exportatrices. C'est 13 000 de moins qu'en 2000.
Un modèle économique tourné vers le marché intérieur
Cette tendance est "liée à l’adoption, au cours des années 2000, d’un modèle économique basé sur le dynamisme de la consommation des ménages et des services, accélérant la perte de compétitivité à l’exportation et la désindustrialisation de l’économie française", analyse Alberto Balboni.
Claire Gandanger avec AFP