A Paris, l'atmosphère devient irrespirable dans les deux sens du terme. Il y a actuellement une alerte de pollution élevée aux particules fines et, en même temps, le gouvernement envisage de taxer le diesel - en partie responsable de cette pollution -, au même taux que l'essence. Pour les raffineries, ce rééquilibrage pourrait représenter une chance.
Dans un rapport dévoilé par Libération, la Cour des Comptes pointe la perte de recettes fiscales de près de 7 milliards d'euros en 2011, liée aux exonérations dont bénéficient les véhicules diesel. Tandis que l'essence est taxée à 60 centimes le litre, le gazole ne l'est qu'à 42 centimes. Le prix hors taxe d'un litre de gazole vaut cependant autant qu'un litre d'essence sans plomb.
Source : UFIP, DGEC
Une nouvelle fiscalité des carburants et une prime de reconversion sont dans les tuyaux du gouvernement. Ces mesures pourraient redonner des couleurs au secteur du raffinage, confronté à des fermetures de site depuis plusieurs années. La menace qui pèse sur la raffinerie Petroplus de Petit-Couronne en est la dernière actualité.
Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, a rappelé récemment le rôle stratégique du raffinage pour une France dont la facture énergétique culmine à plus de 61 milliards d'euros. « Sur cette somme, les importations de diesel représentent une facture de l'ordre de 10 milliards d'euros tandis que la France produit trop d'essence », commente Yves-Marie Dalibard, porte-parole de l'Union française des industrie pétrolières (UFIP).
L'impact social du diesel
Actuellement, huit raffineries françaises sont en activité. Selon les capacités, une raffinerie peut sortir 15 à 30 % d'essence et entre 25 et 40 % de gazole d'un baril de pétrole. « Mais comme la demande en France est de 20 % d'essence et de 80 % de gazole, nous sommes obligés d'exporter 4 millions de tonnes d'essence et d'importer 18 millions de tonnes de gazole de la Russie, les Pays-Bas et les États-Unis », explique Yves-Marie Dalibard, « chaque litre d'essence qu'on vendrait en France au lieu de l'exporter donnerait une rentabilité supplémentaire aux raffineries ».
Raffinerie de Donges (Loire-Atlantique) / Image Flickr Stéphane Matin
Mais, en raison de l'impact social du diesel qui représente 80 % des carburants en France, les autorités politiques ne pourraient imposer qu'un rééquilibrage progressif. Arnaud Montebourg a rappelé qu'on ne pouvait pas « pénaliser » les automobilistes qui ont acheté des voitures diesel à cause du prix plus avantageux à la pompe.
En plus du pouvoir d'achat des consommateurs qu'il faut prendre en considération, ce sont également les constructeurs automobiles français qui se sont spécialisés dans la construction de voitures diesel qui en souffriraient. Pour eux, toute mesure gouvernementale contre le diesel serait un « choc supplémentaire, souligne Yves-Marie Dalibard, vu la crise et l'état de santé du secteur automobile, il faut se demander si c'est vraiment le bon moment... »
Sonja Kättner-Neumann