L'avenir est incertain pour les 67 salariés de Teintures et blanchiments de Cernay (TBC). Ils risquent d'être licenciés si un plan de reprise n'est pas validé avant le 25 mars. Des cadres se disent prêts à reprendre leur entreprise mais leur plan se solderait par le licenciement d'au moins la moitié des salariés.
Crédit photo : Un compteur métrique textile. © Flickr / zigagzou76 / CC BY 2.0
Teintures et blanchiments de Cernay (Haut-Rhin) a été placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Mulhouse mercredi 8 février. Le tribunal a néanmoins prononcé une continuation de l'activité jusqu'au 25 mars, date à laquelle l'entreprise doit avoir trouvé un plan de reprise viable.
Une seule piste est à l'étude : celle de certains membres de la direction qui élaborent en ce moment un plan pour reprendre eux-mêmes leur entreprise. "J'ai cherché des investisseurs avant la liquidation mais quand on a une entreprise dans cette situation, ça ne se bouscule pas au portillon", déplore Martine Mutterer, la directrice de TBC. Elle est néanmoins confiante sur le projet des repreneurs. La directrice met en avant la connaissance précise de l'entreprise et de ses clients par ces cadres. "Il y a une carte à jouer", affirme-t-elle. Mais ce plan se traduirait par le licenciement d'au moins la moitié du personnel.
"Se bagarrer n'aurait servi à rien"
Les 67 salariés de l'usine de Cernay n'ont pas encore été officiellement mis au courant de cette coupe envisagée dans les effectifs. Ils ne sont cependant pas surpris. "On sait que c'est très difficile sur le marché du textile. Il y aura des licenciements, c'est sûr. Mais les gens restent pour l'instant à leurs postes, il n'y a pas d'arrêt de travail, pas de grève", affirme Céline Cloet, représentante du personnel au Comité d'entreprise et non-syndiquée, qui travaille depuis 10 ans sur le site de Cernay. Un autre salarié, ancien syndicaliste, affirme qu'ils auraient "pu se bagarrer mais ça n'aurait mené à rien".
Trouver un plan de reprise crédible est une urgence non seulement pour sauver les emplois mais aussi pour éviter à TBC d'avoir à payer des indemnités de licenciement. Martine Mutterer souhaite que les licenciés soient indemnisés par l'État : "La difficulté c'est de prendre en charge les indemnités du personnel qui a de l'ancienneté. Si il y a un repreneur, c'est l'AGS ( Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, ndlr) qui prendra en charge les indemnités."
TBC reçoit du textile de ses clients pour leur faire subir des traitements (teintures, blanchiment...). Depuis trois ans, l'entreprise cherche à regarnir son carnet de commande en diversifiant sa production. Cette direction sera confirmée par le plan de reprise. "Avant, nous faisions 100% d'habillement. Nous sommes en train de nous réorienter sur les textiles techniques pour nous diversifier : automobile, habillement professionnel, bagagerie de luxe. Ce processus sera développé dans le futur", explique Martine Mutterer.
Un sous-traitant de sous-traitant
"Pour le moment, on se sent soutenu par les pouvoirs publics, du moins dans les paroles", affirme la directrice du site. De son côté, Jean-Paul Omeyer, conseiller régional et premier adjoint au maire de Cernay estime que le projet de reprise par la direction est "potentiellement crédible". Il précise cependant que "les pouvoirs publics ne sont pas prêts à accepter n'importe quoi", et s'engage à "défendre un des derniers fleurons de l'industrie textile de la région".
L'entreprise alsacienne, créée en 1801, est une des nombreuses victimes collatérales de la crise. Dans la tourmente depuis 2007, date à laquelle un plan de continuation est prononcé par le tribunal de commerce, TBC respecte pendant quatre ans ses engagements comptables. Mais l'année 2011 voit les prix du coton doubler et les ventes chuter. Résultat : les clients de TBC ne peuvent plus alimenter le carnet de commande de l'entreprise. Déjà fragilisée, TBC ne peut plus échapper à la liquidation judiciaire. "Nous sommes dépendant des aléas du marché", commente Martine Mutterer. TBC est coincé au milieu de la filière textile, victime de son statut de sous-traitant de sous-traitant.
Simon Castel