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La Hongrie a repris le chemin du FMI. Une volte face plutôt embarrassante pour Victor Orbán, son premier ministre conservateur.Sitôt élu en 2010, ce dirigeant nationaliste avait tourné le dos à l'institution internationale. Avec éclat, il avait refusé de négocier la dernière tranche de six milliards de dollars du prêt consenti à Budapest sous l'ancienne législature socialiste. Les conséquences sont lourdes économiquement. Le court du forint, la monnaie nationale, a plongé. La Hongrie ne fait pas partie de la zone euro et ne bénéficie donc pas de la stabilité de la monnaie unique. Les taux obligataires ont flambé. Le pays est aujourd'hui dans la ligne de mire des agences de notation. En tête, Standard and Poor's menace de dégrader la note hongroise. Un tourbillon de mauvaises nouvelles qui a eu raison de l'inflexible Orbán. Le premier ministre hongrois vient de se tourner à nouveau vers le FMI. Il a fait une demande de prêt pour un montant qui se situerait entre 15 et 20 milliards de dollars. Les négociations débuteront à la mi janvier.
L'échec de la voie nationale
Il faut dire que le style du leader populiste, connu pour sa rhétorique anti-européenne, ne place pas la Hongrie en meilleure position vis-à-vis de la Commission européenne ou du FMI. Des observateurs à Bruxelles se sont fait l'écho de disputes entre Victor Orbán et José Manuel Barroso, le président de la Commission. « N’appréciant pas la méthode « Orbán », la Commission européenne a donné un coup de pouce au FMI. Ce dernier a cessé les négociations avec la Hongrie. », raconte une source bruxelloise. D'autres affirment que c'est la Hongrie qui a pris l'initiative de la rupture. Victor Orbán refuserait d' accepter les réformes structurelles et d'austérité imposées par le FMI.
Cette voie « nationale » choisie par le gouvernement hongrois, s'est révélée être un échec. Orbán a choisi d'appliquer une palette de mesures non-orthodoxes : forts impôts sur les banques, les télécommunications et les entreprises du secteur de l'énergie. Des secteurs jugés « captifs ». Il a aussi nationalisé des fonds de pension privés.
« De quoi le FMI a-t-il encore besoin ? »
Or, après un bref frémissement de reprise, l'économie hongroise a rechuté. La crise de la zone euro l'a atteinte de plein fouet. Facteur aggravant pour la Hongrie : la parité forint-franc suisse a connu une brusque détérioration. Un million de foyers hongrois sont aujourd'hui lourdement endettés suite à des prêts souscris dans la monnaie helvète. « Nous avions pris un crédit en franc suisse en 2008 pour refaire le toit de notre maison emporté par une tempête. », raconte Gyöngyi, une aide hospitalière. « Ce prêt est mon cauchemar. Sa première traite était de 45.000 forints (200 euros), et la banque disait qu'elle serait stable. Aujourd’hui nous payons le double. »
A la mi-novembre, Victor Orbán a avoué n'y plus rien comprendre. Selon le site d'information index.hu, il aurait affirmé au président du Conseil budgétaire Zsigmond Járai : « je ne comprends pas, le découvert a diminué. De quoi le FMI a-t-il encore besoin ? ». Et Járai de répondre : « prévisibilité, confiance, fiabilité ». Fin 2011, la Hongrie semble n'incarner aucune de ces valeurs.
Mària-Dominique Illés
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Sylvain Barrette : « Si la BCE n'agit pas, l'Italie s'effondre. »
Sylvain Barrette est directeur du département « contrôle du crédit » à DWS, le gestionnaire des fonds mutuels de la Deutsche Bank à Francfort. Acteur des marchés, il considère que l'action de la BCE ne doit pas se substituer aux mécanismes de la croissance.
« Les marchés souhaitent que la BCE s'investisse beaucoup plus dans le rachat de dette souveraine des pays en difficulté. Mais en même temps, ces derniers ne lui accorderaient plus aucune crédibilité si elle renonçait à son indépendance en cédant. On n'est pas à une contradiction près... ». Pour ce Canadien expatrié depuis une dizaine d'années en Europe, qui a vécu le déficit abyssal de son pays dans les années 1990, la solution est politique. « Il faut des coupes budgétaires sévères, des mesures d'austérité, mais elles doivent être couplées à des mesures de croissance. Et, pour l'instant, les marchés n'en perçoivent que très peu. »
Son modèle européen, c'est Angela Merkel, la chancelière allemande : « Les Anglo Saxons recherchent tous des mesures faciles (euro-bonds, quantitative easing) ; mais ces choses là ne sont pas une solution à long terme et la chancelière ose le dire. Si on ne s'attelle pas concrètement au problème de l'endettement dès maintenant, la crise va durer au moins jusqu'en 2020. »
Le message est clair : les gouvernements doivent faire preuve de courage politique. « La BCE doit veiller à ne pas repousser le problème pour des pays qui ne le méritent pas. Si elle continue longtemps à les assister, ils ne feront jamais d'efforts pour se restructurer. »
Pourtant, alors que l'ombre d'une dette colossale se profile sur la péninsule italienne, la BCE est encore considérée comme l'ultime rempart à l'explosion : « A court terme, celle-ci n'a pas le choix. Si elle n'agit pas, l'Italie s'effondre. Actuellement, elle a acquis un peu plus de 200 milliards d'euros de dette souveraine. Grâce aux importants dépôts des banques, qui n'osent plus se prêter entre elles par manque de confiance, la BCE pourrait acheter jusqu'à 500 milliards de dette sans trop faire marcher la planche à billets et sans créer trop de risque d'inflation. »
Le 20 novembre 2011, les socialistes espagnols perdent les élections législatives. Retour sur les événements qui ont mené le gouvernement de José Luis Zapatero à sa perte.
Les acteurs du marché de la dette souveraine européenne s’accordent encore à considérer la dette française et allemande comme des produits extrêmement sûrs. « Mais si la crise s'aggrave, il n’existera plus aucune garantie fiable pour se refinancer en liquidités », estime Pierre Cailleteau, managing director chez la banque d’affaire Lazard International.
Une inquiétude relayée par l’ancien président de la BCE, Jean-Claude Trichet en octobre : « Il faut restaurer la crédibilité de la signature souveraine. Le temps nous est compté et il est important de prendre des décisions claires. Cette crise est devenue systémique ». Trois mois plus tard, cette crédibilité est plus que jamais en danger.
Guillaume Clere
Le siège de la rédaction financière du Handelsblatt se dresse fièrement sur Eschersheimer Landstrasse. Le quotidien économique allemand, basé à Francfort, se porte bien et la crise n'y est pas pour rien. Véritable voix des marchés, ce quotidien, propriété de Holtzbrinck, troisième groupe de presse allemand, a vu son tirage augmenter de près de 10% en un an. Le journal doit désormais composer avec un nouveau lectorat. Oliver Stock, rédacteur en chef online d'une plateforme en plein essor, détaille cette évolution.
Finalement, pour vous la crise est une aubaine ?
Oui, on peut dire ça, nous avons gagné en lecteurs depuis 2008. La crise est dans toutes les bouches, les gens sont avides d'information et surtout d'explications. L'usage de la presse financière a évolué avec la crise, elle est devenue plus qu'un outil de travail pour le monde économique. Nous avons gagné un nouveau lectorat et particulièrement sur le web. Cette année nous avons enregistré 60millions de pages vues sur le site internet du journal, soit le double par rapport à l'année dernière.
Cet élargissement du public a-t-il modifié votre manière de travailler ?
Cela nous pousse effectivement à adapter notre écriture, à expliquer les termes de la finance avec des mots simples. Il est vrai qu'avant la crise nous nous posions moins de questions, nous avions un lectorat bien identifié d'initiés. Maintenant, nous devons nous renouveler, par exemple, expliquer tous les jours ce qu'est un eurobond. Dernièrement, nous avons titré «My name is Bond, eurobond!»
Quelle relation entretenez-vous avec les acteurs de la place financière de Francfort ?
C'est très simple, nous avons besoin les uns des autres, donc nous nous parlons d'égal à égal. Nous sommes en liaison permanente avec les acteurs des marchés. Nous avons besoin d'informations exclusives et solides, et eux ont besoin de nous pour s'exprimer. Et puis, nous sommes liés aussi par la publicité financière qui constitue 35% de nos annonces. Quand les marchés vont mal, nous aussi! Sur un autre plan, si nous publions un papier critique sur un annonceur, nous nous exposons au risque de perdre le contrat publicitaire. Heureusement, notre groupe de presse (Holtzbrinck Verlagsgruppe) est assez important pour que l'on reste indépendant de l'industrie financière.
Marion Kremp et Laure Siegel à Francfort
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Les banques continuent à avoir besoin des garanties des Etats. Il leur faut rassurer les marchés financiers sur leur solvabilité pour emprunter à moindre coût. En 2008 et 2009, la Commission européenne a établi les règles du jeu qui permettent aux gouvernements d'aider le secteur bancaire. Face à une situation financière toujours critique, elle a décidé le 1° décembre de prolonger ces règles du jeu, arrivées aujourd'hui à échéance.
La Commission européenne, l'Autorité bancaire européenne (ABE) ainsi que la Banque centrale européenne (BCE) ont conseillé aux ministres des finances européens d'opter pour une garantie conjointe et solidaire. L'idée a été rejetée fin novembre en conseil Ecofin, notamment par les pays en relative bonne santé financière, comme la France ou l'Allemagne, qui refusent de prendre des risques pour les autres. Les ministres des finances ont décidé que chaque Etat pourra seul continuer à garantir les dettes à long terme de ses propres banques. Un montant minimal de rémunération des Etats par les banques a également été fixé. Il sera proportionnel à la qualité du crédit des pays.
Concrètement, les banques allemandes devront payer le soutien de leur Etat plus cher à leur Trésor que les banques italiennes au leur. La logique des gouvernements européens n'a pas changé depuis le début de la crise. Face au danger, pas d'entraide, chacun pour soi.
Fanny Bleichner et Magali Fichter