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« Ces propos sont clairement diffamatoires mais on ne les calcule pas, on ne veut pas faire monter les tensions », tempère, tracts en mains devant le Studium, le président de l’EMF Fahad-Raja Muhammad. Il a repris l’association il y a six mois et c’est la première fois qu’il participe à une élection Crous. « Le climat est clairement tendu. Il y a de la violence des deux côtés, pas que de l’UNI. Nous, on fait des prises de paroles pour apaiser tout le monde, on dit aux adhérents de faire attention et on essaye de profiter au maximum de ce moment », explique-t-il.

Du côté de l’Alternative étudiante Strasbourg (AES), Rayane Slimani, le porte-parole de l’association, se rappelle de moments de tensions lors des blocages liés à la réforme des retraites : « On s’est senti en danger. Il y a eu des insultes, des intimidations physiques de la part de l’UNI. » L’étudiant en physique, membre de l’AES depuis 2022, ne connaissait pas l’organisation en arrivant à Strasbourg en 2021. « Depuis cette rentrée, on les voit plus, au niveau de la fac de droit, de Sciences Po. J’ai peur pour mes camarades. Mais ça donne encore plus de sens à notre mobilisation. On doit tout faire pour que l’UNI n'ait pas de siège », assure-t-il en regardant d’autres membres tracter devant le restaurant universitaire de l'Esplanade. 

« L’UNI tracte devant l’assemblée générale »

Le 7 février, une assemblée générale sur la loi immigration rassemblait plusieurs organisations syndicales à l’Institut Le Bel sur le campus. Solidaires, qui y est alors présente, indique, peu de temps avant la réunion, mettre en place un barrage filtrant. En plus, trois agents de sécurité, sous contrat avec l’université, surveillent les alentours. À l’intérieur, la réunion commence avec du retard. Rapidement, les violences récentes sont inscrites à l’ordre du jour. Un syndicaliste de la CGT, dont les cheveux blancs contrastent avec la cinquantaine d’étudiants réunis, prend la parole et propose de voter une motion pour condamner les violences, autant celle devant le restaurant univeristaire que l’agression antisémite. Rapidement, le débat se concentre sur ce premier épisode. Certains étudiants argumentent sur l’absence d'un caractère discriminatoire. D’autres sur l’UEJF qui serait « problématique » de par notamment son soutien à Israël. La motion qui condamne les deux violences ne sera finalement pas votée. 

S’ensuivent différents points, avant qu’une nouvelle commence à circuler dans les rangs : des membres de l’UNI seraient devant les portes. Un étudiant présent raconte : « La personne qui gère la parole à la tribune a expliqué que les membres de l’UNI tractaient dehors. Plusieurs personnes de Solidaires et de FSE sont sorties pour les empêcher. La majorité a décidé de continuer la réunion et de ne pas sortir.» Mais finalement, aucun membre de l’UNI n’était présent devant l’amphithéâtre de l’Institut Le Bel, évitant ainsi une nouvelle altercation.

Jade Lacroix

Édité par Adélie Aubaret

 

Le communiqué indique qu’un « militant a été roué de coups pendant de longues minutes » et qualifie Solidaires de « révolutionnaires du dimanche » et de « voyous ». L’organisation dit également avoir alerté la police. Une information que confirme Solidaires. Contacté sur l’altercation, l’UNI n’a pas répondu à nos sollicitations. 

Une réaction mesurée de l’Université et du Crous

À la suite de l’altercation, qui a lieu devant sa résidence et son restaurant universitaire, le Crous de Strasbourg a publié un communiqué le 6 février. Il rappelle que « toute forme de violence, de diffamation ou de manipulation est strictement prohibée ». 

Un communiqué auquel a répondu Solidaires sur le même réseau social : « Comme c’est simple de cacher son immobilisme derrière la condamnation de la violence sans jamais condamner les auteurs ni leurs idées réactionnaires. » Contactée, l’Université nous a indiqué qu’elle allait recevoir les étudiants concernés pour en savoir plus et réaliser un message commun avec le Crous.

L’association SOS France Victimes 67 a l’habitude d’intervenir auprès des étudiants. Elle organise des ateliers de prévention en majorité sur les violences sexistes et sexuelles. Elle tient aussi une permanence à la Maison de la proximité, juste en face du campus de l’Esplanade. « Je suis en poste depuis 5 ans et c’est la première fois qu’il y a de telles violences entre les organisations syndicales », s’étonne Faouzia Sahraoui, directrice générale de l’association.

Une agression antisémite une semaine auparavant

En une semaine, ce n’est pas la première agression physique qui a eu lieu sur le campus de l'Esplanade. Dans la nuit du dimanche et du lundi 29 janvier, trois étudiants juifs ont été agressés alors qu’ils étaient en train de coller des affiches appelant à la libération des otages du Hamas en Israël. Un des trois étudiants, membre de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), a été roué de coups. Selon les victimes, le groupe a été injurié de « fascistes sionistes » à plusieurs reprises. Lundi 29 janvier, les trois étudiants ont déposé plainte, pour « violences aggravées » et « injure publique envers un particulier en raison de sa race, de sa religion ou de son origine », relate Rue89 Strasbourg. 

Solidaires se veut anti-raciste et affiche clairement son soutien à Gaza. Au contraire de l’UNI, qui recouvre fièrement de ses affiches les messages « Halte au massacre à Gaza ». L’organisation avait vivement réagi suite à l’agression jugée antisémite : « Une fois de plus, l'islamisme a frappé des étudiants juifs sur le campus de l’université .» Dans la publication, elle avait apporté son soutien aux victimes et avait incité à voter « contre l’islamo-gauchisme ». L'organisation est soutenue par les figures de l’extrême-droite locale. Sur X (ancien Twitter) le compte Haut-Rhin du parti politique d’Eric Zemmour, Reconquête!, appelait à voter pour UNI dans un post daté du 1er février. Tout comme le responsable Rassemblement national de la 3e circonscription du Bas-Rhin. 

Un climat de tension ressentie par les autres organisations 

Dans un communiqué publié sur son compte, l’UNI assimile l’association des Étudiants musulmans de France (EMF) aux Frères Musulmans. Elle accuse : « L’EMF adopte une allure respectable [...] mais pour camoufler en réalité sa volonté d’islamiser progressivement le campus. »

En une semaine, deux agressions ont agité le campus de l’Esplanade, à Strasbourg. L’une contre des étudiants juifs, l’autre entre des militants mobilisés pour les élections du Crous. Ces élections, qui ont lieu du 6 au 8 février, sont un moment de mobilisation majeur pour les associations étudiantes, qui espèrent obtenir des sièges dans le conseil d’administration de l’institution. Ils sont renouvelés tous les deux ans. Les  Crous sont des organisations publiques au cœur de la vie étudiante, qui proposent différents services comme la restauration et le logement. 

Ces élections sont l’occasion pour les organisations étudiantes de se côtoyer au quotidien lors de leurs opérations de tractage. Les lieux ciblés sont souvent les mêmes, peu importe la structure : la bibliothèque du Studium, les restaurants universitaires Crous Esplanade et Paul Appell… Là où l’affluence est la plus importante. Les associations militent alors côte à côte, créant parfois des étincelles. 

Deux plaintes déposées

C’était le cas le lundi 5 février. Il est 11h40 lorsque des membres de l’UNI, un mouvement étudiant de droite, et Solidaires étudiant.e.s, une organisation « de lutte » classée à l’extrême gauche, se retrouvent inopinément devant le restaurant universitaire de l'Esplanade pour tracter. Solidaires est là pour appeler à la mobilisation contre la loi immigration et l’UNI pour inciter à voter pour leur liste. Des membres de Solidaires commencent alors à entonner des champs anti-racistes et à récupérer les tracts de l’UNI.

11h50, la tension monte, selon une militante de Solidaires qui souhaite rester anonyme. Elle raconte avoir reçu un coup sur le visage d’une membre de l’UNI. « Le coup a fait tomber mes lunettes, j’étais sonnée. Pour m’aider, une camarade a attrapé les cheveux de la militante de l’UNI et l'a tirée en arrière pour qu’elle me lâche. Elle a reçu aussi un coup au visage. Un autre membre de Solidaires a été bousculé en voulant s’interposer. En partant, l’un des membres de l’UNI nous a dit “lèche mon cul salope” », raconte l’étudiante le lendemain de l’agression. « Depuis, j’ai peur de les recroiser », ajoute-t-elle. Selon Solidaires, les deux étudiantes agressées ont porté plainte suite à l'altercation. 

Des militants de l’UNI « sauvagement agressés »

Dans un communiqué publié dans la foulée sur le compte Instagram de l’UNI, une plateforme particulièrement utilisée par les associations étudiantes, l’organisation dément cette version des faits : « Aujourd’hui à midi, nos militants de l’UNI Strasbourg ont été sauvagement agressés par des militants de Solidaires ». 

Tout est bien qui finit bien, pour les personnages…et pour moi

Dernière remarque, et pas des moindres : j’ai tout compris. Les chants sont sous-titrés sur un écran, visibles depuis tous les fauteuils de la salle. Les solistes sont très expressifs, et l’intrigue se déploie avec clarté. Sans vouloir spoiler, tout est bien qui finit bien.

Je serais bien incapable de juger le niveau des chanteurs, mais je dois avouer que les voix m’ont impressionnée. L’interprète de Polyphème, José Coca Loza, a performé malgré une pharyngite. Sans lui, il aurait fallu annuler la représentation car peu de solistes connaissent ce répertoire, nous a-t-on expliqué en préambule. Franco Fagioli, qui incarne Acis, l’amant de Galatée, a été ovationné pendant de longues minutes. C’est lui qui incarnait le rôle pensé pour un castrat – il est contre-ténor – et qui a notamment entonné le célèbre air Alto Giovo en fin d’opéra. Un peu long tout de même. La fin est donc arrivée à point nommé au bout de trois heures.

Polifemo de Nicola Porpora est encore joué vendredi 9 et dimanche 11 février à l’Opéra national du Rhin, puis à Mulhouse et Colmar. Profanes de l’opéra, n’hésitez pas.

Clara Grouzis

Édité par Jade Lacroix

Des spectateurs pas si coincés que ça

J’ai ri pendant certaines scènes. J’ai ri parce que c’était drôle. J’ai ri avec les autres spectateurs quand la nymphe Calypso enferme Ulysse dans une cage, avec un air dominateur, ou qu’elle pose sa main au niveau de l’entrejambe du héros avant de s’excuser auprès du public. J’ai ri quand le cyclope Polyphème se délecte du nectar offert par la nymphe et le fait savoir dans le micro, en poussant des gémissements de satisfaction. Et j’ai ri quand Ulysse a débarqué sur son navire en carton avec un costume de muscles en plastique.

Pour la première française de cet opéra, Bruno Ravella, le metteur en scène, a pris le parti de s’inspirer des péplums des années 1960. Le rideau s’ouvre sur un plateau de cinéma italien. Un réalisateur autoritaire, Polyphème, et Ulysse, un acteur en veste en cuir adulé, qui a des airs de John Travolta, tournent un péplum sur les aventures d’Ulysse. Dans une mise en abyme originale, l’autre épisode mythologique se déroule entre techniciens et acteurs une fois la caméra éteinte.

Cette dimension parodique se révèle en réalité assez efficace. Elle implique des décors assez impressionnants, tous réalisés dans l’atelier de l’Opéra du Rhin à Strasbourg, dans le quartier de la Meinau. Je revois notamment la montagne du cyclope, devant laquelle les figurines d’Ulysse et ses compagnons s’inclinent. Cette mise en scène rend aussi l’opéra prenant, et étonnamment accessible. Il suffit d’avoir vu les grands péplums des années 1960, ou juste Gladiator. En outre, le réalisateur du péplum a un côté harceleur, qui a tout de suite réveillé en moi le souvenir des scandales #Metoo. Épris de Galatée qui, elle, est éperdument amoureuse d’Acis, il harcèle la première et se venge contre le second. Un parti-pris résolument moderne.

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