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Ce mercredi 10 mai, l’Association parlementaire européenne (APE) organisait une conférence sur les priorités du Parlement européen, à un an des élections en 2024. Devant 150 personnes, Valérie Hayer (Renew, libéraux), Gwendoline Delbos-Corfield (Les Verts, écologistes) et José Manuel Fernandes (PPE, droite) ont chacun développé leurs priorités pour cette dernière année de mandat.
« Ce qui manque à l’Europe, ce sont des projets communs, une vraie union sur la défense, sur la protection civile », s’exclame José Manuel Fernandes (PPE, droite). Il interpelle le public « sur la question des feux de forêts. Vous préférez un avion Canadair par État ou 27 avions pour un pays qui en a besoin à un moment précis ? » Gwendoline Delbos-Corfield confie, elle, ses préoccupations sur le plan démocratique : « en 2024, la Hongrie va prendre la présidence du Parlement pour 6 mois. Mais elle n’est plus considérée comme une démocratie, il y a des dérives, et personne ne parle de cette présidence ».
Les eurodéputés se sont ensuite livrés au jeu des questions réponses avec le public. « On sentait bien les points de fractures entre les députés, sans langue de bois. J’ai appris des choses, c’est intéressant d'avoir des débats de fond sur l’écologie, la corruption » confie Florence, juriste, qui a participé à l’évènement. Pour les Jeunes européens, co-organisateurs de l'évènement, c'est une réussite : « L’idée était de faire le lien entre les citoyens et les députés ». Même si les participants étaient déjà conquis par l’Europe, ce que reconnaît l'association, les objectifs sont atteints.
Les eurodéputés ont fait un premier pas vers la régulation de l’intelligence artificielle (IA). « Nous sommes sur le point de mettre en place une législation historique qui doit résister au défi du temps », déclare l’eurodéputé Brando Benifei (S&D, Italie).
Leur projet vise d’abord à interdire les systèmes et pratiques « contraires aux droits fondamentaux », tels que l’exploitation des personnes vulnérables ou les systèmes de « score social » appliqués dans des dictatures comme la Chine. Cela consiste en une notation des citoyens par des critères tels que l'ethnie, la profession, les positions politiques... Patrick Breyer, membre du parti pirate allemand et des Verts européens s’est réjoui « d’un vote historique pour prévenir l'avenir dystopique de la surveillance biométrique de masse en Europe à la chinoise. »
Les eurodéputés se sont aussi penchés sur la question des technologies accessibles à tous comme ChatGPT, qui suscite autant de fascination que d’inquiétude. Selon eux, ces logiciels devraient répondre à des exigences précises en termes d’information et de protection des droits fondamentaux, de la santé et de la sécurité ainsi que de l’environnement.
Pour permettre à l’Europe de rester innovante face aux autres géants de l’IA, les eurodéputés proposent plusieurs exemptions à ces règles. Les chercheurs pourraient ainsi effectuer des tests de leurs systèmes d’IA « dans des environnements contrôlés et établis par les autorités publiques. »
L’ensemble du Parlement devra statuer définitivement sur ce projet lors de la plénière de juin.
L’eurodéputé Vert français François Alfonsi tire la sonnette d’alarme sur la situation du bassin méditerranéen. Dans le rapport qu’il a présenté au Parlement européen ce mardi, beaucoup de chiffres inquiètent : déversement de 200.000 tonnes d’hydrocarbures et de 730 tonnes de déchets, augmentation de 20% de la température de l’eau, réduction du nombre de mammifères marins de 41 %... « Si l’Europe reste plus longtemps passive, la situation continuera de se dégrader » déclare François Alfonsi, en soulignant la responsabilité de l’Union européenne dans la gestion de la Méditerranée.
Parmi les conséquences directes en cas d’inaction, il énonce des risques d’insécurité alimentaire et de déplacement climatique pour les 250 millions d'habitants qui vivent et dépendent du pourtour méditerranéen. Afin de remédier à ces problèmes, son rapport propose une meilleure cohésion des politiques et autorités locales méditerranéennes. Approuvé par les députés européens à une grande majorité, il sera donc étudié par la Commission européenne à Bruxelles, ce qui donnera lieu à une loi, ou non.
« Il est temps de prendre des décisions historiques en matière d’égalité entre les genres. » La Suédoise Arba Kokalari (PPE, droite) s’est positionnée clairement en faveur de la ratification de la convention d’Istanbul, à la tribune du Parlement européen le 10 mai dernier. Cette convention a pour but de prévenir et combattre les violences à l’égard des femmes, des filles et de la violence domestique. C’est le premier texte de loi qui oblige réellement les États membres à réagir, en mettant en place des mesures de soutien par exemple. La convention a été signée il y a six ans, mais seuls 21 des 27 l'ont ratifiée à ce jour. Parmi ceux opposés à la convention : la Bulgarie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Slovaquie et la République Tchèque. Leur argument : la convention d’Istanbul serait une menace pour la famille dite traditionnelle. Face à l’obstruction de ces pays, le Parlement a voté pour la ratification malgré tout. Les eurodéputés poussent l’Union à adhérer à la convention sans que tous les États membres soient d’accord.
Autre débat clivant chez les parlementaires : la philosophie même de l’Union si elle adoptait ASAP. Selon des eurodéputés de gauche, le plan tend à créer sur le long terme une capacité de défense européenne indépendante, notamment en matière d'armement. Un tournant pour l’institution, idéologiquement pacifiste. Pierre Haroche, spécialiste en relations et sécurité internationales à l’université Queen Mary de Londres, estime que « le cœur de l’Europe est désormais tourné vers sa capacité à résister à ceux qui font la guerre en dehors de ses frontières », comme la Russie ou la Chine.
Fanny Gelb et Mina Peltier
Le parti écologiste, par la voix de l’eurodéputée Hannah Neumman, soulève un autre problème : « ces entreprises [d’armement] qui engrangent des milliards d’euros par an n’ont pas besoin de l’argent du contribuable. Nous ne devrions pas leur donner. » Sur la même ligne, le groupe d’extrême gauche La Gauche, en sa co-présidente Manon Aubry, favorable au plan ASAP, a mis en garde contre un « risque de superprofits [des entreprises du secteur] important et inquiétant ». Une solution est ainsi proposée par les Verts : « coupler l’investissement avec une taxe sur les superprofits ».
L’eurodéputé Pascal Canfin de Renew (libéraux) tente, lui, de dépasser les clivages. Il invite le Parti populaire européen à approuver le « paquet de solutions » de la Commission européenne, « avec les Socialistes et pourquoi pas les Verts ». Il insiste : « Nous avons déjà réussi à trouver des accords sur la mobilité et l’industrie. L’écologie est un sujet qui devrait nous réunir plutôt que de nous diviser ».
Milan Derrien et Coline Playoust
Sa collègue des Socialistes et Démocrates, Iratxe Garcia Pérez, n’est pas en reste. Elle dénonce le « négationnisme climatique de la droite et de l’extrême droite ». « Quel avenir pour l’agriculture si ces politiques font des écosystèmes de véritables déserts ? », lance-t-elle, rappelant les records de chaleur qui malmènent également les rendements agricoles.
Chez The Left (extrême gauche), la co-présidente du groupe Manon Aubry n’a pas de mots assez durs et accuse le PPE de défendre les « superprofits du secteur agroalimentaire ».
Les diatribes de la droite sont reprises par les eurodéputés d’extrême droite. « Les agriculteurs ont déjà fait beaucoup d’efforts pour réduire l’usage des pesticides, assure Gilles Lebreton du groupe Identité et Démocratie (extrême droite). On devrait s’inquiéter plus largement de la perte du sens de la réalité de la Commission. Votre stratégie est inadaptée. Mais votre orgueil et votre certitude de savoir mieux que les peuples vous empêchent de l’admettre. »
« C’est incroyable cette position du PPE »
« C’est incroyable cette position du PPE, répond Martin Hausling du groupe écologiste. Pas un seul mot sur le réchauffement climatique. Pas un mot non plus sur la crise de la biodiversité. Ce que vous faites aujourd’hui, ce sont de petites manigances pour prouver la pertinence du modèle agricole actuel », martèle-t-il dans des grands gestes en direction des bancs de la droite.