51,9 % contre 48,1 % : c’est le résultat serré de l’élection présidentielle en République tchèque. Miloš Zeman, pro-russe, l’a emporté sur le pro-européen Jiří Drahoš. Pendant la campagne électorale, la politique migratoire était au cœur des débats. Le nom de "Visegrád" est désormais le symbole de l’opposition à la politique migratoire européenne décidé à Bruxelles.
Le Groupe de Visegrád regroupe la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie. Fondé en 1991 en vue d’accélérer l’intégration européenne, ce groupe revendique aujourd’hui la fermeture pure et simple des frontières extérieures à l'UE.
Les quatre membres du groupe de Visegrad se sont opposés à Bruxelles dès l’annonce des quotas pour l’accueil des réfugiés, en septembre 2015. L’Union européenne avait alors décidé de répartir sur deux ans l'accueil de 120 000 réfugiés arrivés en Italie et en Grèce, et ce entre tous les États membres. Suite à un accord entre l’UE et la Turquie en mars 2016, le nombre avait été ramené à 100 000.
La Slovaquie et la Hongrie proposaient une autre solution, plus radicale : la fermeture des frontières extérieures de l’UE. La Hongrie, pour sa part, construisait déjà une clôture de quatre mètres de haut et de 175 kilomètres de long à la frontière serbo-hongroise. La réponse des États de Visegrad à ce qu’ils nomment la crise migratoire était claire : pas de réfugiés et surtout pas de réfugiés musulmans dans leurs pays chrétiens. Longtemps critiqué par les autres membres de l’UE, le discours du groupe de Visegrad semble aujourd'hui gagner du terrain dans le débat européen.
Le vent a tourné
« Forcer les États à accueillir des réfugiés ne fait pas avancer l’Europe. Si on continue comme ça, on divise l’Union européenne encore plus. Les États membres devraient décider eux-mêmes du nombre de personnes qu’ils accueillent », expliquait par exemple Sebastian Kurz, le nouveau chancelier autrichien des conservateurs, au journal allemand Bild am Sonntag, après son intronisation mi-décembre 2017.
Par ailleurs, Donald Tusk, le président du Conseil européen, avait adressé une lettre aux États membres, à la mi-décembre 2017 dans laquelle il stipulait que « les quotas obligatoires se sont révélés être un facteur de division (…) Pour cette raison, ils s’avèrent être inefficaces ». Une déclaration critiquée entre autres par le président de la Commission, Jean-Claude Juncker.
L’Allemagne commence elle aussi à prendre ses distances avec les quotas. « L’unité européenne est plus importante que de satisfaire des quotas de réfugiés », a déclaré Wolfang Schäuble, le président du parlement allemand et ancien ministre de l’économie, dans une interview du 23 Janvier au quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung.
L’échec de la politique de quotas
A la fin du programme de répartition des migrants en septembre 2017, seulement 33 000 réfugiés ont été relocalisés, selon le Ministre de l’intérieur allemand, cité par le FAZ.
L’Allemagne a accueilli 10 265 des 27 536 réfugiés qu’elle était censée recevoir. La France, quant à elle, a accueilli 4 278 des 19 714 réfugiés prévus sur son sol. Malte reste le seul État membre à n'avoir pas tenu ses engagements.
La Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie, à quelques exceptions près, n’en ont accueilli aucun. Début décembre 2017, la Commission européenne a renvoyé les pays du groupe de Viségrad, sauf la Slovaquie, devant la Cour de justice de l'Union européenne.
« La Hongrie n'a pris aucune mesure depuis le début du programme de relocalisation et la Pologne n'a procédé à aucune relocalisation, ni offert aucune place depuis décembre 2015. La République tchèque n'a procédé à aucune relocalisation depuis août 2016, ni offert aucune nouvelle place depuis plus d'un an », constate la Commission dans un communiqué, qui ne dispose d’aucun moyen de coercition, si ce n'est le « shame and blame » (humilier et accuser). Sans grands résultats jusqu’à présent.
Ferdinand Moeck