La famille d’un couple tué par un immigré sans papiers était présente mardi à Washington D.C. pour le discours de Donald Trump sur l’état de l’Union. Ce n’est pas la première fois qu’un président envoie un message politique avec son choix d’invités.
Le président américain Donald Trump a commencé son troisième discours sur l’état de l’Union, mardi 5 février devant le Congrès, avec un appel à l’unité entre les républicains et les démocrates. Mais il suffisait de regarder autour de la salle pour voir l’évidence des divisions toujours présentes au cœur de la politique américaine.
Le choix des invités – la famille d’un couple tué par un immigré sans papiers – ne laisse aucun doute sur la détermination du président. Il n’abandonnera pas son projet d’un mur sur la frontière avec le Mexique, dont le désaccord sur le financement a causé la fermeture du gouvernement américain pendant 35 jours. Les invités pour faire passer des messages : depuis les années 1980, c’est un moyen pour un président d’afficher ses priorités.
Début d’une coutume
Si le premier discours sur l’état de l’Union a été prononcé par George Washington en 1790, c’est à Ronald Reagan que l’on doit la tradition d’honorer des invités, selon le magazine Time. En 1982, le président républicain accueille Lenny Skutnik, un fonctionnaire qui a plongé dans le fleuve Potomac à Washington pour sauver une femme, après qu’un avion a percuté un pont. Dans son discours, Ronald Reagan avait alors loué « l’esprit de l’héroïsme américain ».
Faire avancer son programme
La stratégie a évolué avec les années, d’une célébration des valeurs américaines, à l’appui d’un programme législatif. En 1999, Bill Clinton invite alors Rosa Parks, figure du mouvement des droits civiques aux Etats-Unis, dont la présence souligne l’engagement du gouvernement à combattre la discrimination. « Pour la plupart d’entre nous qui sommes là aujourd’hui, ce parcours a commencé il y a 43 ans, lorsqu’une femme qui s’appelle Rosa Parks s’est assise dans un bus dans l’Alabama et a refusé de se lever », affirme-t-il. Après plusieurs minutes d’applaudissements de tous les côtés, le président Clinton demande au Congrès de renforcer les lois anti-discrimination.
Barack Obama convie lui aussi des citoyens américains qui incarnent son programme politique. En 2015, le couple présidentiel accueille Astrid Muhammed, « une mère de deux jeunes enfants, qui est encore vivante aujourd’hui grâce en grande partie aux soins qu’elle a reçu, rendus possibles par l’Affordable Care Act », la réforme controversée du système de santé américain, selon la Maison-Blanche.
Chaise vide
L’absence d’invités peut aussi être un symbole fort. Pour son dernier discours sur l’état de l’Union, en 2016, le président Obama avait laissé un siège vide, en hommage « aux victimes de la violence par armes à feu qui n’ont plus de voix ». Ses huit ans à la Maison-Blanche ont été marqués par de nombreuses tueries de masse, et l’impossibilité de faire passer des lois sur le contrôle des armes à feu. Chaise vide aussi pour le président George W. Bush en 2003, en hommage aux victimes des attentats du 11 septembre 2001.
La guerre des symboles
Mais si les invités du président bénéficient d’une plus grande visibilité, les sénateurs et les élus de la Chambre des représentants sont également accompagnés par des invités, et leurs choix sont tout aussi symboliques. Mardi dernier, les démocrates ont pris le contre-pied de Donald Trump en invitant ceux qui ont subi les conséquences de la politique du président. Parmi les convives, deux anciennes employées sans papiers du club de golf de Donald Trump dans le New Jersey ; et un militaire transgenre, alors que le président souhaite empêcher les personnes transgenres de servir dans l’armée. Des symboles forts choisis par l’opposition qui se prépare déjà à affronter Donald Trump en 2020.
Martin Greenacre
Crédit photo: Riordan KJ, Wiki Commons