Après huit années au pouvoir, l’alliance de gauche suédoise est en passe de laisser sa place au bloc de droite. Pour la première fois, le parti d’extrême droite SD (Démocrates de Suède) et son allié de droite pourraient prendre les rênes du gouvernement. La presse internationale réagit vivement face à ce tournant historique.
Jimmie Åkesson, leader du parti d'extrême-droite SD (Démocrates de Suède) Photo Creative Commons
Dimanche 11 septembre la Suède est allée aux urnes pour élire son nouveau parlement. Pour la première fois, la tête du gouvernement pourrait revenir à la droite. Les résultats définitifs sont attendus mercredi 14 septembre dans la soirée. Mais « la course politique pour former le prochain gouvernement suédois ne pourrait pas être plus serrée », rapporte la chaîne de télévision Euronews. A l’heure des derniers décomptes des votes par correspondance, seulement 60 000 voix séparent le bloc de droite (SD, Modérés, chrétiens-démocrates et libéraux) et l’alliance de gauche (Sociaux-démocrates, Parti de gauche, Verts et parti du centre).
Pour le magazine allemand Der Spiegel, la droite est pourtant déjà la grande gagnante de ces élections législatives. Le parti nationaliste SD est devenu la deuxième force politique derrière les sociaux-démocrates de la première ministre sortante Andersson. Avec le jeu des alliances politiques, c’est cependant le bloc de droite qui devance pour l’instant d’une très courte tête la gauche. D’après les résultats provisoires de l’élection, le bloc de droite obtiendrait pile la majorité absolue au parlement, soit 175 des 349 sièges, contre 174 sièges pour l’alliance de gauche.
Une campagne marquée par le thème de la violence armée
Problèmes d’intégration des immigrés, montée en puissance de la criminalité et règlements de compte entre gangs... La campagne électorale a été marquée par des thèmes favorables au parti nationaliste SD, analyse Le Parisien. Certaines de ses propositions anti-immigration sont désormais tolérées et même reproduites par d’autres formations. La BBC note que « depuis le début de l’année, 47 personnes sont mortes dans des fusillades dans le pays, soit plus que pour toute l'année 2021 ».
Alors que le Parti social-démocrate était le vainqueur historique de toutes les élections depuis plus d’un siècle, l’année 2022 pourrait marquer un tournant sans précédent dans le paysage politique suédois et mettre fin à l’isolement du SD. Le parti d’extrême-droite né en 1988 et dirigé par Jimmie Åkesson est considéré comme héritier d’un groupe néofasciste. El País explique que le SD, de plus en plus populaire, était déjà arrivé à un premier accord avec le Parti modéré et les Chrétiens-démocrates en 2021. Ce dernier portait sur l’approbation de budgets alternatifs à ceux du gouvernement social-démocrate de Magdalena Andersson.
Des incertitudes sur la forme du nouveau gouvernement
Le quotidien italien La Stampa, de son côté, estime que le soutien du parti nationaliste « est désormais indispensable si le bloc de droite doit gouverner après les élections de dimanche ». Mais pour le quotidien madrilène El País, « nommer le leader d’extrême droite Premier ministre serait une étape difficilement concevable, puisqu’il soutiendrait une criminalisation des immigrés contraire à l’essence des principes démocratiques européens. »
Le bouleversement de l’échiquier politique du pays amène le quotidien suédois Göteburgs-Posten à s’interroger sur les habitudes électorales de ses citoyennes et citoyens. Alors qu’un homme sur quatre et seulement 16% des femmes auraient voté pour le SD, une enquête dans les bureaux de vote (Valu) montre que femmes et hommes n’ont pas été sensibles aux mêmes thèmes pendant la campagne. Les femmes interrogées auraient considéré la santé et l’école comme des enjeux importants, « mais la campagne électorale a plutôt porté sur des questions typiquement masculines [sic] telles que la loi et l'ordre - et surtout l'énergie nucléaire. »
Des incertitudes demeurent sur la forme exacte que le gouvernement et la majorité prendront. La victoire du bloc de droite semble être l’issue la plus probable. Des politologues estiment cependant que le SD pourrait seulement appuyer le gouvernement au parlement, sans en faire directement partie.
Christina Genet
Édité par Nils Hollenstein