Le président turc Abdullah Gül a annoncé mardi soir sur Twitter qu'il promulguait une loi renforçant le contrôle d'internet. Les ONG de défense de la liberté d'expression et les citoyens turcs crient à la censure.
Les détracteurs de cette loi accusent le gouvernement de vouloir étouffer les accusations de corruption qui l'éclaboussent depuis deux mois. Photo : Michal Koziczynski/Wikipédia.
Ironie de l'affaire, c'est sur les réseaux sociaux qu'Abdullah Gül a annoncé mardi soir qu'il donnait son feu vert à une loi renforçant le contrôle d'Internet. La trop grande souplesse dont va jouir l'autorité gouvernementale des télécommunications (TIB) provoque l'ire des citoyens turcs. Celle-ci aura notamment la possibilité de bloquer un site Internet, sans décision de justice, s'il porte « atteinte à la vie privée » ou publie des contenus « discriminatoires ou insultants à l'égard de certains membres de la société ».
La loi est jugée "liberticide" par l'opposition et de nombreuses ONG de défense de la liberté d'expression. En signe de protestation, 80 000 internautes ont cessé de suivre le président sur Twitter.
Un contexte politique déjà fragilisé
Selon les médias turcs, le gouvernement du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a proposé mardi soir d'amender son texte sur ce point. Cette modification imposerait à la TIB de communiquer sa décision de blocage à un tribunal qui se prononcerait dans les vingt-quatre heures.
Le Premier ministre avait aussi affirmé que son gouvernement, confronté en juin 2013 à un vaste mouvement de contestation dénonçant sa "dérive autoritaire et islamiste", se devait de "protéger les jeunes des effets néfastes d'Internet". Adoptée le 5 février par le Parlement turc, la loi alimente une polémique déjà vivace sur fond d'affaires politico-financières qui déstabilisent M. Erdogan à la veille des municipales du 30 mars et dans la perspective de la présidentielle d'août prochain.
La Turquie est considérée comme l'un des pays les plus répressifs de la planète en matière de contrôle du net et de liberté de la presse.
Caroline Anfossi