Vous êtes ici

Le Parlement européen a créé, mardi, une commission spéciale chargée d’enquêter sur les processus d’autorisation des pesticides dans l’UE. Les eurodéputés souhaitent répondre aux inquiétudes sur la potentielle intrusion des lobbies industriels dans la procédure de réautorisation du glyphosate pour cinq ans, votée fin novembre.

Environ 9 000 tonnes de glyphosate sont utilisées chaque année en France. © Noor Oulladi et Sophie Wlodarczak

Enquête d’intérêt général, nouveau procès contre Monsanto ou coquille vide ? Une commission spéciale sur la procédure européenne d’autorisation des pesticides a été approuvée mardi par le Parlement européen, à Strasbourg. Les écologistes Verts-ALE, les sociaux-démocrates du S&D et la gauche radicale GUE ont obtenu gain de cause. Michèle Rivasi, eurodéputée écologiste, s’est battue pour sa création : « À la suite des révélations sur les “Monsanto Papers”, on s’est aperçu que Monsanto avait beaucoup d’influence sur les expertises scientifiques déterminant la toxicité de son produit. C’est une puissance industrielle colossale qui achète des experts, des universitaires, les paye pour qu’ils signent les études rédigées par eux-mêmes, explique-t-elle. Il nous faut être vigilants.»

Constituée de 30 députés – choisis jeudi en session plénière –, la commission a neuf mois pour mettre en lumière les potentiels conflits d’intérêts entre l’industrie et les agences européennes. Le nom du ou de la presidente fait l’objet d’une forte attention de la part des élus, dont certains refusent de réagir avant que la composition ne soit rendue publique.

« L’Efsa a perdu sa crédibilité »

En septembre, l’ONG autrichienne Global 2000 a révélé que de longs passages du dossier déposé par l’américain Monsanto pour solliciter le renouvellement du glyphosate ont été recopiés par les agences européennes dans leur rapport d’évaluation officiel sur la toxicité du produit, présent dans le Roundup, l’herbicide le plus vendu au monde. L’Agence européenne de la sécurité des aliments (Efsa) a jugé «improbable que le glyphosate représente un danger cancérogène pour l’homme » en se fondant sur cette évaluation.

Michèle Rivasi estime nécessaire que l’Agence divulgue les documents sur lesquels elle s’est appuyée pour tirer cette conclusion, malgré le poids du secret commercial. Pour l’élue écologiste, « l’Efsa a perdu sa crédibilité. Il faut qu’on regarde toutes les failles où l’industrie est capable de s’infiltrer ».

« Un objet politicien »

Dans les couloirs du Parlement, la nécessité de cette commission spéciale est contestée. Angélique Delahaye, l’eurodéputée (PPE, centre droit) se méfie: « Le risque est qu’elle soit un objet politicien » façonné par les anti-glyphosate pour remettre ce débat controversé sur le devant de la scène.

La remise en cause de l’indépendance de l’Efsa, au centre des enjeux de cette investigation, est aussi perçue comme une manœuvre politique par l’Agence, elle-même. « Nous avons observé, dans le courant de l’année, que lorsque la science ne correspond pas à certains points de vue ou idéaux, c’est souvent cette dernière qui est considérée comme le bouc émissaire dans le débat public », se défend un porte-parole de l’Efsa. De son côté, l’ECPA, l’Association européenne des fabricants de pesticides, espère que ce groupe d’enquête montrera « combien le processus d’approbation des pesticides est rigoureux et sûr », affirme son porte-parole, Graeme Taylor.

Le poids de la mobilisation citoyenne

Malgré les profonds désaccords sur la toxicité ou non du glyphosate et de sa mise sur le marché, l’initiative citoyenne européenne « Ban Glyphosate », initiée par une coalition de 38 ONG, et réunissant plus d’un million de signatures début 2017, a été déterminante. Ces dernières années, l’accumulation des affaires éclaboussant la neutralité des institutions, à l’image du Dieselgate, alimentent la suspicion des ONG européennes. Suffisant pour mettre d’accord les présidents des groupes européens, en janvier, sur la création de cette commission, procédure exceptionnelle. Depuis la création du Parlement en 1952, seules 16 commissions spéciales ont été établies dont une destinée au Dieselgate en 2016. La France, elle aussi, a lancé une enquête sur l’indépendance des agences européennes, sous l’égide du député La République En Marche, Cédric Villani.

Noor Oulladi et Camille Toulmé

Glyphosate : une commission pour déterrer les conflits d'intérêts

07 février 2018

Glyphosate : une commission pour déterrer les conflits d'intérêts

Le Parlement européen a créé, mardi, une commission spéciale chargée d’enquêter sur les processus d’autorisation des pesticides dans l’UE. Les eurodéputés souhaitent ...

[ Plein écran ]

Des Congolais, présents devant le Parlement européen, manifestent mercredi pour que l'Union dénonce les crimes de leur président Joseph Kabila. © Juliette Vilrobe

Le Parlement réaffirme son mode de désignation du prochain président de la Commission

Les eurodéputés ont renouvelé mercredi leur soutien au système des «Spitzenkandidaten», qui consiste pour les partis politiques européens à désigner leur candidat à la présidence de la Commission européenne, en vue de la désignation du successeur de Jean-Claude Juncker en 2019. Il s'agit, pour le Parlement, de contrôler indirectement la nomination du prochain chef de la Commssion. Cette méthode ne fait pas l'unanimité, en particulier auprès des chefs d'Etats et des eurosceptiques qui y voient une perte de souveraineté des Vingt-Huit.

Rappel à l'ordre pour la lutte contre les discriminations 

Le Parlement européen à adopté mercredi une résolution pour lutter contre les discriminations envers toutes les minorités. Au delà d'une plus grande protection des minorités raciales, ethniques, sexuelles ou religieuses en Europe, le Parlement rappelle que ce critère demeure une condition préalable à l'adhésion d'un pays dans l'UE. Les eurodéputés demandent par ailleurs à la Commission de renforcer son action en faveur de l’usage des langues régionales.

Les inégalités dans le viseur du Parlement européen

Le Parlement a débattu mercredi d'une résolution sur le creusement des inégalités au sein de l’Union. Malgré la reprise économique dans les Etats membres, un Européen sur six vit sous le seuil de pauvreté. Parmi les points à améliorer : l’emploi, l’éducation, la formation, la protection de l’enfance ou les salaires entre les femmes et les hommes. « Les riches captent une partie toujours plus grande du gâteau. L’économie du ruissellement existe et défie les lois de la gravité : l’argent va des pauvres aux riches », a ironisé l’eurodéputé écologiste belge Philippe Lamberts (Verts-ALE).

Le prix Nobel de la paix interpelle l’Europe sur les armes nucléaires

« Il est temps pour l’Europe de s’élever contre la doctrine Trump », a affirmé, mercredi, Béatrice Fihn, directrice de la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires. A la tête de l’organisation lauréate du prix Nobel en 2017, la suédoise était invitée à s’exprimer devant le Parlement Européen, quelques jours après l’annonce du Pentagone d’augmenter son arsenal nucléaire. Rappelant que quatre des neufs puissances nucléaires disposent d’installations sur le sol européen, elle demande à l’Union européenne d’être cohérente avec les valeurs qu’elle incarne et de s’engager fermement pour l’abolition des armes nucléaires. 

Manifestation contre le président congolais Kabila

Une cinquantaine de personnes se sont réunies mercredi devant le Parlement européen pour réclamer la condamnation par l'UE des crimes du régime de Joseph Kabila, président de la République démocratique du Congo depuis 2001. Les manifestants, essentiellement des ressortissants congolais, demandent aux dirigeants européens de se prononcer contre ce régime qu'ils jugent illégitime et criminel. En décembre et janvier, le régime a réprimé des marches anti-Kabila, au moins cinq personnes sont décédées selon l'ONU.

Un rapport pour le maintien du Parlement à Strasbourg

L’association des jeunes entrepreneurs européens (AEJE) a présenté mercredi son troisième rapport « pour en finir avec la polémique sur le siège du Parlement européen ». Selon eux, « l’état de délabrement »  du bâtiment à Bruxelles est l’occasion pour ces pro-Strasbourgeois de défendre l’idée d’expérimenter un siège unique à Strasbourg entre 2019 et 2024, malgré un coût annuel de 51 millions. Au-delà des améliorations constatées en termes de transports, le rapport fixe également comme objectif d’améliorer la politique d’hébergement et soutient la valeur symbolique du siège strasbourgeois dans la construction de la réconciliation européenne d'après-guerre.

Débat sur un fonds pour la société civile

Les eurodéputés ont débattu ce mercredi de la création d’un fonds demandé par la Commission, pour financer les activités et les acteurs de la société civile. La ministre bulgare à la présidence du Conseil Monika Panayotova et la commissaire à la Justice Věra Jourová, ont évoqué la société civile comme une nécessité au bon fonctionnement de la démocratie. Aujourd’hui, certains pays comme la Hongrie et la Pologne, légifèrent contre les libertés des associations et des ONG. Věra Jourová s’est dite « favorable à la création d’un tel fonds » pour lequel une étude de faisabilité est en cours à la Commission.

Roza Thun et Andrus Ansip
[ Plein écran ]

A une large majorité, le Parlement a voté la fin des disparités entre les Européens pour leurs achats en ligne. © Emilie Sizarols

Les eurodéputés ont approuvé mardi la fin du blocage et des disparités géographiques pour les clients de sites e-commerce dans l’Union européenne. D’ici neuf mois, les Européens auront un égal et plus large accès aux biens vendus en ligne.

En 2015, pour passer un week-end à Disneyland Paris, une famille française devait débourser en moyenne 865 euros, contre 1204 euros pour une famille roumaine ou 1339 euros pour une famille italienne. Si aujourd’hui l’entreprise a harmonisé ses prix sous la pression de la Commission, cette pratique de discrimination au sein de l’Union européenne reste monnaie courante.

 

Le Parlement européen a approuvé mardi à une large majorité (557 voix pour, 89 contre) la fin du blocage et de la discrimination géographiques : d’ici décembre, les sites de vente en ligne ne pourront plus différencier les prix, les conditions de paiement et les produits proposés selon le pays de résidence du consommateur. Les Etats conservent en revanche leurs propres règles fiscales, comme sur la TVA.

 

63% d’entreprises discriminantes

 

Certaines centrales de réservations d’hôtels proposent des prix différents en fonction du pays d’origine des touristes malgré des dates identiques. De même pour les agences de location de voiture. Selon une étude de la Commission européenne parue en 2016, 63% des entreprises discriminent les clients en ligne au sein de l’Union. La palme revient aux secteurs de l’électroménager (86%) ainsi que de l’électronique et des logiciels (79%).

 

Autre point phare du règlement adopté mardi : l’égal accès des biens au sein de l’Union. Les sites en ligne seront ainsi obligés de proposer la même interface à tous les internautes, quel que soit leur pays de résidence. Amazon ne pourra plus rediriger un consommateur français vers Amazon France sans l’avoir au préalable informé. « Avec le nouveau règlement, le consommateur peut dire ‘’Nous sommes dans un marché unique, j’ai le droit d’acheter ce produit !’’» se félicite Agustin Reyna, directeur pôle numérique au Bureau européen des unions de consommateurs.

 

Le dernier grand projet du règlement concerne la transparence des prix pratiqués lors de la livraison transfrontalière. « Nous respectons la liberté entrepreneuriale donc nous laissons le choix aux entreprises de décider qui fera la livraison. Mais elles ne pourront plus refuser d’emblée de vendre un produit », précise Andrus Ansip, vice-président de la Commission européenne chargé du marché numérique unique. Le vendeur ne peut donc refuser de vendre un produit sous prétexte qu’il ne peut pas le livrer.

 

Contenus culturels réévalués en 2020

 

Point épineux des débats, les contenus culturels soumis à droit d’auteur restent exclus du règlement. Le Parlement et les Etats sont finalement parvenus à un compromis en novembre en proposant une réévaluation d’ici deux ans. « Avec la Commission européenne, nous voulions inclure les jeux vidéo, les e-books et la musique, mais nous n’avons pas pu vaincre la résistance des Etats », a reconnu Róża Thun, eurodéputée polonaise (PPE, centre-droit), rapporteure du texte.

 

Les disparités sur le traitement des droits d’auteur entre les Etats empêchent, selon Virginie Rozière, eurodéputée française socialiste, une offre culturelle globale et équitable. « On sait qu’il est difficile pour le consommateur de ne pas avoir accès aux œuvres, ajoute-elle. Mais nous avons le devoir de protéger les auteurs et la nécessité de leur donner une rémunération correcte. » De fait, vendre les droits de diffusion d’une série télévisée à vingt-sept Etats apparaît plus rentable pour les créateurs qu’à un seul Etat.

 

Impossible en effet pour un Français d’avoir accès au catalogue britannique de Netflix, au Spotify italien ou encore aux livres numériques vendus en Allemagne. « On aurait pu faire beaucoup mieux : on a menti aux citoyens, on leur a fait croire qu’ils pourraient voir leurs films et écouter leur musique préférés », a déploré lors du débat Jasenko Selimovic, eurodéputé suédois libéral (ALDE).

 

Après la réévaluation fin 2020 des contenus soumis aux droits d’auteur, certains eurodéputés entendent aller encore plus loin. « Il n’y a plus de place pour le protectionnisme en Europe, a assuré Róża Thun. Le prochain pas : harmoniser la TVA en Europe et ouvrir le service des marchés de l’audiovisuel. »

 

Juliette Vilrobe et Camille Wong

Les eurodéputés ont approuvé mardi la fin du blocage et des disparités géographiques pour les clients de sites e-commerce dans l’Union ...

Pages