Dans un rapport paru mardi, la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) fait état de 821 millions de personnes victimes de la sous-alimentation en 2017, à l’échelle mondiale. La situation se dégrade notamment du fait des changements climatiques.
En 2017, 821 millions de personnes étaient sous-alimentées sur la planète : le chiffre, n’a pas été aussi catastrophique depuis une décennie. Cela entérine une augmentation du nombre de personnes souffrant de la faim depuis trois ans, alors qu’auparavant la tendance était plutôt à la baisse. Les populations les plus jeunes restent fortement exposées, avec 151 millions d’enfants de moins de 5 ans sous-alimentés en 2017.
Parallèlement, l’obésité dans le monde ne cesse elle d’augmenter : plus d’un adulte sur huit, tous pays confondus, en est victime. Ces chiffres ont été dévoilés ce mardi dans un rapport sur l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition, piloté par la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture).
« 23 millions de personnes déplacées à cause du climat »
Les conflits restent la principale source de faim dans le monde, a rappelé, mardi, David Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial, à l’occasion de la conférence de presse sur la divulgation de ce rapport. « 22 à 23 millions de personnes sont déplacées dans le monde à cause du climat », a-t-il ajouté. D’ici à 2050, ce chiffre devrait atteindre les 250 millions, d’après l’ONU.
Diminution de la qualité des nutriments et de la diversité des aliments produits et consommés, effets sur l’eau et l’assainissement, profils de risque sanitaire et de maladies, répercussions sur les soins aux mères et aux enfants et sur l’allaitement au sein : les changements climatiques ont « un effet considérable » sur la nutrition, alerte José Greziano Da Silva, le directeur général de la FAO.
« L’Afrique est le continent le plus touché » par la sous-alimentation : près de 21% de sa population en souffre, a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Dominique Burgeon, directeur des urgences et de la résilience au sein de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture. Suivent l’Asie, avec 11,4% de la population victime de la faim, l’Amérique Latine et les Caraïbes à 6,1%, l’Océanie avec 7%, et enfin l’Amérique du Nord et l’Europe, à 2,5%. Sur le vieux continent, l’Albanie (5,5% de la population) et la Serbie (5,6%) sont les plus mauvais élèves.
En Asie, il s’agit de lutter contre la multiplication des inondations et des tempêtes, enjeu de taille s’il en est. Les experts météorologiques ont calculé que la probabilité de retour du phénomène El Nino en Amérique centrale avant le dernier trimestre 2018 était de 70 %…
A eux seuls, les événements climatiques extrêmes ont affecté 94,9 millions de personnes en 2017, obligées de recourir à l’aide humanitaire pour se nourrir.
Trouver des solutions à long terme
Pour faire face à ce défi nouveau, la FAO invite au développement de solutions à long terme, à travers « des financements de grande ampleur en faveur de programmes de réduction et de gestion des risques de catastrophe et d’adaptation à cette variabilité du climat ». David Beasley évoque par exemple « le développement de meilleurs systèmes d’irriguation ».
Pour Hélène Botreau, chargée de plaidoyer Sécurité alimentaire à Oxfam France : « Notre pays a un rôle crucial à jouer dans ce combat. Cela doit passer par la mise en œuvre effective de mesures de soutien - y compris financier - aux agricultures paysannes et aux pratiques agroécologiques, vectrices de résilience et porteuses de solutions dans la lutte contre l'insécurité alimentaire. »
Le comité catholique contre la faim et pour le développement appelle, lui, le gouvernement français « à prendre ses responsabilités » et à « veiller à s’attaquer aux causes, et pas seulement aux effets des dérèglements climatiques sur l’insécurité alimentaire. Nous n'y parviendrons pas si nous ne réduisons pas les émissions de gaz à effet de serre, et en particulier celles des systèmes agro-industriels fortement émetteurs qui ont le vent en poupe depuis plusieurs dizaines d'années en Europe, aux États-Unis et désormais dans les pays émergents.»
Ces récents défis mettent à mal les objectifs de développement durable des Nations Unies : parvenir à l’éradication de la faim dans le monde d’ici à 2030. L’aggravation de la faim s’affiche désormais comme un enjeu de taille pour les débats sur les changements climatiques de la COP24, prévue en Pologne, du 3 au 14 décembre.
Emilie Sizarols