La Hongrie est pointée du doigt pour d'éventuelles violations des valeurs de l'UE. Des sanctions pourraient être votées ce mercredi 12 septembre au parlement.
La Hongrie s'apprête à vivre un tournant de son histoire européenne. Le Premier ministre du pays Viktor Orban s'adressait ce mardi 11 septembre au Parlement européen de Strasbourg, dans le cadre du débat sur l'éventuel déclenchement de l'article 7 des traités sur l'Union. Cette procédure rare vise à sanctionner Budapest pour « l'existence d'un risque clair de violation grave par la Hongrie des valeurs sur lesquelles l'Union est fondée ».
Principaux griefs à l'encontre du gouvernement hongrois et du Premier ministre de 55 ans, membre du Fidesz-Union civique hongroise (droite) : mauvais traitement des migrants, des minorités et des SDF, atteintes aux libertés des ONG, ou encore pressions sur l'enseignement supérieur comme le rappellent France 24 et l'Agence France Presse (AFP). Les atteintes à l'encontre de l'Etat de droit, l'affaiblissement des contre-pouvoirs, et l'emprise du gouvernement sur la justice et les médias inquiètent particulièrement les instances européennes. Le déclenchement de l'article 7 a pour conséquences dans le cas le plus extrême une suspension des droits de vote au sein du Conseil de l'Union européenne.
Comme un pied de nez à ses détracteurs, le premier ministre hongrois est arrivé en retard, quitte à interrompre le discours de la rapporteuse Judith Sargentini lors de la session plénière, comme l'a immortalisé l'élue européenne néerlandaise Sophie in 't Veld, membre du parti Démocrates 66. L'eurodéputée Sargentini, néerlandaise elle aussi et membre des Verts, est à l'origine du rapport accablant sur le cas hongrois.
In a display of contempt for European parliamentary democracy Viktor #Orban rudely arrives late and interrupts the speech of rapporteur @judithineuropa . But her factual and accurate report leaves no doubt about his full scale attack on democracy and the rule@of law pic.twitter.com/f9OQdCqitZ
— Sophie in 't Veld (@SophieintVeld) 11 September 2018
Lors de sa prise de parole, Viktor Orban a dénoncé le « chantage » des forces pro-immigrations de l'Union européenne contre son pays. Il a ainsi affirmé qu'il ne les accepterait pas et les rejetterait si elles menaçaient les intérêts de la Hongrie. Son pays serait ainsi prêt à défendre ses droits et ses frontières, « contre vous s'il le faut » a asséné le chef du gouvernement hongrois à l'encontre des eurodéputés présents. Il a également fustigé le rapport Sargentini, qui, selon lui, « bafoue l'honneur de la Hongrie et des Hongrois » et « contient 37 erreurs factuelles graves », sans toutefois les préciser, comme le rapporte le média allemand Deutsche Welle.
Hungarian PM Viktor #Orban accuses the #EuropeanParliament of having pre-decided the Article 7 decision. "The [Sargentini] report in front of you insults Hungary and the Hungarian nation," he says. "This report does not give due respect to Hungarians." pic.twitter.com/Ci3yhG2g37
— DW Europe (@dw_europe) 11 September 2018
Bien qu'applaudi par quelques soutiens comme Nigel Farage, l'eurodéputé ancien président du parti UKIP et fer de lance du Brexit et aujourd'hui coprésident du groupe Europe de la liberté et de la démocratie directe (ELDD, eurosceptique) au Parlement européen, le passage devant l'Hémicycle a reçu un accueil mitigé. À sa suite, l'Allemand Manfred Weber, président du groupe Parti populaire européen (PPE, dont est membre le Fidesz de Orban) a rappelé que « stigmatiser les musulmans fait le jeu des djihadistes » et que « l'Europe a besoin d'être sûre d'elle, nous devons défendre nos idées, nos valeurs communes, et ce dans toutes nos familles politiques ». Manfred Weber a également déclaré dans un entretien à BFMTV qu'il n'y avait au sein du PPE « pas de traitement de faveur » pour Viktor Orban.
Le vote se tient ce mercredi 12 septembre à midi et s'annonce serré. Pour valider le lancement de la procédure, ses partisans doivent recueillir 376 voix (majorité simple) ou les deux tiers des suffrages exprimés.
Pierre Griner