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À la Montagne-Verte, les espaces naturels, fragiles refuges pour la faune, sont soumis à une forte pression humaine. Des couloirs de végétation limitent l’impact des infrastructures de transport qui fragmentent ces sites précieux.

Miri, le père, Valdeta, la mère, et leurs trois enfants (Meris, 15 ans, Isra, 13 ans et Erblil, 8 ans) ont quitté leur ville de Shkodër, au nord de l’Albanie, le 10 juillet 2023, dans un van. Isra revient sur les raisons de leur départ : "Le cousin de mon père est un criminel et nous avons peur pour la famille." 

Après avoir traversé le Kosovo, la Macédoine du Nord et la Serbie, ils ont réussi à franchir la frontière hongroise, porte d’entrée dans l’espace Schengen. Ils sont parvenus jusqu’à Turin en Italie avant de rejoindre la Suisse et enfin la France. À l'issue de ce périple de près de 2200 km à travers l’Europe, ils ont déposé une demande d’asile à Mulhouse. "Nous dormions à la gare et dans d’autres endroits. Dix jours après, nous avons été transférés à Sarre-Union", retrace Isra. La famille y est restée pendant onze mois jusqu’à l’échec de la demande d’asile qui l’a contrainte à partir. Arrivés à Strasbourg en juillet en bus, Isra et ses proches ont fini par arriver au parc Eugène-Imbs. "À Krimmeri (un campement de migrants à la Meinau), il y avait trop de tentes. Donc on a cherché ailleurs", raconte la jeune fille.

Pour la nourriture, ils s’en remettent aussi aux associations. Deux fois par semaine, Valdeta traverse la ville. Tous les lundis pour la collecte des Restos du Cœur de Cronenbourg, tous les mercredis pour celle de la Croix-Rouge, à l’Orangerie. "Mais les Restos du Cœur c’est pas bon et il y a pas beaucoup", soupire-t-elle.

Il est 16h30, Isra revient du collège Lezay-Marnésia et retrouve ses parents autour du feu. Elle retourne dans sa tente pour faire ses devoirs. Ses parents ne parlant pas français, elle ne peut pas être beaucoup aidée. Scolarisée depuis septembre dans cet établissement, l’adolescente a fait de grands progrès en français, elle qui parle déjà le turc, l’anglais et l’allemand en plus de sa langue maternelle. Sa solution : "J’utilise Google Traduction sur mon téléphone et ça va." Son professeur de français, Frédéric Laumont, est positif sur l’intégration d’Isra et sur son travail. Ce dernier insiste sur le "petit cocon" que constituent pour elle ces instants en classe. 

Un transit à travers l’Europe

Pauline Braunstein et Pauline Moyer

 Marius Laffont et Anouk Seveno

* Le prénom a été modifié.

En la croisant à 7h dans le bus 40, impossible de se douter de son parcours singulier. Tenue soignée, du béret noir au trench beige, cheveux brossés, Isra ressemble à n’importe quelle adolescente de 13 ans. À la sortie du bus, elle rejoint tout sourire ses amies devant le collège Lezay-Marnésia de la Meinau à Strasbourg. La sonnerie retentit. Ce matin pour les quatrièmes, c’est cours d’allemand.

Pourtant, à 6h, c’est dans une tente où le thermomètre affichait 1°C qu’Isra s’est réveillée. Depuis quatre mois, la jeune Albanaise vit dans le parc Eugène-Imbs, à la Montagne-Verte, avec sa famille.

Ces bâtiments aux façades crème décrépies font partie de l’ensemble de logements sociaux du Molkenbronn. Sous la responsabilité de Batigère, ils jurent avec les autres HLM de la cité, rénovés en 2021 par l’autre bailleur social Habitation moderne. Pourtant, les habitants des deux barres ne sont pas alarmistes. "Ici, il manque juste un ascenseur", assure l’un d’eux, tandis qu’une autre indique ne pas avoir de problème de froid ou d’humidité. Le début des travaux, bien qu’un peu tardif, témoigne du souci de Batigère pour le bien-être de ses locataires. Quelques mètres plus loin, un bâtiment dénote.

Face à cette situation, les services d’hygiène de la Ville pourraient intervenir à condition d’être saisis par les habitants. François Desrues, directeur du territoire chargé de la Montagne-Verte, confirme : "Le pouvoir de police de l’habitat revient au maire, mais ce dernier est utilisé sur signalement des habitants." Problème, aucune alerte faisant état d’insalubrité n’a été déposée selon lui. Une situation qui souligne le manque de relais d’information en matière de mal-logement. Pour les habitants, quitter les lieux apparaît plus envisageable que de faire des signalements. "Avec ma femme, on cherche à partir", confie Quentin.

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