Portrait du challenger américain Pete Buttigieg, arrivé en tête des primaires démocrates de l’Iowa.
L'outsider Pete Buttigieg est en tête du scrutin de la primaire démocrate de l'Iowa devant le favori Bernie Sanders. / Gage Skidmore from Surprise.
C’est le coup de théâtre des résultats des primaires démocrates de l’Iowa. Pete Buttigieg, ancien maire de South Bend, ville de 100 000 habitants de l’Indiana, pointe en tête avec 26,8 % des suffrages - pour l’instant dépouillés à 71 % - face aux trois candidats majeurs : Bernie Sanders 25,2 %, Elizabeth Warren 18,4 % et Joe Biden 15,4 %.
À l’issue de la journée du 4 février, et malgré les couacs des résultats, Pete Buttigieg a qualifié, devant ses soutiens dans le New Hampshire, cette victoire de « stupéfiante » alors que les derniers sondages donnaient le sénateur du Vermont, Bernie Sanders, vainqueur. Et ce progressiste de rappeler être parti de zéro en avril 2019 avec seulement « quatre salariés, aucune notoriété, pas d’argent, seulement une bonne idée ».
The pundits didn’t see our coalition coming.
This president won't see it coming either. pic.twitter.com/LeBcaa7w3Q
— Pete Buttigieg (@PeteButtigieg) February 4, 2020
Le candidat de 38 ans a un parcours à faire rêver les électeurs américains. Diplômé d’Harvard et d’Oxford grâce à la prestigieuse bourse Rhodes, il travaille pendant trois ans pour le cabinet de conseil de directions McKingsey. Polyglotte - il parle sept langues, dont le français -, il devient, en 2011, à l'âge de 29 ans, le plus jeune maire élu d’une ville de plus de 100 000 habitants. Engagé dans la Navy, il prend un congé sans solde et part sur le front en Afghanistan pendant sept mois en 2013. Il fait de son opération extérieur une force politique : « J’ai plus d’expérience militaire que tous les présidents que nous avons eus depuis 30 ans ». De retour, il est décoré pour ses services par le contre-terrorisme et reste lieutenant réserviste. « Mayor Pete », comme il aime à se faire appeler, s’oppose d’ailleurs frontalement à la politique militaire de Trump et suggère de renforcer la relation avec les alliés.
Défense de la communauté homosexuelle
Homosexuel, Pete Buttigieg est un fervent défenseur des droits de la communauté LGBT. Il a d'ailleurs célébré, en 2018, son mariage avec son compagnon Chasten Buttigieg, professeur de pédagogie qui l’accompagne partout dans sa campagne. Pour autant, il se revendique chrétien pratiquant et veut promouvoir une « gauche religieuse », souvent abandonnée par les autres candidats démocrates. « Dieu n’a pas de parti », avait-il déclaré sur les ondes de RTL en décembre 2019. Le prétendant à la Maison Blanche tacle d’ailleurs souvent le vice président évangélique conservateur, Mike Pence, ex-gouverneur de l’Indiana, l’accusant d’instrumentaliser les Évangiles contre la communauté homosexuelle. « Si vous avez un problème avec ce que je suis, votre problème n'est pas avec moi. Votre querelle, Monsieur, est avec mon créateur », avait-t-il lancé début avril. Qualifiant Mike Pence de « pom pom girl » de la présidence Trump, une présidence de « stars du porno », selon lui.
Pete Buttigieg pose avec son compagnon Chasten en mai 2019 pour le Time Magazine. / Capture d'écran de time.com
Pete Buttigieg se situe à l’aile droite du parti démocrate avec des propositions libérales sur le volet économique et social. Pour mettre en place la couverture universelle de l’assurance-maladie, il souhaite établir un partenariat entre le public et le privé. Il est favorable à l’interruption volontaire de grossesse. Le candidat a récolté près de 7 millions de contributions pour sa campagne. Certains soutiens y voient un bon remplaçant à l’ancien vice-président Joe Biden, 77 ans, également centriste.
Préoccupations des nouvelles générations
De sa jeunesse en politique, il en fait justement un argument de campagne et calque ses propositions sur les préoccupations des nouvelles générations. Il veut supprimer les grands électeurs dans le processus d’élection du président pour la rendre plus démocratique, souhaite lancer une « Green New Deal » pour donner une place plus importante aux enjeux climatiques et veut interdire le port d’armes à feu. Mais son manque d’expérience à Washington laisse sceptiques certains responsables du parti. Sa courte victoire qui semble se dessiner face à Bernie Senders dans l’Iowa lui permet de se faire une place de choix dans la campagne. Dans l’histoire du parti démocrate, l’immense majorité des anciens candidats qui avaient remporté la primaire de l’Iowa avaient obtenu l’investiture du parti par la suite. « Chaque fois que mon parti est entré à la Maison-Blanche ces cinquante dernières années, cela s’est fait grâce à un candidat novice en politique nationale, axé sur le futur, non façonné par le mode de vie de Washington et ouvrant la voie à une nouvelle génération », a-t-il déclaré à l’AFP lors d’un rassemblement le week-end dernier à Waterloo dans l’Iowa.
Pauline Boutin