Vous êtes ici
[ Plein écran ]

Des jeunes qui s'ennuient auraient brisé les vitres du CSC de la rue d'Ostwald.
© Thomas Ancelin

À la Montagne-Verte, Kévin, Isra, Abdel, Christian et Aimy sont tous usagers des services publics. De la crèche à la tombe, des tentes aux logements sociaux, des bacs de tri aux cours d’école végétalisées, l’État et ses agents oscillent sur une ligne de crête.

Services publics, regards critiques

Kévin, Isra, Abdel, Christian et Aimy sont tous usagers des services publics. De la crèche à la tombe, des tentes aux logements sociaux, des bacs de tri aux cours d’école, ils attendent mieux.

A la croisée des chemins de l'Eurométropole, le quartier de la Montagne-Verte subit les contraintes d'un lieu de passage. Bouchons, pollutions, et insécurité routière viennent peser sur le train-train quotidien de ses habitants, humains ou non. 

Des immeubles colorés bordent la rue des Foulons et des palissades de 5 mètres de haut bouchent l’horizon. Derrière, c’est l’autoroute. Le mur a été construit il y a dix ans pour réduire le niveau de décibels (dB) engendrés par l’A35, renommée depuis M35. Malgré les aménagements, la rue des Foulons est toujours considérée comme un “point noir du bruit”.

Des résidents investis dans la vie associative, des commerces en transformation, un patrimoine à valoriser. La Montagne-Verte fait mentir le cliché de la cité-dortoir.

Quatorze ans plus tard, les jeunes qui fréquentent désormais le centre n’ont rien connu des incidents de 2010, pourtant, Kévin l’assure : "Je sens encore les tensions." Pour lui, le ressentiment se transmet de génération en génération. Il estime que même si "on fait beaucoup pour eux, on sait pas s’ils pourront oublier le mal qu’on leur a fait à l’époque".

Dans le rapport d’activité de la même année, Philippe Krafft, alors président du CSC écrivait : "Nous avons décidé de construire notre projet en nous adaptant aux jeunes." Rétrospectivement, les promesses ne semblent pas avoir été tenues.

Contrairement au projet annoncé, les 1 200 m² prévus sont divisés entre le social et le médical et l'espace jeune se trouve relégué dans un local étroit. "C’est dans le couloir qui mène aux toilettes", lâche Kévin avec amertume. Les ados du quartier avaient pourtant été consultés afin de schématiser leurs attentes à propos du futur lieu. "Les jeunes ils y croient quand ils posent leurs dessins", regrette l’animateur. Leur déception est d’autant plus grande qu'ils "pensaient que tous les étages seraient à eux". Insultes, dégradations materielles, agressions ; dès l’ouverture du centre, des jeunes s’en prennent au personnel du CSC. "Ça a été un ascenseur émotionnel pour les ados de l’époque. Ça a suffi pour qu’ils pètent les plombs."

La bonne ambiance qui règne à l’intérieur du centre contraste avec les vitres brisées de la façade. "Ça, c’est des jeunes qui s’ennuient", déplore Kévin en pointant les dégâts. Plus bas dans la rue d’Ostwald, à deux pas de l’arrêt de bus Elmerforst, Abdel, 19 ans, tire sur son joint, bouteille d’Oasis à la main : "J’aime pas Montagne-Verte. Y’a rien ici, c’est vide." Le jeune homme n’a pas toujours été critique à propos du quartier. "Il y a huit-neuf ans, on allait à Europa-Park avec le CSC. Maintenant y’a plus de budget pour faire des meilleures sorties." Abdel se désole de voir certains jeunes de son quartier "cramer des trucs", mais il estime que "s’ils dealent, c’est de l’ennui, parce que leur frigo il est pas vide."

Pages