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Il est 11h30 : pic d'affluence au bibliobus. Trois employés reçoivent et conseillent les lecteurs. © Héloïse Lévêque

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Immeuble de la cité du Hohberg ©Emma Conquet et Laurie Correia

"Ici, je me sens bien. C’est un plaisir de venir le matin, sinon je ne serais pas restée." Depuis avril 2018, Ginette Erb travaille aux Jardins de la Montagne Verte, une structure de Koenigshoffen, qui aide à la réinsertion de personnes éloignées du monde du travail grâce à l’agriculture biologique. À 31 ans, cette Bischheimoise apprécie de voir les habitués franchir la porte du magasin, qu’elle gère avec deux autres vendeuses : "On a des clients sympathiques, j’aime le contact avec eux."

Avant Ginette Erb était mère au foyer. Ses enfants ont 5 et 9 ans, mais "ils ne comprennent pas pourquoi maman part tous les jours au boulot." Elle a choisi "par besoin mais aussi par envie" de recommencer à travailler. Mais sans l’aide de sa famille, elle n’aurait pas pu reprendre une activité professionnelle. "Le papa peut s’occuper des enfants, le papi et la mamie aussi; se réjouit-elle. Sinon, je n’aurais pas pu bosser à Koenigshoffen, je n’aurais pas été gagnante financièrement. J’aurais continué à m’en occuper."

Depuis son arrivée, Ginette Erb n’a pas pris un seul jour de congé. Pourtant, ses journées sont longues : "Je dois me lever à 6h55 pour être à l’heure au travail, je passe trois quarts d’heure dans le bus. Avant qu’ils modifient les lignes en septembre, je mettais une demi-heure. Maintenant, je prends d’abord la L3 à Bischheim puis j’attends 10 minutes aux Halles. Ensuite, je monte dans le bus 4 qui m’amène à Koenigshoffen."

Ginette Erb vient de renouveler son contrat de six mois. "Malheureusement, ils ne prennent pas les CDI. Dans un an et demi, je ne serai plus ici. Donc je suis obligée de me projeter plus loin. La vente ça me plaît bien." Elle aimerait continuer dans l’agriculture biologique : "Je ne m’en sentais pas du tout proche avant, mais on y prend goût !"

 


 

"Le plus du quartier c’est son esprit village."

Le couvent des Capucins

L’un des lieux atypiques du quartier de Koenigshoffen est cet ancien couvent, situé rue Monseigneur-Hoch. Il a été transformé en résidence d’accueil pour réfugiés, et a ouvert en juillet 2018. 72 personnes d’origines diverses (Afghans, Irakiens, Kosovares, Soudanais, Tchétchènes…) se côtoient dans ce bâtiment à part, lié à la fédération Caritas. Les contrats d’habitation sont ici de six mois ou d’un an. Des cours de français obligatoires sont donnés aux locataires, qui sont aidés dans leur recherche de logement. Les personnes qui y sont hébergées ont demandé de l’aide au Centre d’accueil des demandeurs d’asile (Cada), ou ont bénéficié du soutien des Services intégrés de l'accueil et de l'orientation (SIAO), qui aident les individus dans les différentes étapes d'insertion.

 

Derrière le comptoir, Claude Kök dynamique et volontaire, multiplie les va-et-vient entre la salle, les cuisines et le bar. Cette professionnelle de la restauration, d’abord implantée à Schiltigheim puis le long de la route des Romains, s’est installée  il y a onze ans dans la galerie d’Auchan. Et elle ne regrette pas : "Le niveau social était plus élevé à Schiltigheim, mais je retrouve ici l’ambiance village que j’aime tant."

La proximité avec la clientèle, voilà ce qui fait la différence pour cette alsacienne pur jus. Au P’Tit Jules, le tutoiement est de rigueur. "Je sais à l’avance ce que certains clients vont prendre et où ils vont s’asseoir !" dit-elle, sourire aux lèvres. Claude Kök connaît bien sa clientèle, et sait s’adapter à elle. "Ici, il faut être compréhensif, explique-t-elle, faire des efforts sur les prix car les gens n’ont pas beaucoup de ressources. Il faut aussi savoir faire confiance, s’arranger, notamment quand un client vous dit qu’il paiera le lendemain."

Pour autant, elle ne retrouve guère dans le quartier le lien social qui s’est tissé dans son commerce : "L’image sociale s’est dégradée, beaucoup sont en marge de la société et la Mairie ne fait rien de ce côté-là."

 


Mustafa Azimi a quitté Koenigshoffen, il y a trois semaines, pour s’installer dans un quartier proche de la gare.  La raison de ce départ est simple, les transports: "Je mettais une heure pour aller au travail et j’arrivais en retard à cause d’eux".

Ce jeune cuisinier devait emprunter le bus 4 jusqu’à Musée d’Art Moderne, puis la ligne 10. Il était contraint de prendre un abonnement CTS de 260 euros par an, sans compter les nombreux trajets en Uber le soir, lorsque le bus ne passait plus. Désormais, les quinze minutes à pied qui le séparent de son emploi lui permettent de gagner trois quarts d’heure de sommeil par nuit. "Dans un métier comme le mien où l’on finit parfois à 2 heures du matin pour reprendre à 9 heures, c’est considérable" souligne-t-il. Mustafa Azimi a bien essayé d’alléger cette contrainte en cherchant un emploi sur Koenigshoffen mais cela n’a pas porté ses fruits : "Pour nous cuisiniers, Koenigshoffen n’est pas un bon quartier pour travailler. Il n’y a pas d’offre."

Néanmoins, ce passionné des fourneaux, passé par l’Autriche, la Grèce ou encore l’Iran, aimait la vie à Koenigshoffen : "C’est un endroit calme et je trouvais tout à proximité." L’arrivée du tram est pour lui une bonne chose pour l’accessibilité de la zone. "Avec le tram, on sera à moins de quinze minutes du centre-ville, se réjouit-il. S’il était déjà là, je n’aurais jamais déménagé." Il envisage la possibilité de se réinstaller dans le quartier une fois les travaux terminés.

 


Au parc Gruber, voir le verre à moitié plein

13 novembre 2018

Au parc Gruber, voir le verre à moitié plein

Dans le parc d'activités de la route des Romains, les locaux de l'ancienne brasserie Gruber accueillent de nouveaux entrepreneurs. Ces derniers doivent jongler entre adaption aux nouvelles activités économiques et ...

 

Histoire de Strafor

En 1919, les Forges de Strasbourg sont créées à Koenigshoffen. Les produits de l’usine sont alors commercialisés sous la marque Strafo. Elle devient Strafor à partir de 1926. Au fil des années, Strafor s’agrandit et créée des filiales un peu partout dans le monde: au Maroc (1948), au Cameroun (1962), au Sénégal (1962), en Belgique (1963), etc.

A Strasbourg, les Forges possèdent deux usines, celle du Port du Rhin et celle de Koenigshoffen. Sur une surface de six hectares, Strafor Koenigshoffen se spécialise dans la fabrication de mobiliers, de rayonnages et de charpentes métalliques. Pendant la deuxième guerre mondiale, l’usine est réquisitionnée par l’armée allemande pour produire des armes. A la fin de la guerre, elle est totalement modernisée pour reprendre son activité initiale. En 1963, Strafor employait 2 868 ouvriers, dont une grande partie de pieds-noirs, d’immigrés algériens, marocains et portugais. Ces derniers sont recrutés directement dans leurs pays d’origine. A peine arrivés à Strasbourg, ils rejoignent les usines, valises en main, pour entamer leur nouveau travail. A cette époque, Strafor produit des équipements industriels, des cloisons et plafonds amovibles, mais est surtout célèbre pour son mobilier de bureau.
 

Aya Alkhiyari et Maxime Arnoult

 

Thierry Robert habite Brumath, à vingt kilomètres de Koenigshoffen. Depuis mai 2018, il est responsable de la communication aux Jardins de la Montagne-Verte, une structure qui aide à la réinsertion de personnes éloignées du monde du travail grâce à l’agriculture biologique. Avec 35 minutes de trajet chaque matin, il estime que "ce n’est pas énorme." Il a choisi le vélo et le TER pour se rendre à son travail : "Avec la voiture, je pourrais partir plus tôt mais je n’arriverais pas à la même heure. On a souvent 10, 15, 20 minutes de plus à cause des bouchons."

C’est pendant les vacances scolaires que ces trajets deviennent plus compliqués pour Thierry Robert. Quand il travaille, il doit déposer son fils de 10 ans dans des structures de garde d’enfants. "Je l’inscris au centre de loisirs de Brumath ou je lui propose les stages multi-sports de l’ASPTT à Koenigshoffen. Ça peut rapidement me coûter 100 euros par semaine."

A son arrivée, Thierry Robert a revu le site internet des Jardins. Bientôt, il prévoit d’y vendre des paniers de légumes saisonniers, dont deux-tiers sont produits par les Jardins. Pour le reste, "on essaye de se fournir dans le coin mais ce n’est pas toujours possible." Thierry Robert, qui s’occupe également de la négoce, inscrit cette démarche dans la responsabilité environnementale de l’entreprise. "Dès que je suis arrivé, on a choisi un hébergeur de site, en Suisse, qui est le seul en Europe à utiliser l’électricité verte pour ses serveurs informatiques." Il aimerait rendre son entreprise encore plus écologique, "mais c’est un problème de coût."

 


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