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Encadrement pédagogique : Laurence Defranoux, Nicole Gauthier

Encadrement technique : Guillaume Bardet 

Directrice de publication : Nicole Gauthier

Rédacteur en chef : Pierre-olivier Chaput

Chef Iconographique : Thomas Porcheron

Chef d'édition : Eddie Rabeyrin 

Réalisation : Kévin Brancaleoni, Pierre-Olivier Chaput, Franziska Gromann, Anne Mellier, Ferdinand Moeck, Sophie Motte, Thomas Porcheron, Eddie Rabeyrin, Léa Schneider, Clara Surges, Margaux Tertre 

Des cartables plus légers, des élèves mieux préparés au postbac, mais aussi une source de distractions... Treize lycées expérimentent depuis la rentrée le passage au tout-numérique. Objectif : équiper tous les lycées alsaciens d'ici 2022.

« C’est plus moderne et rapide », se réjouit Laura, mais sa camarade Sarah réplique : « Parfois la connexion laisse à désirer... » Depuis la rentrée 2017, ces deux élèves de terminale STD2A (design et arts appliqués) au lycée Le Corbusier d’Illkirch, expérimentent l'usage de la tablette électronique et de l'ordinateur portable en classe. Une initiative de la région Grand Est dont l'ambition est d'imposer l'usage de l'outil numérique aux élèves et professeurs pour chaque facette de l'enseignement : manuels scolaires téléchargés, registre d'appel en ligne, prise de notes, recherche documentaire, et même examen. L'objectif est que l'ensemble des lycées de la région franchissent le pas d'ici 2020.

Cet ambitieux « plan numérique éducatif » exige un investissement important des établissements mais également des familles car chaque élève doit avoir son propre matériel informatique. Pour ceux qui ne sont pas équipés, la région a mis en place un système d'aides pour l'achat d'un des trois modèles du constructeur HP : une tablette avec clavier amovible, un ordinateur portable standard ou un autre plus puissant. Toutes les familles dont le revenu net est inférieur à 6 000 euros par mois reçoivent une aide représentant 50 % du prix du matériel dans une limite de 225 euros. Loin des 1 056 euros nécessaires pour acquérir le PC haut de gamme.

Propos recueillis par Clara Surges

Des pistes numériques pour la viticulture alsacienne

Le numérique se propose aussi de changer le quotidien des vignerons alsaciens. Le groupe d'innovation InVino Tech lance plusieurs pistes, sous la houlette de l'association « Alsace digitale », qui promeut les initiatives numériques dans la région. Outre la cartographie du vignoble et de ses caractéristiques et une plateforme de partage des observations de terrain, qui concernent directement les exploitants, d'autres projets impliquent toute la filière viticole. Un des objectifs serait de mieux faire connaître les grands crus alsaciens hors de la région en sensibilisant les restaurateurs via internet. Grâce à une application mobile, InVinoTech envisage de réévaluer à la hausse les prix de vente. Reste à concrétiser ces démarches, imaginées lors d'un « hackathon » à Colmar en février 2018.

L.S.

Paul-Jasper Dittrich, chercheur à l'Institut Jacques Delors. Crédit photo : Institut Jacques Delors

En Alsace, treize lycées privés et publics participent à l'expérimentation du « lycée 4.0 ».

Des data qui rapportent?

« L’image des agriculteurs a changé. Ils ont grandi avec des smartphones et des ordinateurs. Il y a des décisions qui sont maintenant prise par ordinateur, avec des informations qu’ils n’auraient jamais eues avant. Ils deviennent de plus en plus des managers, explique Eva Gallmann, professeure en science agricole à l’Université de Hohenheim en Allemagne. Néanmoins, il reste encore des points faibles dans l’agriculture numérique », constate-t-elle. Comme la vulnérabilité face au piratage informatique. Les données recueillies intéressent aussi les grandes entreprises. « Ce n’est pas un hasard si des multinationales comme IBM et SAP entrent dans le marché du numérique agricole. Les datas recueillies pourraient ensuite être traitées avec des algorithmes pour recevoir des informations importantes sur les récoltes. Une ressource intéressante pour spéculer en Bourse. Ça pourrait influencer le marché international de manière totalement imprévisible », estime-t-elle. Un marché d’ores et déjà influencé par le numérique, qui a fait augmenter la production de lait. Et donc baisser les prix.

« En 2012, lorsqu’on percevait 40 centimes par litre, c’était l’euphorie chez les éleveurs. Aujourd’hui, ce ne sont plus que 33 centimes. Avec cette baisse, le lait n’est plus rentable pour une ferme comme la nôtre», dit Raphael Baumert observant la pluie fine de l’intérieur d’une étable. Jusqu’en 2015, la production de lait était limitée et stabilisée par un régime des quotas, déterminé par l’Union européenne. Depuis, la production a augmenté et les prix ont baissé à cause d’un surplus de lait sur le marché. « Lorsque le prix du lait est très bas, les grandes fermes doivent diminuer leur production. Les nouvelles machines ne fonctionnent donc pas toujours à plein régime, alors qu’elles avaient été achetées pour produire plus », explique Jürgen Neumeier du service agriculture de la région d’Ortenau.

« Cela devient de plus en plus un job de bureau. Avant, il fallait que l’on voit tout de nos yeux, maintenant, on regarde les données de surveillance des animaux », explique Veronika Baumert. Les datas sont enregistrées sur le réseau privé de l’exploitation. Tout est détaillé sur l’écran. Combien de pas une vache fait-elle par jour, combien de lait donne-t-elle ? On connaît même la quantité de sel  dans le lait, indicateur potentiel d’une inflammation chez la bête. « Le numérique n’améliore pas en soi la santé des animaux mais on voit beaucoup plus vite les premiers indices d’une maladie. On peut mieux s’occuper de l’animal », juge l’éleveuse.

Alors que les vaches n’étaient traites que deux fois par jour traditionnellement, elles le sont jusqu’à quatre fois désormais. Un rythme qui repose en théorie sur le choix de l’animal. Leur production de lait a augmenté : 1500 à 1700 litres par jour pour le cheptel actuellement contre 1300 à 1400 litres avant l’achat du robot en 2008. « Il y 20 ans, une vache donnait 4500 litres en moyenne par an. Aujourd’hui c’est environ 10 000 litres, grâce au fourrage concentré et à l’élevage optimisé. », explique Karl-Philipp Baumert.

[ Plein écran ]

Les Baumert passent deux heures par jour à s'occuper des données. Le plus souvent dans leur bureau, comme, ici, Veronika Baumert. Credit photo: Cuej / Ferdinand Moeck.

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