La sidérurgie européenne, exsangue, encaisse un nouveau coup avec la vente à un prix symbolique de cinq sites roumains. Mais l'opération menée par le géant russe Mechel éveille des soupçons de fraude.
Après les tribulations d'ArcelorMittal en France et en Belgique, nouvel épisode dans la saga de la sidérurgie européenne : cinq usines roumaines, détenues par le géant russe de l'acier Mechel, ont été cédées à une microsociété jusque-là inconnue, et ce, pour la modique somme de 52 euros !
En Roumanie, la production sidérurgique a chuté de cinq à trois millions de tonnes entre 2008 et 2012. 10.000 emplois ont disparu dans la branche.
Quelque 4 000 salariés sont concernés par la vente des sites de Braila (est), Campia Turzii (nord-ouest), Buzau, Otelul Rosu et Targoviste (centre). Le ministre roumain de l'Economie, Varujan Vosganian, s'est dit préoccupé mais a indiqué que le repreneur Invest Nikarom comptait faire repartir l'activité dès le 10 mars à Targoviste et Buzau.
Le petit poisson et la baleine
Pas de quoi rassurer les représentants syndicaux. Constantin Iarce, qui travaille au laminoir de Braila accuse le groupe russe de vouloir liquider la sidérurgique roumaine : « Nous craignons qu'Invest Nikarom soit un paravent qui permette à Mechel (le propriétaire actuel, ndlr) de licencier à la pelle puis de démembrer les usines pour vendre de la ferraille, comme ils ont commencé à le faire sans assumer aucune responsabilité sociale ».
« Un petit poisson d'aquarium avale une baleine », dénonce de son côté le quotidien roumain Adevarul. La société Invest Nikarom, qui a racheté les cinq usines – et avec elles les dettes de 500 millions d'euros accumulées par Mechel –, ne pèse pas grand chose. A son compte : 340 000 euros de chiffre d'affaires et une force de frappe de... trois salariés. Surtout, l'improbable repreneur est contrôlé par Viktor et Svetalana Chumakov, qui ne sont autres que les parents de la représentante de Mechel en Roumanie.
Lorraine Kihl (avec AFP)