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"Maintenant, on arrête les conneries !" Jean Massiet donne le ton devant le public du festival des Bibliothèques Idéales dans la grande salle de l’Aubette ce jeudi 26 septembre. "Les jeunes font aussi partie du monde social, ils méritent d’être mieux inclus dans les politiques publiques." Connu pour son émission de débat politique BackSeat, diffusée chaque semaine en live sur Twitch, le streamer sort son premier ouvrage, "Les jeunes c’est le présent", aux éditions Payot.
Devant une centaine de personnes, le chroniqueur dresse un tableau très sombre de la jeunesse française. Difficultés d’insertion, mauvaises conditions de travail, galères de logement, dégradation de la santé mentale… Les chiffres sont précis, les arguments étayés, et le discours incisif quand il s’agit de dénoncer l’hypocrisie des politiques : "Dire 'les jeunes c’est l’avenir', c’est un discours qui prépare la justification de l’inaction", lance-t-il.
"On vit dans une société de la vieillesse"
Mais au fait, qui sont "les jeunes" exactement ?, lui demande-t-on dans l’audience. La réponse ne fait pas de doute pour lui : être jeune dépendrait moins de son âge que de ses conditions sociales. "Aujourd’hui on est jeunes de plus en plus longtemps, tout simplement parce que la période de précarité est toujours plus longue". De ce constat nait l’indignation : "On a choisi d’être dans une société de la vieillesse. La seule réponse qu’on donne à la souffrance des jeunes, c’est le retour de l’uniforme et le Service National Universel. Mais si on met les jeunes en uniforme, c’est uniquement pour rassurer les vieux."
De nouvelles formes de politisation
Après les constats sociologiques, quid des réponses politiques ? Comment faire pour mieux entendre les jeunes et répondre à leurs préoccupations ? Là encore, Jean Massiet est sur tous les fronts : "Il faut laisser place aux jeunes dans nos institutions politiques, les inclure pleinement dans le fonctionnement de notre société". À leur prétendu désengagement politique, il rétorque : "Si les jeunes ne votent pas, ce n’est pas par désintérêt pour la politique, c’est une exigence déçue." Et de revendiquer : "Les jeunes vivent aussi des moments politiques collectifs sur des serveurs, dans des jeux vidéo. Ce sont des nouvelles formes de politisation."
"Ça fait plaisir que quelqu’un s’empare du sujet"
Assise au premier rang, Victoria ne perd pas une miette du discours. En terminale au lycée d’Erstein, elle est venue en train jusqu’à Strasbourg spécialement pour assister à la conférence après les cours. Elle ne connaissait pas Jean Massiet avant de se pencher sur la programmation des Bibliothèques Idéales il y a quelques semaines. Féminisme, écologie, éducation… à seulement 17 ans, celle qui veut devenir professeure de SES se décrit volontiers comme "assez engagée". Préoccupée par son avenir, le message porté par l’auteur, dont elle a acheté le livre, a piqué sa curiosité : "Je trouve que les jeunes ne sont pas assez considérés. Alors ça fait plaisir que quelqu’un s’empare du sujet. J’étais curieuse de voir ce qu’il avait à dire".
Le message est passé : jeunes de tous les pays, politisez-vous. Ironie du sort : Victoria est minoritaire dans le public, plus proche de la retraite que du lycée. L’occasion peut être de s’interroger sur l’intérêt pour Jean Massiet de revenir à des formes aussi classiques que le livre pour toucher les jeunes.
Lilou Bourgeois
Édité par Elsa Rancel
Elle part à la retraite à 67 ans mais a déjà prévu de rempiler. Josiane Chevalier, préfète de la région Grand Est et du département du Bas-Rhin, tire sa révérence ce lundi 30 septembre. L’an dernier, elle confiait à nos confrères des Dernières Nouvelles
d’Alsace : “Mon projet, c’est de me présenter comme maire dans la commune où je prendrai ma retraite, en Isère.”
À quatre reprises, Josiane Chevalier est devenue la première femme préfète dans les institutions où elle a été nommée (Pyrénées-Orientales, Essonne, Corse-du-Sud et Grand Est). Mais elle ne se sera pas démarquée de ses prédécesseurs, sauf peut-être par sa fermeté.
“Profondément marquée” par l’attaque de quatre policiers en 2016
Née en 1957, l’Iséroise commence sa carrière dans l’Ain, comme attachée de préfecture. Elle est nommée préfète pour la première fois en 2012, dans le Tarn. Ses deux ans à la tête de l’administration départementale sont marqués par sa gestion du dossier du barrage de Sivens. La préfète valide en octobre 2013 le projet, suivant l’avis du gouvernement. C’est elle qui gère le maintien de l’ordre, et cherche à éviter l’installation d’une ZAD (zone à défendre) sur le terrain du chantier, qui sera abandonné en 2015. Elle quitte cette fonction en juillet 2014, trois mois avant la mort du militant Rémi Fraisse, tué par l’explosion d’une grenade lancée par un gendarme.
Josiane Chevalier devient préfète des Pyrénées-Orientales jusqu’en 2016, puis d’Essonne. Elle y est “profondément marquée” par l’attaque de quatre policiers à Viry-Châtillon. Le 8 octobre 2016, deux véhicules des forces de l’ordre sont ciblés par des cocktails Molotov. La préfète fait alors de la demande d’équipements et de renforts sa priorité. C’est peut-être de cet événement qu’elle tire le zèle dont elle fera preuve durant tout le reste de sa carrière.
Amie avec la belle-mère d’un mafieux
La passionnée de rugby quitte l’Hexagone en 2018 pour devenir préfète de Corse-du-Sud. Elle s’y lie d’amitié avec Marie-Ange Susini, la belle-mère du chef du groupe mafieux du Petit Bar. Auditionnée en 2023 dans le cadre d’une enquête sur la bande criminelle, la préfète niera avoir eu connaissance de l’identité du gendre de son amie.
C’est en Corse aussi que ses prises de positions vont être les plus médiatisées. Dans cette région aux tendances indépendantistes, Josiane Chevalier entretient jusqu’à son départ de l’Ile de Beauté des relations conflictuelles avec le président du Conseil exécutif de Corse Gilles Simeoni. Elle rejoint ensuite une région où les questions d’autonomie sont aussi récurrentes : en janvier 2020, elle est nommée préfète du Bas-Rhin et de la région Grand Est.
Des relations tendues avec la mairie de Strasbourg
Dès sa prise de fonction, elle annonce la couleur aux Dernières Nouvelles d’Alsace : “La sécurité est la première des libertés.” Josiane Chevalier impose le port du masque en permanence dans 13 communes du Bas-Rhin durant la pandémie de Covid-19. Elle persiste durant les années suivantes en autorisant l’usage de drones durant une manifestation contre la réforme des retraites, puis en prononçant des interdictions de manifester, notamment lors du mouvement de soutien à la Palestine. À l’inverse, la préfète se montre plus conciliante lors de la crise agricole de janvier 2024 : elle “reconnaît la légitimité des revendications” des agriculteurs et autorise le blocage d’une autoroute durant 24 heures.
Celle qui se défend de “faire de la politique” garde tout de même des relations conflictuelles avec les institutions locales. De nombreux désaccords avec la municipalité écologiste de Strasbourg, sur l’expulsion du camp de l’Étoile, le relogement des sans-abris ou la construction de la mosquée Eyyûb Sultan, se règlent devant le tribunal administratif. Sur ce dernier dossier, elle suit la ligne du ministre de l’Intérieur de l’époque Gérald Darmanin, quitte à se brouiller avec la maire EELV de Strasbourg Jeanne Barseghian.
La préfète entretient aussi des relations tendues avec le média Rue89 Strasbourg, qu’elle juge “dans l’excès”. Pendant un an, Josiane Chevalier ne répond à aucune sollicitation de leur part : “Je parle à qui je veux et je communique de la manière dont je le souhaite”, expliquait la préfète en mai 2023. Sarcastique, le média a choisi d’organiser son pot de départ ce 27 septembre sur la place de la République.
Yves Poulain et Élodie Niclass
Édité par Angellina Thieblemont