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Le quartier des canotiers
Loin de la baignade et du repos, ce sont surtout les travailleurs qui percent les flots du faubourg. Le XIXe siècle est celui du développement du quartier, particulièrement prisé des bateliers et des ouvriers de l’eau. Parmi eux, Suzanne Goetz4 travaille à la blanchisserie Gall, située dans l’actuel Murhof, l’une des principales industries du quartier. Elle permet à des bourgeois venus de toute la ville de faire laver leur linge sans se rendre aux lavoirs publics qui jalonnent les rues de la Montagne-Verte. Deux siècles plus tôt déjà, les paysans asservis amenaient ici, trois fois par an, la lessive de leurs seigneurs. À quelques pas seulement, on aperçoit des pêcheurs à bord de leurs barques. Ils sont cinq professionnels pour ce seul quartier en 18465, remontant chaque jour écrevisses et poissons sur leurs barques à fond plat. Parmi leurs prises, des carpes, ingrédient principal de la matelote, spécialité des restaurants du quartier comme le Fischotter, au 169 de la route de Schirmeck6.
Onze Pro-Inter sont implantés en Alsace et dans le Territoire de Belfort, mais l’entreprise est née ici, au 206 route de Schirmeck. Le fondateur, Dursun Asan, arrive en France en 1974, à 27 ans. Dix ans plus tard, il achète une épicerie avenue du Neuhof pour 110 000 francs et en 1992, il fonde Produits Internationaux, ou Pro-Inter, avec ses quatre fils Souleyman, Salih, Selman et Salim. Ce premier supermarché va en amener d’autres. Pro-Inter se revendique aujourd’hui comme une "référence régionale". "Le papa était boucher, il avait un local bidon, maintenant le groupe joue dans la cour des grands", résume Hakim*, un habitant du quartier qui connaît bien la famille.
© Alizée Grides et Mathis Nicod-Frey
Au XIXe siècle, la Montagne-Verte est un quartier apprécié des Strasbourgeois, notamment grâce à la vie autour de ses cours d’eau. Retour à l’époque où la montagne était bel et bien verte.
Le rouge des poivrons, le vert des courgettes et les affiches jaunes des promotions contrastent avec le ciel gris de ce samedi 9 novembre. Une fois par mois, durant trois jours, un gros arrivage de fruits et légumes transforme l’entrée du Pro-Inter de la Montagne-Verte en un marché à ciel ouvert. Un balai de voitures défile dans la petite rue qui mène au supermarché. Ce samedi, cet espace de 500m2 va attirer "entre 1 000 et 2 000 clients", selon la responsable du magasin.
Fatima, Nadia et leurs deux amies tirent chacune un chariot. Elles viennent toutes les semaines, ensemble, "pour les fruits et légumes, parce que c’est moins cher". Des mangues du Brésil vendues 1,50 euro l’unité, comme le kilo de patates douces importées d’Egypte ; le kilo de pommes de terre à 70 centimes, les tomates à 2 euros. Des prix qui défient toute concurrence.
"Ça fait vingt ans que j’entends que le Auchan va fermer", ironise Nadia, une habitante du quartier de la Montagne-Verte. Mais cette fois c’est pour de bon. Le 9 novembre, le groupe de la grande distribution a annoncé la suppression de plus de 2 300 emplois et la fermeture de plusieurs magasins dans toute la France. Celui situé au 284 route de Schirmeck, dans le quartier de la Montagne-Verte, fait partie du lot. Il doit tirer le rideau le 30 novembre.
Quentin Baraja et Laurent Offerle-Guillotin
Titouan Catel--Daronnant et Kim Du