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Il dispose de deux sources principales : le canal et un puits, creusé dans la nappe phréatique. L’eau qui circule dans le canal est gérée par l’Autorité de la vallée du Jourdain, organe étatique qui décide, selon des critères flous, des quantités d’eau en heure de pompage distribuées à chaque exploitation. « Pendant l’été, la nappe est notre unique source d’eau », explique Hachem Alnasser. Le reste de l’année, « une moitié vient du puits et une autre du canal. »

Entre deux rangées de citronniers, Ayman Ibrahim prend soin des jeunes branches en plein cagnard. Le thermomètre approche les 30 °C. Travailleur étranger originaire d’Égypte, chrétien copte, c’est lui qui, tous les jours, veille au grain. Taille des arbres, irrigation, marcottage, nouvelles essences, il mène toutes les batailles. Payé entre 10 et 20 JOD (entre 13 et 26 euros) par jour, il est une des petites mains qui vivent directement sur les exploitations dans des conditions difficiles. « Je vois ma famille une fois tous les deux ans. Tout ce que je gagne, je leur envoie. »

Elle partage 20 m³ d’eau par semaine avec son mari et son fils. Et si les quatre voitures sont lavées chaque week-end, ce couple de médecins fait tout de même des concessions. Les palmiers ont remplacé les rosiers, trop gourmands en eau. La piscine n’est remplie que jusqu’aux trois quarts et les sauts y sont interdits.

photo exploitant jordanien
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Gérant d'une entreprise immobilière, Abdalrahman Alghzawi apprécie passer du temps sur ses terres, parmi ses bêtes. © Célestin de Séguier 

Nasser Fedah, le fils âgé de 26 ans, ne se souvient pas d’une époque sans rationnement : « Il est arrivé que j’aille sous la douche et que rien n’en sorte parce que la cuve était vide. » Aujourd’hui encore, sa mère veille au grain. « Je ne peux pas m'empêcher de toquer à la porte quand j’entends l’eau de la salle de bain couler. »

« Laver les voitures deux fois par semaine, surtout en été, je ne suis pas certain que ce soit nécessaire », critique Mohamed Sammer. Il est gardien dans l’un des grands immeubles en pierres beiges typiques d’Al-Joubayhah, un quartier de classe moyenne situé dans le Nord d’Amman. Mohamed Sammer a la charge de surveiller les stocks d’eau des habitants. Il s’occupe aussi de l’entretien des parties communes.

Même dans les quartiers les plus riches de l’ouest de la ville, le manque d’eau est dans toutes les têtes. « C’est le plus grand problème des familles jordaniennes », soupire Jihan Fedah, habitante du quartier d’Abdoun, où se côtoient ambassades et grandes demeures contemporaines avec jardin.

photo Atef Abassi, exploitant jordanien
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Atef Abassi amorce sa pompe chaque jour pour irriguer ses arbres fruitiers. © Célestin de Séguier

Économiser l’eau, une charge mentale portée par tous les membres du foyer puisque c’est Walid Al-Bitar, le mari, qui maîtrise les dépenses et règle la facture. La famille doit payer en moyenne 7 JOD par mois (soit 9,10 euros). Une somme relativement basse puisque l'État en finance une grande partie : moins un foyer consomme, plus la prise en charge est importante. Le montant réel de la facture de la famille Al-Bitar s’élève à plus de 28 JOD.

Une astuce parmi tant d’autres pour rationner au quotidien. Par exemple, l’eau utilisée pour se laver les mains ou nettoyer les légumes sert à tirer la chasse d’eau. Celle de la machine à laver est destinée aux escaliers. Quant aux douches, il faut faire des concessions. « Le seul à pouvoir la prendre tous les jours, c’est mon fils Mohamed parce qu’il travaille dans une entreprise de tapis », souligne avec amertume la mère de famille.

Et quand on vit à huit avec 3 m³ d’eau par semaine – contre en moyenne 1 m³ par personne en France – pas de place au gaspillage. « C’est fatigant de devoir toujours calculer ce que je consomme », se désole-t-elle. C’est avec une énergie débordante qu’elle enchaîne les tâches domestiques. Sa priorité est de lancer sa machine à laver, la seule de la semaine. Place ensuite au nettoyage de toute la maison, à l’exception du sol. « Je n’aime pas les tapis, mais comme je ne peux pas me permettre d’utiliser de l’eau pour nettoyer le carrelage, on en a mis partout. »

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